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L'opposante Timochenko libérée

Des manifestants d'opposition devant le Parlement à Kiev le 22 février 2014 [Louisa Gouliamaki / AFP] Des manifestants d'opposition devant le Parlement à Kiev le 22 février 2014 [Louisa Gouliamaki / AFP]

Le parlement ukrainien a libéré samedi l'opposante emprisonnée Ioulia Timochenko et décidé qu'une élection présidentielle anticipée aurait lieu en mai, destituant de facto Viktor Ianoukovitch, qui, de son côté, refuse de démissionner et dénonce un "coup d'Etat".

 

"Ioulia libérée !", scandaient des centaines de personnes à Kharkiv (est), où Ioulia Timochenko était hospitalisée près du centre pénitentiaire. L'ancienne égérie de la "Révolution orange" de 2004, arborant sa tresse emblématique, les a saluées de la main, et son entourage a annoncé qu'elle se rendait à Kiev, sur le Maïdan, la place de l'Indépendance occupée depuis trois mois par des milliers d'opposants.

"La dictature est tombée", a-t-elle proclamé sur le site internet de son parti.

Le Parlement avait voté plus tôt dans la journée la "libération immédiate" de l'ancienne Première ministre. Les députés ont ensuite constaté la vacance du pouvoir.

Un partisan du gouvernement, soupçonné d'être un sniper des forces de l'ordre, est molesté par les manifestants à Kiev le 22 février 2014 [Bulent Kilic / AFP]
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Un partisan du gouvernement, soupçonné d'être un sniper des forces de l'ordre, est molesté par les manifestants à Kiev le 22 février 2014
 

"Le président Ianoukovitch s'est écarté du pouvoir et ne remplit plus ses fonctions", est-il écrit dans la résolution adoptée par les députés, qui ont fixé au 25 mai la date d'une élection présidentielle anticipée.

Mais, de Kharkiv (est), Viktor Ianoukovitch, dont le mandat court jusqu'en mars 2015, a assuré qu'il n'avait nullement l'intention de démissionner.

"Le pays assiste à un coup d'Etat (...). Je suis un président élu de manière légitime", a-t-il souligné.

Il a aussitôt reçu le soutien de la Russie, qui estime que "l'opposition n'a pas rempli une seule de ses obligations" et dénonce "les extrémistes armés et les pillards dont les actes constituent une menace directe (pesant) sur la souveraineté de l'Ukraine".

Alors que l'accord qu'il a conclu vendredi prévoit qu'il entérine rapidement un certain nombre de mesures adoptées par le parlement, Viktor Ianoukovitch a souligné qu'il n'allait "rien signer avec les bandits qui terrorisent le pays".

"Il n'y a pas de coup d'Etat à Kiev. Les bâtiments officiels ont été abandonnés. Le président du Parlement a été légitimement élu", a aussitôt répondu sur Twitter le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, qui a participé aux négociations entre opposition et pouvoir.

La police a évacué le quartier gouvernemental dans la capitale, le laissant sous le contrôle du service d'ordre des opposants.

L'armée a, de son côté, fait savoir dans un communiqué qu'elle n'allait "pas s'impliquer dans le conflit politique".

Les défections s'enchaînaient samedi dans le camp du chef de l'Etat, au fur et à mesure que l'opposition s'emparait des leviers du pouvoir.

 

- Menace sur l'intégrité territoriale -

Deux proches de Ioulia Timochenko ont été désignés à la tête du Parlement et du ministère de l'Intérieur.

"Notre principal objectif, c'est de rétablir le fonctionnement des institutions", a déclaré son nouveau président, Olexandre Tourtchinov, au cours d'une conférence de presse peu après son élection.

Un manifestant opposé au gouvernement du président ukrainien Viktor Ianoukovitch se tient sur une barricade du Maïdan à Kiev le 22 février 2014 [Louisa Gouliamaki / AFP]
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Un manifestant opposé au gouvernement du président ukrainien Viktor Ianoukovitch se tient sur une barricade du Maïdan à Kiev le 22 février 2014
 

La police avait affirmé auparavant être "aux côtés du peuple" et partager ses aspirations à des "changements rapides", dans un communiqué publié sur le site internet du ministère de l'Intérieur.

Le président Ianoukovitch est en déplacement à Kharkiv, où se déroulait un congrès de responsables politiques des régions pro-russes de l'est, qui a remis en cause la "légitimité" du Parlement ukrainien, considérant qu'il travaille actuellement "sous la menace des armes".

"Les décisions du Parlement prises dans ces conditions amènent à douter de leur légitimité et de leur légalité", ont souligné ces responsables.

"L'intégrité territoriale et la sécurité de l'Ukraine se trouvent menacées", estiment-ils encore.

Des manifestants d'opposition devant la résidence du président Ianoukovitch à Kiev le 22 février 2014 [Genya Savilov / AFP]
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Des manifestants d'opposition devant la résidence du président Ianoukovitch à Kiev le 22 février 2014
 

L'Ukraine, 46 millions d'habitants, est divisée entre l'est russophone et russophile, majoritaire, et l'ouest nationaliste et ukrainophone.

Dans la banlieue de Kiev, un embouteillage monstre était provoqué par l'afflux de milliers d'Ukrainiens allés jeter un oeil sur la luxueuse résidence présidentielle, désertée par les forces de l'ordre.

Les lieux sont gardés par le service d'ordre des opposants, qui interdisait l'accès à l'intérieur des maisons, mais laissait les curieux contempler de l'extérieur, à travers les fenêtres, les pièces décorées de marbre et de dorures, la salle de réception en forme de galion et une collection de faisans...

 

- Situation économique épouvantable -

Sur le Maïdan, transformée en quasi-zone de guerre, au coeur de Kiev, depuis le début de la crise il y a trois mois, des milliers de personnes étaient toujours rassemblées samedi dans l'attente des ultimes nouvelles de la situation politique.

Beaucoup étaient présentes avec une bougie et des fleurs. Une inscription proclame "gloire aux héros" et des photos de manifestants tués étaient affichés sur le podium érigé au centre de la place.

"Nous devons rendre hommage à ceux qui sont morts pour nous, nous devons être fiers d'eux et continuer notre combat jusqu'au bout, pour un avenir meilleur", a expliqué Natalia, une manifestante sur le Maïdan.

 
 

L'accord a été conclu à la suite d'une médiation européenne après des affrontements qui ont fait près de 80 morts depuis mardi à Kiev et des centaines de blessés, un niveau de violence inédit pour ce jeune pays issu de l'ex-URSS.

"Soyons prudents", a jugé le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, "car la situation économique reste épouvantable".

L'Ukraine se trouve actuellement au bord de la faillite, et la Russie a promis l'octroi d'un crédit de 15 milliards de dollars et un important rabais du prix du gaz. Elle a versé trois milliards de dollars fin décembre, mais annulé cette semaine un nouveau versement de deux milliards et le versement du reste de l'aide promise est désormais très incertain.

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