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Michel Hazanavicius : "le succès de The Artist m’a donné le choix"

Michel Hazanavicius, réalisateur de "The Search", au 67è Festival de Cannes Michel Hazanavicius, réalisateur de "The Search", au 67è Festival de Cannes. [ALBERTO PIZZOLI/AFP]

Après avoir présenté « The Artist » en 2011 avec lequel Jean Dujardin avait remporté le prix d’interprétation masculine, Michel Hazanavicius est de retour en compétition à Cannes avec « The Search », un film qui raconte le destin croisé de quatre individus au cœur de l’enfer de la seconde guerre en Tchétchénie. Un changement radical de registre pour le réalisateur français qui a confié avoir pu réaliser ce long métrage dur et émouvant grâce, notamment, au succès de son film précédent.

 

Quelques sifflements se sont fait entendre lors de la première projection du film à Cannes. A votre avis, qu’est-ce qui a pu, dans le film, susciter le désaccord de certains festivaliers ?

Quelqu’un m’a dit que des Russes avaient sifflé. Je pense qu’ils n’ont pas dû siffler en tant que festivaliers, mais en tant que Russes. Je pense qu’ils se sont trompés sur le film. Le film n’est pas du tout anti-Russe. Si ce sont des médias officiels russes... Eh bien qu’ils sifflent. Je m’en fiche complètement. Il existe une opposition en Russie. Il y a des gens honnêtes sur l’état de leur pays. Si ce sont des gens qui ont sifflé pour des raisons de cinéma, ce n’est pas à moi de répondre. Si ce sont pour des raisons éditoriales, j’assume très bien. Je n’ai pas de problème à me faire conspuer par l’armée russe.

 

Votre envie première était de faire un film de guerre ou un film sur le conflit tchétchène ?

Ce n’est pas une envie de cinéma, de faire un film de guerre. J’ai coécrit et coproduit un documentaire sur le Rwanda dont Raphaël Glucksmann était l’un des réalisateurs. J’ai été amené à rencontrer André Glucksmann et j’ai donc été sensibilisé à ce qui s’est passé en Tchétchénie. Il l’est un des rares intellectuels à avoir essayé d’alerter les gens sur ce qui se passait là-bas.

Le Rwanda et la Tchétchénie sont deux conflits auxquels je me suis plus intéressé que les autres. Il y a quelque chose de dramatique. Des conflits qui mériteraient notre compassion, il y en a plein, beaucoup trop ! Ca passe si vite dans les médias. C’est dingue. On est même en train d’oublier la Syrie ! Mais c’est comme ça que l’information fonctionne.

A mon sens, la Tchétchénie cristallise beaucoup de problématiques des guerres modernes : l’indifférence des pays occidentaux, la violence hallucinante de la guerre, le rôle des civils, le rôle des militaires, le rôle de l’information occultée… La politique de la Russie dans le nord-Caucase n’est pas complètement terminée.

 

L’écho de votre film avec le conflit ukrainien peut-il peser dans la balance pour obtenir la Palme d’or ?

 Je ne sais pas. Parce que Cannes est quand même un festival de cinéma. Et puis ça se saurait si on avait un mode de fonctionnement des jurys. Nanni Moretti n’a rien à voir avec Spielberg dans l’attribution des prix. Les goûts des réalisateurs quand  ils sont spectateurs sont souvent très différents de ce qu’ils font comme cinéma. Parce qu’on aime des choses qu’on ne comprend pas. J’adore certains films que je serai incapable de faire. Et je serai peut-être bêtement plus critique sur des films que je serai susceptible de faire.  

 

Quel film auriez-vous fait si "The Artist" ne vous avait pas donné les moyens de faire "The Search" ?

Si "The Artist" n’avait pas fonctionné, j’aurais vraiment eu très peu de moyens et je me serais rapproché de l’épicentre du marché parce que je n’aurais pas eu le choix. Le succès de "The Artist" m’a donné le choix. Alors j’ai essayé d’être à la périphérie du marché, c’est-à-dire faire des films qu’un autre réalisateur, pour plein de raisons, n’aurait pas pu faire.

J’aime bien être à cette place-là. Mais il n’y a pas de stratégie, je fonctionne à l’envie. Je pense que je n’aurais pas été le même surtout. Je ne me serais pas octroyé la confiance de dire je vais traiter du conflit tchétchène.

J’aurais peut-être fait une comédie. Sûrement même. D’ailleurs mon prochain film sera une comédie. J’adore les comédies. Ce sera un film avec Zach Galifianakis, produit par Will Ferrell et par Paramount dont le titre est "Will". C’est une comédie fantastique dans la veine du " Ciel peut t’attendre", ou "Un jour sans fin". Le scénario est brillant et a été écrit par Demetri Martin.

 

Vous ménagez de courts moments de comédies dans le film.

J’aimais bien l’idée que l’humanité reprenne ses droits même dans ces moments-là. Quand on est humain, dans une situation de crise comme la guerre, on ne reste pas effaré 24 heures sur 24. La scène des femmes qui se font bombarder, et qui commencent à rigoler entre elles, est réellement arrivée. Elle est dans un documentaire de Florent Marcie qui m’a autorisé à l’emprunter.

Le côté bombardement de Londres dans une cave autour d’un filet de lumière est un cliché cinématographique. Je pense profondément, qu’à un moment donné, on a besoin de vivre.

The Search, de Michel Hazanavicius, avec Bérénice Bejo, Annette Benning et Abdul-Khalim Mamatsuiev. En compétition. En salles le 26 novembre.

 

La bande-annonce de "The Search" :

 

 

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