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Jérôme Lavrilleux, ou la chute d'un tireur d'élites

L'ex-directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012, Jérôme Lavrilleux, le 22 novembre 2012 à Paris [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives] L'ex-directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012, Jérôme Lavrilleux, le 22 novembre 2012 à Paris [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]

Fraîchement élu au Parlement européen, Jérôme Lavrilleux se voyait en "sniper" au service de son patron Jean-François Copé: l'affaire Bygmalion met un terme à la carrière de ce surdoué de la politique, entré par la petite porte à l'UMP, qui s'apprête à l'exclure.

"Lavrilleux affronte Marine Le Pen aux européennes dans le Nord-Ouest. Vous ferez un portrait de lui? Ca le vaut!": ainsi parlait de lui Bastien Millot, cofondateur de Bygmalion, la société au coeur du scandale menaçant d'emporter le mouvement de droite républicaine.

Millot-Lavrilleux: ces deux-là se sont juré fidélité. Au coeur de la tempête, le serment semble résister. "Bastien est l'un de mes meilleurs amis", dit l'ex-directeur de cabinet de Copé, âgé de 44 ans.

Tous deux sont nés à Saint-Quentin (Aisne). Même milieu social, moins modeste toutefois que l'un et l'autre ne le disent. Millot est fils de cultivateur, Lavrilleux d'un garagiste prospère.

De ce père, d’abord ouvrier qui s'est fait tout seul, Lavrilleux dit avoir hérité le côté "gros travailleur".

Le 20 mai, le futur député européen tient meeting près de Saint-Quentin. Son père est dans le public, tout ouïe pour son fils qui dénonce "la démagogie" du FN.

Père fier de son fils, fils fier de son père. Après le meeting, le candidat tient à montrer le garage familial, sur lequel s'étale en grosses lettres leur patronyme.

Jean-Francois Copé et Jérôme Lavrilleux le 27 novembre  2012 au siège de l'UMP à Paris [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]
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Jean-Francois Copé et Jérôme Lavrilleux le 27 novembre 2012 au siège de l'UMP à Paris

"Quand j'avais 14 ans, se souvient-il, je suis allé travailler au garage pendant les vacances. J’ai tutoyé un des employés que je connaissais depuis toujours. Mon père m'a donné une sacrée claque. +Ce n'est pas parce que tu es le fils du patron que tu dois t'autoriser à tutoyer les employés+. Ca, c'est formateur!", se souvient trente ans après, cet homme de haute taille, démarche souple et allure juvénile, divorcé sans enfants.

L'habitude du vouvoiement, Lavrilleux la gardera. Avec Copé notamment, qu'il appelle néanmoins "Jean-François".

Lors de la féroce bataille entre copéistes et fillonistes pour la présidence de l'UMP, fin 2012, Lavrilleux défendait bec et ongles celui dont il disait: "en 2017, il sera soit à l'Elysée, soit à Matignon".

- Dark Vador et casque blanc -

Depuis trois semaines, cette éminence grise brutalement projetée sur le devant de la scène ne cesse d’expliquer aux médias, dont l'AFP, que l'affaire Bygmalion concerne les comptes de campagne de Nicolas Sarkozy, maquillés parce qu'ils avaient explosé. Il l'a répété pendant sa garde à vue le 17 juin.

Il dit sa vérité. A la justice de dire si c'est la vérité. "Non, Copé n'a jamais été mis au courant. Non, Sarkozy ne savait pas", assure-t-il, même si ses affirmations mettent l'ancien président en difficulté.

Sa confession en pleurs à la télévision au lendemain des européennes? "Hypocrisie", dénoncent certains. "Sincère et émouvant", affirment d'autres. "Dark Vador a mis son casque blanc", grince un élu UMP.

"Je suis le seul à assumer mes responsabilités dans cette affaire", dit Lavrilleux. Il reconnaît avoir couvert le montage financier illicite - "de toute façon, la police a toutes les factures" - mais refuse d'en endosser la paternité.

Alors qui? Il pointe Guillaume Lambert, directeur de la campagne de Sarkozy, Eric Cesari, directeur général de l'UMP, dit "l'oeil de Sarko", et Fabienne Liadzé, ex-directrice financière.

"Ils ont tenu une réunion un matin, entre fin mai et début juin 2012. Je n'y étais pas", affirmait-il à l'AFP le 16 juin. "Une solution a été trouvée à l'arrache pour ne pas présenter des comptes en déséquilibre. C'aurait été un massacre politique".

"Je sais que ma carrière politique est terminée", lâche-t-il, jurant toutefois qu'il ne démissionnera pas de son mandat, même s'il s'attend à ce que "Juppé et Fillon le lui demandent".

Bravache, ce titulaire d’un BTS de commerce international relève: "Je n'ai pas fait les grandes écoles, je ne suis pas de leur monde, je ne le serai jamais".

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