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Bassin Rhône-Méditerranée : trop de pesticides

La rivière du Tech près de Perpignan, en août 2012 [Raymond Roig / AFP/Archives] La rivière du Tech près de Perpignan, en août 2012 [Raymond Roig / AFP/Archives]

Forte pollution aux pesticides, avec 40% des cours d'eau et 20% des nappes phréatiques touchés, et la moitié des rivières malmenées, notamment par un trop grand nombre de digues: tel est le bilan 2011 dressé mercredi par l'Agence de l'eau du bassin Rhône-Méditerranée.

"L'ennemi N.1 de la qualité des eaux, ce sont les pesticides et nos relevés montrent que leur utilisation stagne", a affirmé Martin Guespereau, le directeur général de l'Agence, lors de la présentation du rapport 2011.

Et ce malgré le Grenelle de l'Environnement qui a éliminé 53 molécules jugées trop toxiques ou trop persistantes, rappelle le dirigeant.

L'utilisation de pesticides a même augmenté en 2011 de 2,5% au plan national.

"Environ 40% des rivières sont imbibées de pesticides, essentiellement des herbicides, dont on voit bien que leur durée de vie excède largement celle passée dans les champs", a poursuivi M. Guespereau.

"Le premier d'entre eux est le glyphosate, commercialisé sous le nom de Roundup, et on ne constate pas d'évolution à la baisse de ce polluant", a-t-il regretté.

Quelque 4.000 tonnes de ce pesticide sont commercialisées annuellement dans les bassins Rhône-Méditerranée et Corse.

Dans les pesticides retrouvés, certains sont interdits, justement parce que trop persistants. Mais à quelques endroits, "une utilisation actuelle de ces pesticides interdits n'est pas exclue car les concentrations de la molécule mère ne baissent pas", relève le responsable.

A ce sujet, deux territoires sont très suspects aux yeux de l'Agence: certaines parties du Beaujolais et du Roussillon.

"Notre système d'investigation est aujourd'hui beaucoup plus sophistiqué", souligne le responsable de l'Agence, ce qui permet aussi de plus en plus de tracer l'origine des pollutions.

Trois millions de données des années 2009-2010-2011 ont été passées au crible pour ce nouvel état des lieux.

"Drogués aux digues"

Conséquence de la pollution, agricole mais aussi industrielle ou domestique: 38 nappes phréatiques du bassin hydrographique et 49 captages "dépassent la norme de potabilité et nécessitent un traitement lourd pour rendre l'eau potable", indique le rapport.

Ces traitements supplémentaires ont un coût, évalué en 2011 par le ministère de l'Ecologie, entre 300 et 450 millions d'euros. En ajoutant le surcoût lié aux nitrates, l'addition totale s'élève entre 400 et 700 millions d'euros.

Heureusement, dans le bassin Rhône-Méditerranée, la pollution aux nitrates est limitée à quelques rivières du Lauragais et le Beaujolais.

Autres points positifs: des progrès réguliers sur les phosphates, désormais totalement interdits, et sur les pollutions organiques grâce à la mise aux normes progressive des stations d'épuration.

Si l'amélioration des nappes est un travail de longue haleine, des actions ciblées sur des cours d'eau peuvent être immédiatement efficaces: nouvelle station d'épuration, bras de rivière réalimenté, méandres d'un cours d'eau rétablis, etc.

"De façon assez surprenante, la faune revient parfois rapidement", note Martin Guespereau.

En plus des pesticides, l'autre point noir du tableau dans ce bassin hydrographique est le fonctionnement des rivières: 60% d'entre elles sont "déformées" (contre 20% en Corse) et la moitié seulement classée en bon état écologique.

En cause: des prélèvements trop élevés, des barrages altérant la circulation des poissons et des sédiments, la trop grande présence de digues.

Des rivières trop "cloisonnées" voient dépérir la faune et la flore et peuvent accentuer des phénomènes comme les crues, le blocage de sédiments, l'érosion des berges et des piliers de ponts.

"Nous sommes drogués aux digues dans ce pays", avance le directeur général de l'Agence de l'eau. Tout en notant "localement, un appétit pour retrouver une vie des rivières plus riche".

L'application pour smartphones "Qualité des rivières", qui sera disponible à partir de juin 2013, permettra de satisfaire une certaine curiosité et de connaître la qualité de chaque cours d'eau: la moitié seulement sont en "bon ou très bon état écologique".

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