Décédé dimanche à l'âge de 81 ans, l'académicien Jean-Loup Dabadie, parolier de centaines de chansons et scénariste de films cultes des années 60-80, est salué unanimement comme un enchanteur, bienveillant, drôle et subtil, de la culture française des Trente Glorieuses.
Cet homme éclectique, entré à l'Académie française en 2009, qui aura exercé pendant plus de quarante ans ses talents dans la littérature, le journalisme, le cinéma et la chanson, est mort dimanche à la Pitié-Salpêtrière, d'une maladie autre que le Covid-19, a annoncé à l'AFP son agent Bertrand de Labbey. Douze jours après l'acteur Michel Piccoli, qui avait si bien servi ses «Choses de la vie».
Cheveux blancs soigneusement ordonnés, sourire éclatant, Dabadie promenait depuis les années 1960 sa silhouette de dandy dans le paysage culturel français.
«C'était un artiste complet, il avait réussi dans tous les arts : le sketch avec Guy Bedos, la chanson avec Polnareff et Julien Clerc, et le cinéma en tant que scénariste et adaptateur», a rappelé M. de Labbey.
La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) voit en lui un «insatiable amoureux de la langue». Il avait «les mots pour le dire, et le faire dire. Toute sa vie, Jean-Loup a ciselé strophes et vers, dialogues et répliques, humour et drame, prose et poésie».
Les mots pour le dire, et le faire dire. Toute sa vie, Jean-Loup a ciselé strophes & vers, dialogues & répliques, humour & drame, prose & poésie. Rien n'a échappé à cet insatiable amoureux de la langue , auteur prolixe. Ajd, nous sommes tristes. https://t.co/4yGM7o9zyl
— Sacem (@sacem) May 24, 2020
«La France perd un auteur aux mille talents, inclassable et populaire. Les mots de Jean-Loup Dabadie exprimaient avec évidence et justesse nos sentiments jusqu’à accompagner chaque moment de nos vies», a twitté le ministre de la Culture Franck Riester.
La France perd un auteur aux mille talents, inclassable et populaire. Les mots de Jean-Loup Dabadie exprimaient avec évidence et justesse nos sentiments jusqu’à accompagner chaque moment de nos vies. Nous retiendrons son sourire et son élégante discrétion. Je pense à sa famille. pic.twitter.com/gdpB45hSzd
— Franck Riester (@franckriester) May 24, 2020
Son prédécesseur, l'ancien ministre de François Mitterrand, Jack Lang, voit en cet «écrivain, parolier, journaliste, scénariste, dialoguiste» un «alchimiste des mots qui dansent», «transformant les paroles en mélodies».
Quelle grande tristesse d’apprendre la disparition de Jean-Loup Dabadie. Ecrivain, parolier, journaliste, scénariste, dialoguiste, tel un alchimiste des mots qui dansent, il transformait les paroles en mélodies : https://t.co/lligCAuBUe
— Jack Lang (@jack_lang) May 24, 2020
«On ira tous au paradis, surtout lui», a souligné le chancelier de l'Institut de France, l'ancien ministre Xavier Darcos, reprenant le refrain de sa chanson la plus célèbre qu'il avait composée pour Michel Polnareff.
«César et Rosalie», «Tous les bateaux, tous les oiseaux» «Les choses de la vie», «Ma préférence» sont autant de films ou de chansons dont il était auteur du scénario ou des paroles, parmi son vaste répertoire.
«Nos souvenirs sont pétris de ses phrases. Avec lui, nous fredonnons la sagesse humaine», a ajouté M. Darcos, qui raconte l'avoir rencontré la dernière fois dans la cour de l'Institut: «il m'a dit: chaque jeudi, en venant ici, je prends le temps de remercier le Ciel pour la vie qui est la mienne», a-t-il confié à l'AFP.
«Son étoile au paradis»
Pour Mireille Mathieu, c'est un «fabuleux auteur, scénariste, grande plume de la variété française» qui «mérite son étoile au Paradis, lui qui a écrit les plus belles pages des choses de la vie».
«Quelques jours après Michel Piccoli, un autre complice de Claude Sautet s’en va», note Patrick Bruel, en le remerciant pour «ces répliques qui ont si souvent guidé nos vies».
Au revoir Jean-Loup... Quelques jours après Michel Piccoli, un autre complice de Claude Sautet s’en va. Merci Jean-Loup Dabadie pour ces chansons et ces répliques qui ont si souvent guidé nos vies... pic.twitter.com/YmWAkPDRi9
— Patrick Bruel (@PatrickBruel) May 24, 2020
Gilles Jacob, ancien président du Festival de Cannes, a souligné la place occupée dans une période fructueuse du cinéma français par le couple Sautet-Dabadie: «Dabadie a comblé le public du cinéma français des années 70/80: les femmes (Romy), les mecs, les bistrots, les bagnoles, les week-ends. Jean-Loup adoucissait le pessimisme de Claude par un moelleux d'écriture et le charme délicieux d'un homme doué pour le bonheur».
Le couple Sautet-Dabadie a comblé le public du cinéma français des années 70/80 les femmes (Romy), les mecs, les bistrots, les bagnoles, les week-ends. Jean-Loup adoucissait le pessimisme de Claude par un moelleux d'écriture et le charme délicieux d'un homme doué pour le bonheur
— gilles jacob (@jajacobbi) May 24, 2020
«Tant de talent à dire les émotions vraies...», a salué Pierre Lescure, l'actuel président du Festival, soulignant lui aussi son rôle très spécial dans le Septième Art.
Triste , vraiment ...
Tant de textes , de dialogues , de chansons ...toutes nos vie ...
Tant de talent à dire les émotions vraies ...
Et tellement d’amitié et d’affection .
A toi, plein de pensées émues , Véronique... pic.twitter.com/9dLDC505cT— Pierre Lescure (@pierrelescure) May 24, 2020
Dabadie avait notamment signé le scénario de films de Sautet dont «César et Rosalie» et «Les choses de la vie».
L'écrivain Philippe Labro, a également rendu hommage à son «son plus vieil ami», ce dimanche après-midi. «Les Français perdent le plus brillant, multi-talentueux, subtil orfèvre du mot, chansons pour l'éternité, scénarios et dialogues éblouissants. Tout ça avec sourire et élégance», a-t-il tweeté.
Jean Loup Dabadie / les françaisperdent le plus brillant,multi talentueux,subtil orfèvre du mot/chansons pour l'éternité/scénarios et dialogues éblouissants /tout ça avec sourire et https://t.co/FmlmJpxJae perds mon plus vieil ami .( Au lycée à 15ans.)
— Philippe Labro (@philippelabro) May 24, 2020
Ses derniers succès au cinéma remontaient au début des années 1980. Jean-Loup Dabadie sembla ensuite moins en phase avec son époque.