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40 ans de travaux à prévoir pour Fukushima

Des journalistes et des employés de Tokyo Electric Power sur le site de la centrale nucléaire de Fukushima, le 12 juin 2013 [Noboru Hashimoto / POOL/AFP/Archives] Des journalistes et des employés de Tokyo Electric Power sur le site de la centrale nucléaire de Fukushima, le 12 juin 2013 [Noboru Hashimoto / POOL/AFP/Archives]

L'accident de Fukushima a beau être un drame dont se sentent responsables les Japonais, la sagesse voudrait qu'ils acceptent davantage l'aide des étrangers pour étendre la palette des technologies disponibles et éviter de redévelopper des solutions qui existent peut-être déjà, estiment des experts en poste à Tokyo.

"S'il y a un domaine dans lequel cela n'avance guère, c'est celui du rôle des étrangers dans le démantèlement de la centrale Fukushima-Daiichi" ravagée par le séisme et le tsunami 11 mars 2011, confie un diplomate occidental.

A l'heure actuelle, sans doute pour des raisons essentiellement matérielles, "rien n'est fait pour favoriser la coopération avec l'extérieur. Tous les appels d’offres sont en japonais et il n'y a pas d'amélioration dans les processus de sélection", déplore un industriel français.

La compagnie gérante du complexe, Tokyo Electric Power (Tepco), semble penser que l'appui de firmes étrangères n'est pas une priorité à ce stade. C'est partiellement compréhensible au regard du mode de pensée des Japonais: Tepco et ses fournisseurs considèrent que c'est "leur" accident, c'est donc à eux d'en venir à bout, avec des entreprises qu'ils connaissent bien.

Il est vrai qu'il y a déjà beaucoup de compétences techniques au Japon et qu'il n'est pas forcément nécessaire d'aller chercher ailleurs juste pour faire plaisir aux étrangers.

Ces derniers n'ont d'ailleurs nullement envie de se battre pour aller colmater des fuites d'eau radioactive ou boucher des trous de souris.

Des travailleurs s'activent lors d'une opération de décontamination, à Naraha dans la province de Fukushima, le 13 juin 2013 [Toshifumi Kitamura / AFP/Archives]
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Des travailleurs s'activent lors d'une opération de décontamination, à Naraha dans la province de Fukushima, le 13 juin 2013
 

Mais le chantier s'annonce titanesque pour assainir le site atomique sinistré, et ce que veulent des firmes françaises, américaines ou britanniques, c'est aider les Japonais sur les aspects les plus difficiles, ceux qui requièrent des moyens nouveaux, dont les préparatifs et techniques d'extraction du combustible fondu au coeur de trois des six réacteurs de cette centrale du nord-est, une intervention qui devrait débuter vers 2020 si tout va bien.

Frustration des Occidentaux

Selon le diplomate, pour contourner les obstacles qui relèvent plus des habitudes de travailler entre Nippons que du rejet systématique de l'étranger ou d'une quelconque volonté de masquer la réalité, la meilleure approche est celle du partenariat avec une société japonaise. C'est le procédé qu'a par exemple privilégié le français Areva. Il s'agit alors d'accompagner une firme locale dans l'utilisation d'une technologie d'origine extérieure.

"Peu de sociétés étrangères ont la capacité de déployer à Fukushima suffisamment de moyens pour entreprendre seules les tâches majeures, donc le partenariat est la solution la plus bénéfique pour tous", souligne le même interlocuteur selon qui "une présence internationale à Fukushima serait en outre de nature à rassurer le monde inquiet".

Français, Britanniques et Américains partagent la même frustration, et le disent d'ailleurs régulièrement au gouvernement japonais.

"Nous allons continuer de faire pression", car il serait dommage que, pour des questions d'orgueil, "les Japonais tentent de réinventer ce qui existe déjà ailleurs", qui plus est avec l'argent du contribuable, puisque c'est en premier lieu le pays qui va payer le démantèlement.

Il serait par exemple déplorable que, sous prétexte que le Japon se considère comme l'empire des robots, il refuse des quadrupèdes américains ou d'autres engins étrangers aux capacités visiblement bien supérieures à celles de prototypes japonais de première génération, même si ces derniers se targuaient d'être "précisément pensés pour intervenir à Fukushima".

Un panneau annonce une opération de décontamination en cours, sur une route de Naraha dans la province de Fukushima, le 13 juin 2013 [Toshifumi Kitamura / AFP/Archives]
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Un panneau annonce une opération de décontamination en cours, sur une route de Naraha dans la province de Fukushima, le 13 juin 2013
 

De même pourrait-on regretter que des étrangers soient écartés en dépit de leurs compétences au motif inavoué qu'il est matériellement de travailler entre Nippons que de collaborer avec des étrangers.

Sur ce volet, c'est au gouvernement de veiller. Une structure de recherche et développement est censée regrouper des entreprises et instituts susceptibles d'apporter une contribution technique afin de développer les procédés d'intervention à Fukushima, dans les phases de repérage, déblayage, interventions sur des équipements, etc.

Mais prévenait récemment un éditorial du journal économique Nikkei, bible des milieux d'affaires: "ce ne doit pas être une structure japono-japonaise, elle doit rassembler les entreprises nippones et occidentales qui ont l'expérience du démantèlement de réacteurs ou d'autres compétences".

Et le même d'ajouter: "la R&D qui doit être conduite pour le démantèlement des réacteurs ne doit pas être de la recherche pour de la recherche. Les entreprises impliquées doivent agir avec le sens d'une mission à accomplir".

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