Depuis huit mois, Attawapiskat, une tribu primitive du nord de l’Ontario, doit affronter une explosion très inquiétante du nombre de tentatives de suicide en son sein.
Le phénomène est si alarmant que le conseil de bande de cette nation du peuple des Cris vient de déclarer l’état d’urgence. 101 membres parmi les quelques 2.000 que compte la communauté ont tenté de mettre fin à leurs jours depuis septembre. Pour la seule journée du samedi 9 avril, onze personnes ont tenté de se suicider alors qu’en mars 28 d’entre eux avaient tenté l’irréparable.
Toute la communauté est touchée selon CNN qui assure que les tentatives de suicide concernent aussi bien les enfants, le plus jeune a 11 ans, que les adultes. Le chef Attawapiskat, Bruce Shisheesh, a lancé un message alarmant à la télévision : «J’implore nos amis et le gouvernement, nous avons besoin d'aide. J'ai des cousins et amis qui ont tenté de se suicider».
Weeneebayko Health Authority (WAHA) is flying in crisis team, mental health nurses & social workers. Attawapiskat has been waiting since Oct
— Bruce Shisheesh (@BruceShisheesh) 11 avril 2016
L'Assemblée des Premières Nations, l’organisation qui représente les 617 peuples autochtones du Canada décrit «une tragédie nationale qui exige une action immédiate». Selon sa présidente, Perry Bellegarde, cela passe par la mise en place d’«une stratégie nationale de lutte contre le suicide des Premières nations».
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De fait, Attawapiskat n'est pas le seul peuple autochtone à devoir affronter la déprime de ses membres. En mars, une autre tribu Cri, Pimicikamak, installée plus à l’ouest a elle aussi déclaré son état d’urgence.
Des problèmes de toxicomanie
La nouvelle sur la situation d'Attawapiskat a provoqué une prise de conscience au Canada ou certains n’hésitent pas à parler de génocide culturel à propos de la survie de ces tribus qui peuplent le Nord du Canada depuis des temps immémoriaux. «Il y a de longue date de graves questions de santé mentale et de toxicomanie dans certaines communautés» a reconnu un porte-parole du ministère canadien de la Santé.
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Dans les faits, de nombreux peuples des Premières Nations du Canada sont aux prises avec le cercle vicieux de la dépression, du chômage élevé et de la toxicomanie. «Nous ne disposons pas du même accès que tout le monde à l'emploi, à l'éducation et aux plus belles choses de la vie» s’est plainte Sheila North Wilson, la chef du Manitoba Keewatinowi Okimakanak (MKO), un parti politique amérindien. Nous nous sentons laissés de côté».
La crise couve à tel point que le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a promis dans un tweet d’«améliorer les conditions de vie pour tous les peuples autochtones».
The news from Attawapiskat is heartbreaking. We'll continue to work to improve living conditions for all Indigenous peoples.
— Justin Trudeau (@JustinTrudeau) 10 avril 2016
Pourtant, le phénomène n’est pas nouveau. Une étude réalisée en 1994 avait permis de constater des taux de suicide chez les jeunes parmi les plus élevés au monde dans certaines tribus amérindiennes du Canada. Une autre, publiée par l'Université de Victoria, avait révélé des taux de suicide chez les jeunes de ces communautés jusqu'à 800 supérieurs fois à la moyenne nationale canadienne.