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Pensions alimentaires: les impayés menacent des familles

Un mère et sa fille [Johanna Leguerre / AFP/Archives] Un mère et sa fille [Johanna Leguerre / AFP/Archives]

Marie-Laure, 45 ans, est "en colère". Depuis plus d'un an son ex-mari ne lui verse plus la pension alimentaire de 1.300 euros qu'il lui doit pour élever leurs deux enfants, une situation fréquente qui a conduit le gouvernement à imaginer un mécanisme de garantie contre les impayés.

En France, 40% des pensions alimentaires sont versées de façon irrégulière, par mauvaise volonté ou en raison de difficultés financières. Le phénomène touche particulièrement les mères, puisque quatre familles monoparentales sur cinq sont dirigées par des femmes.

Dans le cas de Marie-Laure, tout s'est bien passé pendant les premières années qui ont suivi le divorce prononcé il y a sept ans. Mais désormais, celui avec qui elle a partagé sa vie pendant huit ans "a décidé de ne plus payer". Selon elle, il "vagabonde à l'étranger" pour échapper à ses obligations.

Le projet de loi visant à combattre les inégalités persistantes entre hommes et femmes, adopté en première lecture par le Sénat dans la nuit de mardi à mercredi, propose un mécanisme de garantie contre les impayés de pensions alimentaires, qui sera expérimenté dans les Caisses d'allocations familiales d'une dizaine de départements. La CAF se substituera au parent défaillant dès le premier mois pour verser une allocation de soutien familial, puis elle se retournera contre le débiteur.

Une femme et son enfant passent devant la Caisse d'allocations familiales le 2 avril 2013 à Montpellier [Pascal Guyot / AFP/Archives]
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Une femme et son enfant passent devant la Caisse d'allocations familiales le 2 avril 2013 à Montpellier

La CAF offre déjà un service d'aide au recouvrement des impayés de pensions alimentaires et verse une allocation de soutien familial (ASF) lorsqu'un parent isolé est confronté à la défaillance d'un débiteur de pension alimentaire, pour un coût total de 1,2 milliard d'euros chaque année.

Quand la CAF se penche sur ce dossier elle "s'adresse à celles qui ont les plus faibles ressources", explique Frédéric Marinacce, directeur des politiques familiales et sociales au sein de la Caisse nationale, qui souligne qu'un tiers des mères célibataires vivent sous le seuil de pauvreté.

La pension alimentaire, un "appel d'air financier incroyable"

"La pension alimentaire est indispensable, c'est un appel d'air financier incroyable" pour les famille monoparentales, et son absence peut "faire basculer des familles sous le seuil de pauvreté", s'insurge Christine Kelly, créatrice de la fondation K d’urgences.

Les pensions alimentaires représentent en moyenne 20% du revenu des familles monoparentales, selon le ministère des Droits des femmes. Bien plus dans le cas de Marie-Laure, allocataire du RSA qui vit avec environ 700 euros par mois, sans compter l'aide spéciale allouée pour son enfant handicapé.

Pour récupérer les 20.000 euros que lui doit son ex-mari, elle est allée jusqu'à déposer plainte contre lui en janvier, "mais ça n'avance pas", désespère-t-elle. Elle souligne la "bonne situation" de son débiteur et va tenter de forcer la vente d'un appartement dont elle croit que le père de ses enfants est propriétaire, confortée par les conseils d'un huissier.

Car outre la CAF, les huissiers de justice peuvent aider les créanciers en mettant en place des saisies sur salaires, comptes bancaires, biens meubles ou immeubles. Et si le mauvais payeur est solvable, le recours est à la charge de ce dernier, donc neutre pour le demandeur.

En plus des pensions à venir, les huissiers et la CAF peuvent aujourd'hui récupérer jusqu'à six mois d’arriérés, une durée qui pourrait être allongée à deux ans avec le projet de loi pour l'égalité femmes/hommes.

Cette solution est "peu ou mal connue" regrette Patrick Safar, huissier à Melun. Le juriste témoigne de situations vécues par des "familles sclérosées dans la précarité", et dans lesquelles le "facteur passionnel" est très présent. Selon lui, certaines personnes font "tout pour ne pas payer".

Christine Kelly estime que le projet de loi pour "va dans le bon sens" mais elle demande "un deuxième pas": une campagne d'information à destination des familles monoparentales sur les recours possibles à la CAF et auprès des huissiers, et le blocage des mauvais payeurs aux frontières.

Selon elle, c'est une affaire de "volonté". "Il y a des textes de loi, il faut s'appuyer sur ces textes, on ne peut pas fermer les yeux".

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