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Tout savoir sur la taxe mondiale sur les multinationales, qui s'apprête à être validée par le G20

Un premier accord avait été trouvé par les ministres des Finances du G7 début juin à Londres. Un premier accord avait été trouvé par les ministres des Finances du G7 début juin à Londres. [Stefan Rousseau / POOL / AFP]

Un big-bang fiscal. Le projet de taxe mondiale minimale sur les multinationales, adopté par 131 pays de l'OCDE la semaine dernière, doit franchir une nouvelle étape : il doit obtenir le feu vert des ministres des Finances du G20, réunis aujourd'hui et demain à Venise (Italie), ce qui devrait être une formalité.

Une réforme en deux piliers

Dans l'accord conclu le 1er juillet par 131 pays, sous l'égide de l'Organisation de développement et de coopération économique (OCDE), les observateurs ont mis l'accent sur la mesure la plus symbolique : l'imposition d'un impôt mondial minimal, d'au moins 15 %, sur les sociétés dont le chiffre d'affaires s'élève à au moins 750 millions d'euros. Une mesure bloquée par les Etats-Unis sous l'administration de Donald Trump, avant d'être relancée par Joe Biden début juin. Elle pourrait de fait signifier l'arrêt de mort des paradis fiscaux, aux taux d'imposition extrêmement bas afin d'attirer chez eux les multinationales.

La réforme, qui doit obtenir l'aval technique et politique des argentiers du G20 ces vendredi et samedi, repose également sur un autre pilier : «une répartition plus équitable des bénéfices et des droits d’imposition entre pays» concernant les multinationales, y compris celles du numérique, les fameux GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple), indique l'OCDE dans un communiqué. Concrètement, ce volet prévoit la possibilité de pouvoir taxer les entreprises là où elles font des profits, et pas seulement dans le pays où elles sont domiciliées. Il ne devrait concerner qu'une centaine d'entreprises dans le monde.

«Après des années de travaux et de négociations intenses, ce paquet de mesures historique garantira que les grandes entreprises multinationales paient leur juste part d’impôts partout dans le monde», s'est félicité le secrétaire général de l’OCDE, Mathias Cormann, après la conclusion de cet accord, applaudi par la communauté internationale.

Plusieurs pays réfractaires

Si 131 pays, représentant 90 % du PIB mondial, parmi lesquels figure la France, ont adhéré à ce plan la semaine dernière, neuf pays ne l'ont pas signé. Parmi eux figurent trois pays européens : l'Irlande, la Hongrie et l'Estonie, qui tiennent à leur politique fiscale conciliante. L'Irlande pratique un taux d'imposition sur les sociétés de 12,5 %, la Hongrie 9 %, quand l'Estonie ne taxe quasiment que le versement de dividendes.

On retrouve également parmi les pays récalcitrants deux paradis fiscaux des Caraïbes (Barbade et Saint-Vincent-et-les-Grenadines), deux pays africains (Nigeria et Kenya), ainsi que le Pérou et le Sri Lanka. En coulisses, les tractations se poursuivent pour convaincre ces pays de se rallier à la réforme. En particulier les trois européens, qui pourraient bloquer l'adoption d'une directive européenne portant sur un impôt minimum, car elle nécessite l'unanimité des membres de l'UE.

Un taux minimal encore en discussions

Le taux «d'au moins 15 %», inscrit dans la déclaration signée sous l'égide de l'OCDE, n'est pas gravé dans le marbre. Certains pays poussent pour une imposition minimale plus élevée. A la pointe de ce combat se trouvent les Etats-Unis, qui proposaient au départ un taux non pas de 15 %, mais de 21 %. Il avait reçu l'aval de la France et de l'Allemagne, avant d'être raboté lors des premières négociations entre Etats membres de l'OCDE.

Mais les Etats-Unis n'ont pas dit leur dernier mot et devraient revenir à la charge, par la voix de leur secrétaire au Trésor Janet Yellen, au cours de la réunion du G20 Finance vendredi et samedi. Si ce taux de 15 % est jugé trop faible par certains Etats, c'est que ceux-ci le trouvent trop bas par rapport au taux d'imposition moyen dans le monde, qui s'élève à environ 25 %. Il est également considéré insuffisant par plusieurs organisations, notamment Oxfam et Attac.

Aucune décision définitive sur le niveau d'imposition minimale n'est attendue à Venise, ont indiqué des responsables du Trésor américain. Il devrait être fixé d'ici au mois d'octobre. En effet, c'est à cette date que les travaux sur cette réforme de la fiscalité internationale doivent être parachevés, indique l'accord signé la semaine dernière, pour une entrée en vigueur prévue en 2023.

Des milliards de recettes fiscales supplémentaires

Selon l'OCDE, l'imposition d'un taux d'impôt minimal mondial de 15 % «devrait générer environ 150 milliards de dollars (127 milliards d'euros, NDLR) de recettes fiscales supplémentaires par an au niveau mondial».

Pour la France, une étude, publiée fin juin, du Conseil d’analyse économique (CAE), chargé de conseiller le gouvernement, a calculé que ce sont près de 6 milliards d'euros qui pourraient rentrer dans les caisses à court terme, puis 2 milliards à long terme, car les paradis fiscaux seront «incités à relever leur taux effectif de taxation».

L'autre pilier de la réforme, portant sur l'imposition des entreprises dans les pays où elles font des affaires, pourrait de son côté permettre de répartir plus équitablement «des droits d’imposition sur plus de 100 milliards de dollars (84 milliards d'euros, NDLR) de bénéfices», d'après l'OCDE. Ce volet pourrait rapporter à la France 900 millions d'euros de recettes fiscales supplémentaires, selon les calculs du CAE.

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