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Birmanie : Aung San Suu Kyi condamnée à quatre ans de prison supplémentaires

Aung San Suu Kyi, en juillet 2019.[STR / AFP]

L’étau judiciaire de la junte birmane se resserre un peu plus sur Aung San Suu Kyi. L'ancienne dirigeante a été condamnée ce lundi à quatre ans de prison, dans un des chapitres d’un procès où elle risque des décennies de détention.

Déjà condamnée en décembre à quatre ans d’emprisonnement pour avoir enfreint les restrictions sur le coronavirus (une peine ramenée à deux ans par les généraux au pouvoir), elle a cette fois été notamment reconnue coupable d’importation illégale de talkies-walkies, a détaillé une source proche du dossier.

Assignée à résidence depuis le coup d’Etat militaire de février 2021, la lauréate du prix Nobel de la paix 1991 est retenue dans ce lieu secret depuis son arrestation il y a près d'un an.

Un procès pour se débarrasser des opposants politiques

L’ancienne dirigeante du pays a été inculpée de très nombreuses reprises par la junte, ces derniers mois. Il est question de sédition, de corruption, d’incitation aux troubles publics, de fraude électorale... Son procès se tient à huis clos devant un tribunal mis spécialement en place  dans la capitale Naypyidaw, où elle est jugée aux côtés de l'un de ses fidèles, l'ex-président de la République Win Myint, également arrêté le 1er février.

«Tout le monde sait que ces accusations sont fausses (...) Les militaires utilisent cette tactique de la peur pour la maintenir en détention arbitraire» et définitivement l'écarter de l'arène politique, a assuré Manny Maung, chercheuse pour l'ONG Human Rights Watch., interrogée par l'AFP. Cette nouvelle condamnation «risque encore de renforcer la colère de la population birmane», a-t-elle affirmé.

Plusieurs proches de l'ex-dirigeante ont déjà été condamnés à de lourdes peines : 75 ans de prison pour un ancien ministre, 20 ans pour un de ses collaborateurs. D'autres se sont exilés ou sont entrés en clandestinité.

Un pays en plein chaos

Depuis février 2021, le coup d'Etat a fait plonger le pays dans le chaos : des centaines de civils ont été tués par les forces de sécurité et des milices citoyennes anti-junte ont pris les armes à travers toute la Birmanie.

L'influence politique d'Aung San Suu Kyi a beaucoup diminué depuis le putsch, avec une nouvelle génération qui a pris les armes contre la junte et possédant des visions plus progressistes.

Mais la fille du héros de l'indépendance, icône de la démocratie pendant les années qu'elle a passées en résidence surveillée sous les précédentes dictatures militaires, garde toujours une place particulière dans le cœur des Birmans. La condamnation prononcée à son encontre en décembre avait déjà «profondément irrité et provoqué des déluges de protestations sur les réseaux sociaux», a rapelé Manny Maung.

La prix Nobel est coupée du monde depuis près d'un an, ses seuls liens avec l'extérieur se limitant à de brèves réunions avec ses avocats, qui ont interdiction de parler à la presse et aux organisations internationales.

Au moins 175 personnes, dont de nombreux membres de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), seraient mortes en détention, «très probablement à la suite de mauvais traitements ou d’actes de torture», a dénoncé début décembre la Haute commissaire aux droits de l'Homme, Michelle Bachelet.

Plus de 1.400 civils ont été tués par les forces de sécurité depuis le coup d'Etat, d'après une ONG locale, l'Association d'assistance aux prisonniers politiques. Les généraux font état d'un bilan beaucoup moins lourd. Ils ont justifié leur passage en force en alléguant des fraudes massives lors des élections de 2020, remportées massivement par la LND.

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