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Affaire Karachi : Edouard Balladur relaxé, François Léotard condamné à du sursis

Jugés devant la Cour de justice de la République pour leur rôle supposé dans le financement occulte de la campagne présidentielle de 1995, l'un des volets de la tentaculaire «affaire Karachi», l'ancien Premier ministre Edouard Balladur, 91 ans aujourd'hui, et son ex-ministre de la Défense François Léotard, 78 ans, ont été fixés sur leur sort ce jeudi 4 mars.

Edouard Balladur a été relaxé par la Cour de justice de la République. François Léotard a quant à lui été condamné à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 100.000 euros d'amende pour «complicité» d'abus de biens sociaux. Tous deux étaient absents au délibéré. 

Dans ce dossier vieux de plus de vingt-cinq ans, il était reproché à Edouard Balladur d'avoir en partie financé sa campagne présidentielle malheureuse via des rétrocommissions illégales versées en marge d'importants contrats d'armement.

La Cour de justice de la République (CJR), seule juridiction habilitée à juger des membres du gouvernement pour des infractions commises dans l'exercice de leurs fonctions, a rendu, comme convenu, son jugement un peu avant midi.

La CJR n'a pas suivi qu'en partie les réquisitions

Lors des débats, estimant que l'ancien Premier ministre (1993-1995) avait «nécessairement connaissance de l'origine délictueuse des fonds» ayant alimenté son compte de campagne, l'accusation avait requis à l'encontre d'Edouard Balladur, le 2 février dernier, un an d'emprisonnement avec sursis et 50.000 euros d'amende pour «complicité» et «recel» d'abus de biens sociaux. La CJR n'est donc pas allée dans le sens de cette requête.

La CJR a, en revanche, suivi ce qui avait été préconisé pour François Léotard. En effet, une peine de deux ans de prison avec sursis et 100.000 euros d'amende avait été demandée contre lui jugé pour «complicité». Pour le procureur général François Molins, l'ex-ministre de la Défense était «beaucoup plus impliqué» qu'Edouard Balladur dans la gestion des rétrocommissions illégales.

Tous deux étaient accusés d'avoir imposé à deux entités détenues par l'Etat - qui négociaient la vente de sous-marins et de frégates à l'Arabie saoudite et au Pakistan - un réseau d'intermédiaires «inutiles» aux commissions «pharaoniques», les contrats d'armement étant alors quasiment finalisés.

Selon l'accusation, une partie des quelque «550 millions de francs» (soit «117 millions d'euros») effectivement versés à ce réseau avait alimenté en partie le compte de campagne du candidat Balladur, alors engagé dans une guerre fratricide à droite avec Jacques Chirac. Au coeur du dossier figurait un dépôt en espèces et sans justificatif de 10,25 millions de francs (1,5 million d'euros) sur le compte - déficitaire - du candidat, trois jours après sa défaite au premier tour.

La relaxe plaidée et obtenue pour balladur

Malgré la «gravité des faits», le ministère public avait demandé à la Cour de prendre en compte le temps écoulé et l'âge des prévenus.

Edouard Balladur, remis du Covid-19 qu'il avait contracté en septembre dernier, a toujours affirmé que ces fonds provenaient de dons de militants et de la vente de gadgets lors de réunions publiques. Mais, pour l'accusation, il y avait un «lien» entre cette somme et les espèces retirées à Genève quelques jours plus tôt par les intermédiaires «inutiles».

«Des théories totalement délirantes», des «suppositions» sans «preuves», avaient brocardé les avocats de l'ancien Premier ministre, lorsque celle de François Léotard, Brigitte Longuet, vilipendait un dossier fondé sur «des rumeurs». Ils avaient plaidé la relaxe des deux prévenus.

Les soupçons de financement occulte de la campagne Balladur n'ont émergé qu'en 2010, au fil de l'enquête sur l'attentat de Karachi le 8 mai 2002, qui avait coûté la vie à 11 Français travaillant à la construction de sous-marins. Toujours en cours, l'enquête sur cet attentat a au départ privilégié la piste d'al-Qaïda, puis exploré celle - non confirmée à ce jour - de représailles après l'arrêt du versement des commissions, une fois Jacques Chirac élu président. «Je n'ai rien à voir avec une affaire Karachi», avait clamé Edouard Balladur.

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