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La semaine de Philippe Labro : la vulgarité du fils, la classe du patriarche

Décidément, à sept semaines de l’échéance, aux Etats-Unis, on verse de plus en plus souvent dans le n’importe quoi. [DEREK BLAIR / AFP]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

MARDI 20 SEPTEMBRE

Savez-vous ce que c’est qu’un «skittle» ? C’est le terme américain pour ces tout petits bonbons ronds et multicolores que l’on croque sans même y penser. Il y en avait toujours un grand bol, plein, sur le bureau de Ronald Reagan à la Maison Blanche. Le président aimait plonger ses mains pour en avaler plusieurs d’un coup. Eh bien, voici que le «skittle» devient un des plus récents avatars de la pénible et parfois insupportable campagne américaine.

Décidément, à sept semaines de l’échéance, aux Etats-Unis, on verse de plus en plus souvent dans le n’importe quoi. Je m’explique : figurez-vous que le fils de Donald Trump, dont on nous dit qu’il est l’un des plus proches «conseillers» de son père, commet un texte sur Twitter (parce que, bien entendu, ça passe par Twitter, le réducteur mondial de la pensée en 140 signes). Que dit Donald Trump Junior ? «Si j’avais un bol de “skittles”, et que je vous disais que trois d’entre eux sont empoisonnés, oseriez-vous en prendre une poignée ?» Et il conclut : «C’est ça, le problème des réfugiés syriens.» Immédiates protestations : «Comment osez-vous comparer des êtres humains qui souffrent à des bonbons ?»

Ou encore : «Des milliers d’enfants syriens ont été tués pendant la guerre. Ce ne sont pas des “skittles”. Ce sont des enfants.» Ou enfin : «Vous appelez ça un “skittle”» et d’accompagner le texte avec la terrible photo de ce garçon sidéré, tétanisé, recouvert de poussière, survivant d’un bombardement, frêle et fragile créature, marquée à jamais par l’empreinte fatale de la guerre, le regard perdu dans un au-delà indéfinissable. Un gamin, un bonbon, la vulgarité et la violence d’une campagne dont, aujourd’hui, personne ne peut prédire l’issue.

A lire aussi : Vacillante Hillary, fringante Virginie, par Philippe Labro

Ce soir-là, à Paris, on a fêté les 70 ans du Festival de Cannes. Le premier eut lieu, en effet, entre le 20 septembre et le 5 octobre 1946. A cette occasion, les responsables du Festival (Thierry Frémaux et Pierre Lescure) ont eu la bonne idée de réunir le monde du cinéma français sous l’imposante verrière de la grande salle de l’Ecole des beaux-arts, rue Bonaparte, à Paris.

Ambiance chaleureuse et amicale, entre producteurs, agents d’artistes, scénaristes, metteurs en scène, comédiens et comédiennes. Le plus célèbre, le plus applaudi par toute cette communauté : Jean-Paul Belmondo. Il sourit, il rayonne, et malgré les difficultés physiques dont il souffre depuis maintenant de longues années, il dégage une sensation de vigueur, d’énergie, de volonté de vivre, ce magnétisme qui a fait de lui, non seulement ce que l’on appelle une «star» – mais encore, et surtout, un homme dont le grand public se sent proche, comme un copain, quelqu’un avec qui on a envie de partager un repas, boire un verre – ce qui, en France, est un des critères de la bonne relation humaine.

Le petit monde du cinéma français saluait l’interprète de Pierrot le fou, de Léon Morin prêtre, de L’homme de Rio – une légende. Il y avait, aussi, dans cette salle, deux réalisateurs, tous deux à la veille de voir sortir leur dernière œuvre. Il s’agit de Xavier Dolan, réalisateur de Juste la fin du monde et de Danièle Thompson, auteur de Cézanne et moi. Deux styles, deux approches, très différentes, dans la manière de filmer. Mais un point commun : le respect et l’amour des actrices et des acteurs.

Chez Thompson, Guillaume Gallienne et Guillaume Canet. Chez Dolan, Marion Cotillard, Nathalie Baye, Léa Seydoux, Vincent Cassel et Gaspard Ulliel apportent tous la confirmation, s’il en était besoin, que le cinéma français regorge d’excellents comédiens et comédiennes. Telle est la force de cette tribu particulière : on vous emmène loin du quotidien.

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