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Pourquoi les clowns nous font-ils peur ?

La présence d’un clown n’est pas toujours synonyme de rires chez certains.[RHONA WISE / AFP]

Pennywise, le Joker… Les clowns ne sont pas toujours là pour nous faire rigoler. Pour beaucoup d’enfants, et même certains adultes, ils sont surtout la source d’une grande frayeur. Un mot, la coulrophobie, désigne d’ailleurs la phobie de ces personnages. Mais pourquoi avons-nous peur d'eux ?

Son nez rouge, sa peau d’albâtre, ses yeux et sa bouche maquillés, sa coiffure improbable. Il est vrai que décrit comme cela, le clown n’a à première vue rien d’attirant. Et son côté gaffeur, son rôle d’amuseur, ne suffisent pas à faire sourire tout le monde. Il n’y a qu’à voir les cris et les pleurs qui accompagnent ses mouvements lorsque l'un d'eux s’approchent parfois trop près d’un enfant, au cirque ou dans la rue. Et ces réactions peuvent devenir encore plus vives, voire incontrôlées, en présence d’une personne phobique.

un sourire inhumain

La première raison de cette peur, qu’elle soit enfantine ou viscérale, provient du maquillage du personnage. «Quand on ne parvient pas à décoder le visage d’une personne, on la perçoit comme menaçante», explique le psychiatre Antoine Pelissolo dans Libération. Cela vaut d’autant plus pour les enfants, qui se rendent compte que quelqu’un se trouve derrière le maquillage, mais sans savoir qui.

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Il arrive très souvent que le clown se grime en plus de façon outrancière. Son sourire, par exemple, à l’image du Joker, peut devenir immense, et faire disparaitre par la même occasion la vraie bouche de la personne déguisée. «Or, la première source de réassurance à cet âge est le visage des parents, avec un regard et une bouche animés par des émotions. Ce sourire qui n’en est pas un peut provoquer une grande peur», souligne Le rire médecin, qui envoie des clowns dans les services pédiatriques des hôpitaux pour amuser les petits patients. L’association indique d’ailleurs sur son site que ses comédiens font exprès d’atténuer leur maquillage pour éviter ce traumatisme.

la pop culture entretient son image effrayante

Concernant les adultes toujours atteints de cette peur des clowns, celle-ci peut s’expliquer par un événement du passé ayant marqué leur mémoire, de façon consciente ou non. Il est d’autant plus compliquée de s’en débarrasser que le personnage du clown maléfique est désormais bien ancré dans notre culture. En témoigne, comme on l’a dit plus haut, le personnage du Joker de Batman, mais aussi et surtout, celui de Pennywise (ou Grippe-Sou) du roman Ça, de Stephen King, adapté plusieurs fois en films.

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Or, avec ses crocs, ses rugissements et sa capacité à se transformer en araignée (dans le livre), le personnage de King est très animalisé. «Il devient un monstre dévorant et rejoint le bestiaire mythologique aux côtés du dragon, du loup ou du serpent», analyse Frédéric Vincent, psychanalyste et sociologue, sur Psychologies Magazine. «Ces monstres ont pour fonction de cristalliser nos angoisses face au temps qui passe inexorablement ou à la mort».

une angoisse bien de notre époque

L’une des autres particularités de Pennywise est son aspect très contemporain. Selon Frédéric Vincent, il possède un aspect «protéiforme». «Il n’est pas figé dans son rôle sombre. Il emprunte parfois au clown comique pour mieux nous berner. De même, la symbolique du déguisement fait écho à notre monde actuel où l’on joue beaucoup sur les apparences, entre ce que l’on est en vrai, sur les réseaux, au travail… Le clown a cette capacité de se déguiser pour nous duper».

Voici comment expliquer pourquoi la méfiance et la crainte des clowns perdure chez certains adultes. Pourtant, l’étape ultime étape de cette peur, la coulrophobie, ne peut être déclenchée par un film, une série ou un roman, tempère Antoine Pelissolo. En revanche «cela peut participer au maintien de la peur dans le temps», explique-t-il.

Une peur qui s'entretient aussi par des faits divers. En 2014, un homme qui se déguisait ainsi avait été condamné dans le Pas-de-Calais pour avoir menacé des adolescents. Aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, tout seul ou en bande, d'autres «creepy clowns» ont vu leurs méfaits être relayés dans la presse. Sans parler des réseaux sociaux, qui ne manquent jamais de diffuser des photos (sans qu'elles soient authentifiées) de ces terreurs nocturnes.

De quoi déclencher des sueurs froides à certains d’entre nous, qui s'imaginent un jour se retrouver nez à nez avec un clown maléfique, au détour d’une ruelle sombre…

[Crédit photos : AFP et Warner]

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