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Que reproche-t-on au juge Courroye ?

Philippe Courroye Philippe Courroye, procureur de Nanterre.[FRED DUFOUR / AFP]

Le sort de Philippe Courroye, procureur de la République de Nanterre, sera examiné par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) le 31 juillet. La chancellerie proposera de le nommer avocat général de la Cour d'appel de Paris. Ce que l'intéressé refuse en dénonçant un lynchage. Mais que lui que reproche-t-on au juste ?

A propos de la mutation du juge Courroye, il y a la version officieuse et la version officielle. Pour la version officielle, voici d'après Philippe Courroye, les trois arguments qu'aurait avancés Christian Vigouroux, le directeur de cabinet du Garde des Sceaux, pour la justifier. 

Il y a d'abord la plainte pénale déposée contre le procureur par Le Monde dans l'affaire dite des "fadettes". Pour mémoire, il s'agit des relevés détaillés des factures téléphoniques de deux journalistes du quotidien que le parquet s'était procuré, alors qu'une loi protège le secret des sources des journalistes.

Autre argument opposé au juge Courroye, la saisine de la formation disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) à la demande du Monde pour les mêmes faits.

Plus sordide enfin, le directeur de cabinet du Garde des Sceaux aurait aussi prétexté auprès de Philippe Courroye le suicide d'un substitut du parquet de Nanterre en mars dernier.

La version officieuse

Pour la version officieuse, ce sont ces décisions en tant que procureur ces cinq dernières années qui lui attirent la critique. Nommé à Nanterre en mars 2007, son ressort s'étend à Neuilly-sur-Seine, la ville de Nicolas Sarkozy. C'est lui qui va classer sans suite une enquête préliminaire sur les conditions d'achat de son duplex à Neuilly, fin 2007. Une première salve de la gauche dénonce la collusion entre l'Elysée et la justice. D'autant plus qu'en 2009… le juge Courroye est fait officier de l'Ordre national du mérite… par Nicolas Sarkozy.

Mais c'est l'affaire Woerth-Bettencourt qui éclate en juin 2010 et dans laquelle le nom de Nicolas Sarkozy est cité que la gauche en fait sa bête noire. Il mène six enquêtes de front dans cette affaire dans laquelle est évoquée le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Le PS dénonce alors la capacité du procureur à ralentir le cours de la justice. "Depuis quatre ans, mon nom est accolé dans la presse à celui de Nicolas Sarkozy : on a sciemment voulu donner une coloration politique à mon action et à ma personne", accuse-t-il aujourd'hui. 

Pour ne rien arranger, Philippe Courroye est aussi en conflit ouvert avec d'autres magistrats à Nanterre, à commencer par Isabelle Prévost-Desprez, la juge d'instruction en charge de l'affaire Bettencourt. Elle en sera finalement dessaisie, non sans avoir témoigné dans un ouvrage de la violence de ses relations avec Philippe Courroye.

Voilà aujourd'hui le cocktail qui désigne Philippe Courroye à la mutation alors que son mandat court normalement jusqu'en 2014.  "Je peux comprendre que le nouveau pouvoir veuille récupérer le parquet de Nanterre, mais il y a des façons de procéder", proteste aujourd'hui le procureur. Du coup Philippe Courroye a décidé de marquer un coup médiatique en esquissant son retrait à 53 ans de la magistrature pour devenir avocat.

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