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La menace d'un procès se précise pour Squarcini

Photo prise le 17 janvier 2012 à Paris de l'ex directeur central du renseignement intérieur, Bernard Squarcini [Martin Bureau / AFP/Archives] Photo prise le 17 janvier 2012 à Paris de l'ex directeur central du renseignement intérieur, Bernard Squarcini [Martin Bureau / AFP/Archives]

La menace d'un procès se précise pour l'ex-patron du renseignement intérieur Bernard Squarcini, le parquet de Paris ayant requis mardi que ce proche de Nicolas Sarkozy soit jugé pour avoir fait analyser en 2010, en pleine affaire Bettencourt, les factures téléphoniques détaillées(fadettes) d'un reporter du Monde pour identifier sa source.

Le ministère public a estimé que l'ancien directeur central du renseignement intérieur (DCRI) devait être renvoyé en correctionnelle pour "collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite", un délit passible de cinq ans de prison et 300.000 euros d'amende, a annoncé mardi à l'AFP une source proche du dossier.

Il reviendra aux juges d'instruction de suivre ou non ces réquisitions et d'ordonner éventuellement le renvoi de M. Squarcini.

Une hypothèse probable puisque ces mêmes magistrats l'avaient mis en examen en octobre 2011.

M. Squarcini, qui a été remplacé en mai à la DCRI et est depuis sans affectation, est poursuivi pour avoir à l'été 2010 fait requérir et analyser les fadettes du reporter du Monde Gérard Davet et d'un ancien conseiller du ministère de la Justice, David Sénat, dans le but d'identifier la source du quotidien du soir.

Le Monde venait de révéler les déclarations à la police du gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, qui mettaient en difficulté Eric Woerth, alors ministre de Nicolas Sarkozy.

Le siège du journal Le Monde, à Paris [Miguel Medina / AFP]
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Le siège du journal Le Monde, à Paris
 

Dans cette affaire, qui pose la question de la protection des sources de la presse, M. Squarcini ne s'est jamais caché d'avoir fait analyser les fadettes du journaliste.

Mais il s'en était justifié en affirmant avoir agi dans un cadre totalement légal et prévu par la loi de 1991 sur le secret des correspondances, en particulier de son article 20 qui autorise leur contrôle aux "fins de défense des intérêts nationaux".

Une analyse contestée par le parquet de Paris, qui a notamment considéré que d'éventuelles fuites provenant d'un ministère sur une affaire de droit commun ne pouvaient constituer une véritable atteinte à la sécurité nationale.

Secret des source

Pour le parquet, une éventuelle violation du secret de l'enquête dans le dossier Bettencourt relevait de l'autorité judiciaire, et non des prérogatives du renseignement intérieur.

L'avocat de M. Squarcini, Me Patrick Maisonneuve, a fustigé le manque de "cohérence" de ces réquisitions et pointé "un virage à 180 degrés" du ministère public, rappelant que le parquet général de la cour d'appel de Paris avait requis en octobre l'annulation de la mise en examen de son client.

En décembre, la chambre de l'instruction avait annulé deux chefs de mise en examen de M. Squarcini, mais confirmé les poursuites le visant pour "collecte illicite de données".

Contacté par l'AFP, le parquet de Paris a indiqué avoir dans ses réquisitions "tiré les conséquences de l'arrêt définitif de la chambre de l'instruction, qui n'a pas été frappé de pourvoi, et de la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation".

Ni M. Squarcini ni le parquet général ne s'étaient pourvus contre la décision de la chambre de l'instruction.

En attendant, Me Maisonneuve a fait part de son intention demander aux juges d'instruction plusieurs auditions supplémentaires de témoins.

De son côté, l'avocat du Monde, Me François Saint-Pierre, a vu dans ces réquisitions "une très bonne nouvelle", et dit espérer la tenue d'un procès à l'automne.

Dans une autre affaire de "fadettes" et d'espionnage de journalistes du Monde, la cour d'appel de Paris a annulé en mars 2012 les mises en examen de l'ex-procureur de Nanterre Philippe Courroye et de son adjointe. La Cour de cassation examinera le 11 juin le pourvoi en cassation du Monde contre cette décision.

"Le Monde ne mène pas une querelle personnelle contre MM. Squarcini et Courroye", a déclaré Me Saint-Pierre à l'AFP. "Son seul but est d'obtenir de la justice une protection du secret des sources".

Le ministère de la Justice travaille actuellement à une réforme de la protection du secret des sources. La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a plaidé en avril pour son "renforcement".

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