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Quand Roselyne Bachelot jugeait les remaniements «absurdes»

Roselyne Bachelot a occupé quatre postes de ministres différents. [AFP/Archives]

Le Premier ministre Jean Castex a annoncé ce lundi 6 juillt la composition de son tout premier gouvernement. Parmi les ministres, on retrouve Roselyne Bachelot, an charge de la Culture. En 2014 pourtant, l'ancienne ministre devenue chroniqueuse sur D8 jugeait sévèrement cette valse des ministres, qui selon elle nuit à l’administration du pays. Voici ce qu'elle disait de cette pratique à l'époque...

Quelle est l’ambiance au sein d’un gouvernement sous la menace d’un remaniement ?

Une chape de plomb pèse sur les ministres et leurs collaborateurs. Vous êtes dans un couloir de la mort politique. Les membres du cabinet font des cartons, l’ambiance est glauque.

Le Premier ministre présente sa démission au Président sans avertir les membres du gouvernement, qui l’apprennent par l’AFP. Il faut ensuite attendre le verdict dans son ministère où la vie semble suspendue.

Comment les ministres sont-ils fixés sur leur sort ?

En général, c’est le Président qui vous apprend une bonne nouvelle. Si la secrétaire vous passe le Premier ministre au téléphone, vous pouvez vous inquiéter. Mais certains ne sont au courant que lorsque le secrétaire général de l’Elysée lit sur le perron la liste des ministres devant la France entière.

Selon vous, remanier n’est donc pas une bonne solution ?

C’est une procédure absurde qui perturbe l’administration de l’Etat et nuit à sa continuité. Les lois sont votées mais les décrets jamais pris, vos successeurs n’ayant pas la volonté de faire vivre un texte qui ne portent pas leur nom. C’est ainsi que les textes réglementaires de la loi Bachelot de juillet 2003 ont pris un retard dommageable encore aujourd’hui.

Que ressent-on lorsqu’on fait partie des grands perdants d’un remaniement ?

Lorsque j’ai quitté le ministère de l’Environnement, en 2004, j’ai ressenti une véritable injustice. J’avais préparé la Charte de l’environnement. Le remaniement a eu lieu fin mars, alors que le texte était inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale la semaine suivante. Je suis donc partie en laissant tout mon travail derrière moi, mes discours comme mes notes de travail.

Mon successeur, qui n’avait jamais travaillé ce sujet, est monté à la tribune sans jamais prononcer mon nom. On a alors le sentiment d’être rayé de la carte.

Vous donne-t-on des justifications dans les choix qui sont faits ?

Aucune, jamais. Les ministres travaillent avec cœur, ils donnent tout. Et le lendemain, ils se retrouvent sur un trottoir en se demandant ce qui leur est arrivé. Car ce ne sont pas les meilleurs qui restent, et ceux qui ont démérité sont débarqués avant.

Le choix relève de calcul, de copinage, d’équilibre entre les régions ou entre les hommes et les femmes.

Y a-t-il concertation entre le Premier ministre et le Président pour reformer le gouvernement ?

Dans la Constitution, c’est le premier ministre qui constitue son gouvernement et le présente au Président de la République, qui l’accepte. En réalité, c’est le Président, détenteur de la légitimité du suffrage universel, qui choisit les ministres.

Comment le concept du remaniement est-il perçu à l’étranger ?

Notre manie du remaniement est un sujet de moquerie dans toute l’Europe. Dans les conseils européens, il serait pourtant indispensable de convaincre et donc de tisser des liens, d’entretenir des réseaux.

Je suis arrivée à mon premier Conseil Européen en 2002. Alors ministre de l’Ecologie, je me souviendrai toujours de ma collègue belge qui s’est approchée de moi et m’a demandé : « Est-ce bien utile d’apprendre votre nom ? Vous serez partie avant même qu’on s’en soit rendu compte. »

Retrouvez toute l'actualité sur le remaniement ICI

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