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11 Septembre : la torture, hors sujet pour les familles de victimes

Manifestation contre la torture à Guantanamo, dans une gare de New York le 28 mai 2009 [Stan Honda / AFP/Archives] Manifestation contre la torture à Guantanamo, dans une gare de New York le 28 mai 2009 [Stan Honda / AFP/Archives]

"Nous ne sommes pas là pour faire le procès de l'Amérique": la question des tortures subies par les accusés du 11-Septembre, au coeur de la stratégie de leurs avocats, est balayée d'un revers de manche par les familles de victimes.

Au sortir d'une semaine d'audiences à Guantanamo, largement centrée sur les mauvais traitements endurés après leur arrestation par les cinq hommes accusés des attentats meurtriers du 11 septembre 2001, une dizaine de victimes et de proches des défunts crient au scandale.

"Ecouter (la défense) faire le procès de l'Amérique au lieu de faire celui de ces cinq hommes est outrageant", estime Richard Costanzo, dont la soeur a péri dans l'avion qui s'est écrasé contre le Pentagone à Washington.

"J'ai plus de cicatrices sur mon corps qu'eux, j'ai été torturé le 11-Septembre", s'insurge aussi Jim Jenca, grièvement blessé dans l'effondrement de la tour sud du World Trade Center. "Cette affaire n'a rien avoir avec la torture, il s'agit du meurtre de près de 3.000 personnes", lance-t-il à quelques journalistes.

Les avocats de Khaled Cheikh Mohammed, cerveau autoproclamé des attaques terroristes, et de ses quatre co-accusés ont invoqué mardi la Convention de l'ONU contre la Torture pour réclamer au juge l'abandon de la peine de mort. Les autorités américaines ont admis que M. Mohammed avait subi 183 séances de simulation de noyade lorsqu'il était détenu dans une prison secrète de la CIA.

Son neveu, Ali Abd al-Aziz Ali, accusé d'avoir organisé le financement de l'opération du 11-Septembre, a subi une blessure à la tête consécutive à ses mauvais traitements, selon un rapport médical dévoilé mercredi.

Et les avocats de deux des trois autres accusés ont affirmé que leurs clients avaient été torturés avant d'être transférés à Guantanamo, en septembre 2006. Sans livrer d'autres détails, toutes les informations concernant les cinq hommes étant classifiées.

"La trahison de nos idéaux"

"Pourquoi croyez-vous que nous sommes devant un tribunal militaire à Guantanamo?", a lancé l'avocate Cheryl Bormann: "Seulement parce que le gouvernement américain veut cacher les preuves de torture".

Ultime tentative pour "que le grand public connaisse toute l'histoire", les avocats ont fait appel au président Barack Obama afin qu'il déclassifie le programme des prisons secrètes de la CIA, où les cinq hommes ont été incarcérés pendant trois ans, et soumis à des interrogatoires musclés.

"Nous étions en guerre, nous avions besoin de renseignements", s'est défendu à l'audience le procureur Clay Trivett, "nous n'avons pas choisi de faire la guerre à Al-Qaïda". "Ce n'est pas une affaire de torture, il s'agit de l'exécution sommaire de 2.976 personnes", a-t-il fustigé.

Tentant pourtant de rassembler des preuves des mauvais traitements, les avocats ont demandé de pouvoir faire des photos des "chevilles et des poignets" de leurs clients ou d'autres stigmates des tortures.

"Je ne peux pas montrer les marques sur le poignet de ma soeur parce que je n'ai pas pu retrouver son poignet (...) car tout ce qu'ils ont trouvé d'elle c'est un fragment d'os de sa jambe droite", a réagi Richard Costenzo.

Quand on "entend (la défense) parler de torture, ils ne savent pas de quoi ils parlent, les familles sont torturées chaque jour", s'est aussi exclamée Patricia DeConto, qui a perdu son fils dans l'incendie des tours jumelles.

"Ils ont subi une perte terrible (...) et nous regarder argumenter sur des questions juridiques pendant trois, quatre, cinq jours est souvent traumatisant", admet l'avocat James Connell. "Il s'agit du traumatisme de tout un pays, mais il s'agit aussi de la trahison de nos idéaux en réponse à ce traumatisme", dit-il: "On ne peut ignorer aucun des deux aspects".

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