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Le vrai-faux retour de la télé publique grecque

Un salarié dans les locaux de la nouvelle "télévision publique" grecque, DT [Dimitris Rapakousis / AFP] Un salarié dans les locaux de la nouvelle "télévision publique" grecque, DT [Dimitris Rapakousis / AFP]

Après un mois de blackout total sur les chaînes publiques de télévision, le gouvernement grec tentait jeudi le redémarrage artisanal d'un embryon d'audiovisuel public, sous la forme de rediffusions qui exacerbent la confrontation avec les ex-salariés de l'ERT.

Du noir et blanc, des mélodies des années 60, des acteurs disparus, de l'archéologie: les premières heures de la "télévision publique" (DT) -c'est son nom provisoire- ont transporté les téléspectateurs vers un passé très éloigné du marasme économique et social dans lequel se débat la Grèce.

La mire puis les images de l'EDT ont remplacé depuis mercredi soir l'écran noir qui s'affichait depuis exactement un mois, le 11 juin, sur les trois chaînes de la défunte radiotélévision publique ERT, abruptement fermée par décision du gouvernement d'Antonis Samaras.

L'exécutif avait prévenu que dans un premier temps, faute de contenus originaux, le nouvel organisme devrait se contenter de rediffuser des fictions et des documentaires.

La petite équipe chargée de mettre sur orbite cet ovni télévisuel présente une allure aussi bigarrée que les programmes, ironisaient jeudi plusieurs médias grecs: "un technicien à la retraite, un ancien réalisateur de l'ERT passé sur une chaîne privée, un cadre du Centre grec du cinéma, un salarié de la chaîne parlementaire", décrivait le journal Eleftherotipia.

Le logo de la nouvelle "télévision publique" grecque, DT [Louisa Gouliamaki / AFP]
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Le logo de la nouvelle "télévision publique" grecque, DT
 

Les commentaires n'étaient pas plus charitables envers le logo de la nouvelle entité qui a mis le feu aux réseaux sociaux: sur fond bleu canard, une sphère posée sur un ruban bicolore qu'un graphiste sur Facebook comparait aux rayures de fluor d'un tube de dentifrice.

Le quotidien Ta Nea a exhumé une troublante capture d'écran de la télévision soviétique des années 80 dont la ressemblance avec le logo de l'EDT est frappante.

Coup de griffe supplémentaire à ce lancement chaotique: le réalisateur de 84 ans, Robert Manthoulis, dont le film "Madame le maire" (1960), a inauguré la programmation, jeudi soir, a annoncé son intention de demander des dommages et intérêts pour une diffusion sur une chaîne "méprisable".

Certains éditorialistes avaient jeudi la dent dure contre "l'improvisation" et "l'amateurisme" de ce démarrage.

Seuls gages aux amateurs d'informations: la mise en place d'un bandeau d'information intermittent en bas de l'écran, et le rétablissement de chaînes étrangères comme la BBC, ou Deutsche Welle qui étaient auparavant disponibles gratuitement via le signal de ERT. La française TV5 et l'Américaine CNN qui étaient aussi diffusées via ERT ne sont pas revenues.

Légalement, le gouvernement était contraint de relancer le signal d'une télévision publique après une décision du Conseil d'Etat ordonnant la reprise temporaire des programmes.

Mais il est confronté à un problème de taille: au siège de la chaîne publique historique ERT, dans le nord d'Athènes, des dizaines d'employés continuent de se relayer quotidiennement pour proposer émissions et bulletins d'informations diffusés sur Internet, grâce au soutien de l'Union européenne de l'audiovisuel (UER).

Critiquée pour sa mauvaise gestion et sa dépendance vis-à-vis des pouvoirs, l'ancienne "vache sacrée" de la fonction publique s'est muée depuis sa fermeture en média alternatif et contestataire, alors que ses 2.700 salariés ont reçu leur lettre de licenciement.

La nouvelle télévision publique émet donc, selon plusieurs journaux, grâce au relais d'une station privée. Le ministre de l'audiovisuel, Pantelis Kapsis, a affirmé mardi à l'AFP que le dialogue n'était pas rompu et le nouvel organisme prêt à embaucher 2.000 anciens de l'ERT avec paiement de compensation. A condition qu'ils évacuent le bâtiment.

Une éventualité rejetée par les contestataires qui qualifient de "pirate" la nouvelle télé. Des chaînes privées ont observé jeudi une grève de solidarité de quelques heures.

Jeudi, M. Kapsis s'est fait plus ferme, assurant que "l'Etat ne restera pas otage des syndicalistes.

Ironie de l'histoire, certains documentaires au menu de la première de journée d'émission de la chaîne DT, produits par l'ex-ERT, affichaient les deux logos en vis à vis de l'écran.

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