Le départ du Vendée Globe 2012-2013, tour du monde à la voile en solitaire, sans escale et sans assistance, a été donné samedi à 13h02 des Sables d’Olonne (Vendée). Les navigateurs les plus rapides mettront environ 90 jours à parcourir la planète par les océans. Pour les autres, il faudra s’armer de patience et compter jusqu’à un mois et demi supplémentaire.Pendant cette période, tous devront apprendre à vivre loin de leurs amis, de leurs enfants et surtout de… Madame (ou de Monsieur pour Samantha Davies, la seule femme engagée) !
Est-il facile de se passer de câlins lorsque l’on s’apprête à vivre entre 3 et 4 mois seul en mer sur son bateau ? "Beaucoup de journalistes pensent à poser cette question aux navigateurs mais rares sont ceux à passer à l’action", confie Charlotte Bimes l’attachée presse de Louis Burton, l’un des participants au Vendée Globe.
Pourtant, tous se prêtent au jeu lorsque l’on aborde avec eux un sujet aussi intime et indiscret que celui-ci. Il y a d’abord ceux qui l’évoquent sans détour et avec légèreté. C’est le cas d’Alessandro Di Benedetto (Team Plastique), qui en 2010 a réalisé l’exploit de boucler le même itinéraire que celui du Vendée Globe avec un voilier minuscule de 6,50 mètres.
"Ne vous inquiétez pas, je compte sur quelques sirènes pour prendre du bon temps ! Et oui, qui vous dit qu’elles n’existent pas ? ", s’amuse le skipper franco-italien initié à la voile par ses parents dès l’âge de 6 ans.
"Les plus ennuyées, ce sont nos épouses"
"On gère ça comme on peut", reprend Jérémie Beyou (Maître Coq), vainqueur aux côtés de Jean-Pierre Dick de la Transat Jacques Vabre 2011. "Les plus ennuyées, ce sont nos épouses. Lorsque nous sommes sur le bateau, on n’a presque pas le temps d’y penser".
Vraiment ? "Bon d’accord, il y a un mot qui commence par un "m" et qui est le même en mer comme sur terre. Mais je ne vous dirai pas lequel", glisse-t-il malicieusement.
Et puis il y a les navigateurs plus pudiques, moins à l’aise sur la chose. "Vous savez, on dit souvent que les skippers considèrent leur bateau comme leur maîtresse. Alors je ne me fais pas de souci pour moi…", raconte l’énigmatique Arnaud Boissières (AKENA Vérandas), 7eme de l’édition 2008-2009 après avoir bouclé son tour du monde en 105 jours 2 heures 33 minutes et 50 secondes.
Arnaud Boissières aime son bateau au point de l'embrasser et de le considérer comme sa maîtresse ! (DAMIEN MEYER / AFP)
Le corps humain peut tout oublier
"Il faut faire avec", explique pour sa part Louis Burton, benjamin de l'épreuve du haut de ses 27 ans (Bureau Vallée). "Je ne suis jamais sorti en mer plus de 20 jours d’affilée. Mais je n’ai pas peur. Je viens d’ailleurs de lire dans une revue scientifique qu’au bout de 3 mois passés en isolement, le corps humain peut s’adapter à toutes les situations. Dans certains cas, il est même capable d’oublier ses accoutumances".
Soit. Mais pour ceux dont le taux de libido peine à baisser après 3 mois, cette abstinence contrainte et forcée influe-t-elle sur leur performance ?
"Clairement oui, ça peut jouer sur votre moral et sur votre motivation", analyse le Suisse Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat), sérieux outsider à la victoire finale.
Arnaud Boissières abonde également dans ce sens et porte l’analyse un poil plus loin. "En fait, je pense que l’absence de relation sexuelle entre dans un cadre plus général qui englobe toutes ces petites choses du quotidien que nous apprécions et qui vont inévitablement nous manquer. Il y a 4 ans, avant mon départ pour le Vendée Globe, ma sœur m’avait donné mon cadeau de Noël : c’était un petit pot de Nutella. Lorsque je l’ai mangé le 25 décembre, j’étais le plus heureux des hommes".
Et Bernard Stamm de conclure de façon très "terre à terre". "De toute manière, on est préparé à ça, cela fait partie du métier. Quand on se lance dans ce genre de course, on recherche tous cette solitude et ce besoin de ne faire qu’un avec son bateau au milieu des océans".
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EN IMAGES : Les skippers du Vendée Globe 2012-2013