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Des Argentins tournent le dos à l'église, après le rejet de l'avortement

Le mouvement prend de l'ampleur en Argentine : depuis le rejet par le Sénat du droit à l'avortement au pays du pape François, de plus en plus de personnes renoncent à leur baptême pour protester contre le poids de cette institution dans le débat public.

Quelques jours après le vote négatif de la chambre haute, environ 3.000 Argentins ont déposé vendredi une demande d'apostasie au siège de la conférence épiscopale à Buenos Aires, a constaté l'AFP.

«Nous avons franchi un grand pas aujourd'hui. Nous avons présenté quelque 3.000 apostasies. C'est une apostasie collective, c'est très important de le faire en public», a déclaré à l'AFP Fernando Losada de la Coalition argentine pour un Etat laïque (CAEL), à l'origine de l'initiative.

Il venait de déposer plusieurs cartons contenant les milliers de demandes. Valentina Pereña, jeune étudiante en art, fait partie de ceux qui veulent être débaptisés. «Je voulais le faire depuis que j'étais toute petite et là, c'est une bonne occasion», a-t-elle confié à l'AFP en attendant son tour pour signer dans le centre de Buenos Aires.

Le 9 août à l'aube, par 38 voix contre 31, le Sénat a rejeté le projet de loi, après son adoption en juin par la chambre des députés.

Il ne manquait plus que l'aval du Sénat et l'Argentine allait se convertir en 3e pays d'Amérique latine à autoriser l'IVG, après Cuba (1965) et l'Uruguay (2012).

Une femme paraphe un document renonçant à son baptême à côté d'une pancarte disant "Pas en mon nom. Apostasie collective", devant le siège de la conférence épiscopale argentine, le 24 août 2018 [EITAN ABRAMOVICH / AFP]
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Une femme paraphe un document renonçant à son baptême à côté d'une pancarte disant "Pas en mon nom. Apostasie collective", devant le siège de la conférence épiscopale argentine, le 24 août 2018

Depuis, la CAEL a lancé un mouvement d'apostasie collective en signe de protestation.

En Argentine, l'église catholique possède une grande influence et reçoit un financement de l'Etat pour payer les salaires de ses évêques et financer l'éducation catholique. Sur 41 millions d'Argentins, 75% se déclarent catholiques.

Pression des évêques 

«Je ne veux pas que mes impôts soient une façon d'approuver la pédophilie ou les attitudes sectaires», a dénoncé Silvia Torkanowsky, une conductrice de taxi également signataire. «On reçoit en moyenne 100 visites par jour sur notre site "Apostasie collective". En ce moment, avec la question de l'avortement, on a eu 40.000 visites en un jour», s'est félicité Andrés Miñones, qui fait partie de cette organisation laïque.

L'avortement en Amérique latine [Anella RETA / AFP]
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L'avortement en Amérique latine

Le débat sur l'avortement a profondément divisé la société argentine et l’Église s'est fortement mobilisée contre le projet de loi, du Vatican aux paroisses des 24 provinces d'Argentine.

«Dans le cadre du débat public, les fondements doivent être les dernières avancées scientifiques, sociétales, juridiques et ne doivent pas être liés à des questions de foi, comme c'est arrivé avec l'avortement, lorsque les évêques appelaient les gouverneurs pour faire pression», a estimé César Rosenstein, qui fait partie de l'organisation laïque.

D'après les estimations, 500.000 avortements sont pratiqués chaque année en Argentine, dans des cliniques privées ou dans des conditions d'hygiène très précaires en fonction de la situation économique.

Le CAEL milite également pour la séparation complète de l'Eglise et de l'Etat au pays du pape François. «C'est le moment de séparer totalement l'Eglise et l'Etat. Au sein de la société, on comprend que l'Etat et l'Eglise ne peuvent pas aller de pair» , a ajouté Fernando Losada à la sortie du siège de l'épiscopat.

Le débat sur la légalisation de l'avortement peut retourner au Sénat dans un an, délai minimum. Mais comme l'élection présidentielle est programmée pour octobre 2019, il est peu probable qu'une question aussi controversée s'invite au Congrès en pleine campagne électorale. Il faudra plutôt attendre 2020.

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