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Cimenterie Lafarge saccagée près de Marseille : tout savoir sur cette action menée par des activistes écologistes

Une cimenterie du groupe Lafarge située à Bouc-Bel-Air, non loin de Marseille (Bouches-du-Rhône), a été la cible, samedi 10 décembre, de plusieurs dizaines d'activistes écologistes. De nombreux dégâts ont été constatés au sein de l'usine, qui a d'ores et déjà porté plainte. Voici ce que l'on sait sur cette action.

Lafarge, entreprise leader en France dans le secteur du ciment et propriétaire de 300 centrales à béton, a été visée samedi par une action menée par des militants écologistes. Près de 200 personnes ont pénétré sur le site de Bouc-Bel-Air, situé à une vingtaine de kilomètres de Marseille (Bouches-du-Rhône) et ont causé d'importants dégâts. Une action qualifiée par le cimentier d'«acte criminel».

Et cette nouvelle action environnementale n'est pas passée inaperçue sur les réseaux sociaux. Relayée sur différents comptes Twitter, une vidéo montre plusieurs dizaines de personnes vêtues de combinaisons blanches à capuche marcher sur un sentier.

Sur d’autres plans, des militants vêtus des mêmes combinaisons s’en prennent à une caméra de surveillance à coups de marteau et à un tuyau à coups de hachette. De même, un graffiti où il est écrit «C’est qui les dindons de la Farge ?» est également inscrit sur un mur.

UNE ACTION CONTRE LE «CIMENTIER-POLLUEUR»

Un texte anonyme accompagnait cette vidéo et revendiquait l’action contre le «cimentier-pollueur», en précisant que celle-ci a été menée par «200 personnes (qui) ont envahi et désarmé par surprise l’usine Lafarge de la Malle à Bouc-Bel-Air». Contactés par l’AFP, les militants écologistes auteurs de cette intrusion ont reconnu cette action, sans la revendiquer au nom d’un groupe ou d’un mouvement précis.

Dans un communiqué, les activistes ont expliqué leur geste en dénonçant la «pollution atmosphérique» générée par l’usine Lafarge. «Les fours qui ont été ciblés, longtemps alimentés par des déchets industriels et des pneus, sont aujourd’hui le symbole du greenwashing (une méthode de marketing consistant à communiquer auprès du public en utilisant l'argument écologique, NDLR). La pollution atmosphérique est considérable et a été maintes fois dénoncée [...] Pour autant, les cheminées crachent toujours leur venin», ont-ils écrit. Ajoutant que «Lafarge et ses complices n’entendent rien à la colère des générations qu’ils laissent sans avenir dans un monde ravagé par leurs méfaits. Leurs engins, silos et malaxeuses sont des armes qui nous tuent. Ils ne cesseront pas sans qu’on ne les y force. Nous allons donc continuer à démanteler ces infrastructures du désastre nous-même».

Une plainte déposée par Lafarge

L'entreprise a d'ores et déjà porté plainte, a déclaré Loïc Leuliette, directeur de la communication de Lafarge France. Ce dernier a dénoncé «une action d'une violence incroyable» qui a causé «d'importants dégâts». Le parquet d'Aix-en-Provence a également précisé s'être saisi de ce dossier et a annoncé avoir ouvert une enquête en flagrance, qui a été confiée à la gendarmerie.

Ce n'est pas la première fois que le groupe Lafarge est visée par des actions militantes. Des sites du cimentier avaient déjà été la cible d'occupations ou de blocages par des activistes dans le passé, notamment Extinction Rebellion en juin 2021.

le site de Bouc-Bel-Air à l'arrêt

Au lendemain de l'action, l'usine était à l'arrêt en raison des nombreux dégâts. D'après le porte-parole Loïc Leuliette, le groupe Lafarge «met tout en oeuvre pour redémarrer le plus rapidement possible» le site qui emploie au total 200 personnes. 

Dans un communiqué, François Petry, directeur général du cimentier, a assuré être à la tête aujourd'hui «d’une usine à la pointe dans le pays dans le domaine des matériaux décarbonés». Ajoutant qu'«au-delà de notre usine, c’est la démarche de progrès de toute l’industrie qui est fragilisée par ces actions». Le groupe a également indiqué avoir fait des «investissements conséquents pour sa décarbonation et celle de sa production» ces derniers mois. Et plus particulièrement, l'usine Lafarge de la Malle à Bouc-Bel-Air qui est «la plus en avance sur la décarbonation, après des investissements de plusieurs millions d'euros», a détaillé Loïc Leuliette.

Sur Twitter, le ministre délégué à l’industrie, Roland Lescure, a rappelé que l’usine de La Malle faisait partie des «cinquante sites prioritaires à décarboner», dont les patrons ont été reçus en novembre par Emmanuel Macron pour leur proposer un «pacte de décarbonation». De son côté le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu a déclaré : «Je condamne toujours ceux qui, au nom de l’écologie, font de la violence la seule expression de leur lutte ».

Le bâtiment, un des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre

Un point de vue contesté par les militants écologistes présents sur place, que l'AFP a pu joindre. Selon l'un des militants, «la violence vient avant tout de ces entreprises qui investissent des milliards pour continuer à produire en polluant. On considère qu'il n'y a plus le choix, c'est la seule réponse possible aujourd'hui pour se faire entendre».

D'ailleurs, l'usine Lafarge de Bouc-Bel-Air a été plusieurs fois pointée du doigt par les militants écologistes et les habitants vivant autour de la cimenterie, car elle avait dépassé à plusieurs reprises les normes en matière d’oxydes de soufre (SO2) fixées par l’Union européenne. Dans une enquête publiée par Reporterre, la cimenterie est autorisée par dérogation préfectorale «à émettre en moyenne quotidienne 900 milligrammes par mètre cube (mg/m3) d’oxydes de soufre, soit plus du double des recommandations européennes, fixées à 400 mg/m3». L'entreprise avait alors justifié que «le respect du niveau des émissions […] entraînerait une hausse des coûts disproportionnés au regard des bénéfices pour l’environnement».

Depuis, l'entreprise a été mise en demeure par la préfecture des Bouches-du-Rhône, la poussant ainsi à réduire l’utilisation d’argiles soufrées pour fabriquer le ciment, ou encore à investir dans la mise en place d’un filtre à manche à la sortie d’un four afin de réduire les poussières émises à la sortie des cheminées.

Il faut toutefois noter que le secteur du bâtiment, au sens large, est l'un des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, responsables du réchauffement climatique. En France, il représente 20 % de ces émissions, contre près de 30 % pour les transports.

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