La Comédie Française est attaquée en justice par l'universitaire Georges Forestier. Le spécialiste de Molière demande des droits d’auteur à l’Institution pour sa version de «Tartuffe ou l’hypocrite», pièce à laquelle il a redonné sa forme originelle, et jouée la saison dernière par le Français à l’occasion des 400 ans de la naissance du dramaturge.
Une affaire étonnante. Alors que la Comédie Française a présenté, de janvier à avril dernier, une version inédite du «Tartuffe» de Molière, également retransmise dans les cinémas Pathé, la pièce cristallise les tensions. Elle est au centre d'une action en justice intentée par Georges Forestier, révélée par la cellule investigation de Radio France et confirmée par l'AFP. En cause, l'universitaire estime que la maison de Molière a violé ses «droits d'auteur». Une plainte qui vise également les cinémas Pathé.
En effet, le professeur de littérature, expert de Molière, revendique être «l'auteur-adaptateur» de cette reconstitution de «Tartuffe», à qui il a redonné sa forme originelle en trois actes, alors que cette version anticléricale avait été censurée et interdite en 1664 par le roi au lendemain sa première puis définitivement perdue, laissant à la postérité la pièce en cinq actes de Molière largement édulcorée, baptisée «Tartuffe ou l'imposteur».
La version de Georges Forestier avait été publiée en 2021 aux éditions Portaparole. Le spécialiste de Molière y avait notamment coupé deux actes pour que le texte retrouve son ton subversif, fait disparaître deux personnages et réécrit les derniers vers, précise nos confrères de Radio France.
Un casse tête chinois
Problème, la Comédie Française a donné cette pièce, avec l'accord de Georges Forestier, mais sans lui verser de droits d'auteur. Un statut que l'Institution ne lui reconnaît pas, comme l'a expliqué l'avocat du Français, cité par Radio France, considérant que Georges Forestier a «restitué en tant qu'universitaire le texte originel de Molière».
Un argument qui ne tient pas la route selon l'avocat de l'universitaire, maître Carminati. «Tous les juristes le diront : à partir du moment où l'on arrange, où l'on remonte une œuvre du domaine public, c'est une œuvre originale. Pour le livre, il y a bien un contrat d'édition qui en atteste», a expliqué ce dernier à l'AFP.
Une affaire désormais portée devant les tribunaux, qui va devoir également statuer sur un échange de mails, dans lequel M. Forestier précise mettre son adaptation «gracieusement» à disposition de la Comédie Française.
De son côté, la pièce, mise en scène par Ivo Van Hove, doit reprendre du service de janvier à mars prochains, salle Richelieu.