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Commission européenne : l'Américaine Fiona Scott Morton renonce à un poste clé après une polémique

La Commission européenne a justifié son choix, assurant n'avoir reçu que 11 candidatures pour ce poste. [Kenzo TRIBOUILLARD / AFP]

La nomination de Fiona Scott Morton a un poste clé au sein de la Commission européenne avait soulevé des inquiétudes, notamment en France. L'économiste américaine a finalement renoncé, ce mercredi.

Professeure d'économie à l'université de Yale et ancienne cadre de l'administration Obama, Fiona Scott Morton a renoncé à briguer un poste clé de la Commission européenne lié à la régulation des géants américains de la tech.

«Fiona Scott Morton m'a informée de sa décision de ne pas accepter le poste d'économiste en chef de la concurrence. Je l'accepte avec regret», a annoncé sur Twitter la vice-présidente de la Commission, Margrethe Vestager, principal soutien de cette candidature.

Sa nomination ne faisait pas l'unanimité, notamment au sein du gouvernement français qui avait demandé à Bruxelles de reconsidérer son choix. Le président français Emmanuel Macron s'était lui-même dit mardi «dubitatif» sur ce recrutement, quand la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, avait estimé que cette décision devait être «reconsidérée par la Commission» étant donné que «la régulation du numérique est un enjeu capital pour la France et pour l'Europe».

L'Américaine était pointée du doigt pour ses anciennes fonctions de responsable de l'analyse économique à la division antitrust du ministère américain de la Justice, entre mai 2011 et décembre 2012, mais aussi pour son rôle de consultante pour des grands groupes de la tech comme Amazon, Apple et Microsoft.

Sachant que ce poste d'économiste en chef à la Direction générale de la concurrence implique de veiller au bon fonctionnement de la concurrence dans l'Union européenne et d'enquêter sur les abus de position dominante des géants du numérique, plusieurs voix s'étaient élevées pour dénoncer un potentiel conflit d'intérêts, voire une ingérence de Washington dans les décisions de l'UE.

«Embaucher une lobbyiste américaine des Gafam au moment où l'Europe se décidait enfin à limiter leur pouvoir, c'est un comble. Cette nomination est au mieux maladroite, au pire dangereuse», avait considéré l'eurodéputé conservateur Geoffroy Didier (LR), tandis que son homologue écologiste, Yannick Jadot, dénonçait «un scandale».

Le Medef, principale organisation patronale française, s'était lui aussi élevé contre cette nomination, demandant que «certaines règles internes à la Commission et au Parlement européen soient revues afin de réserver les postes stratégiques à des ressortissants des 27 pays membres de l’UE».

Vendredi 14 juillet, les chefs des quatre plus grands groupes politiques au Parlement européen avaient à leur tour demandé à la Commission de renoncer au recrutement de l'Américaine. Dans une lettre adressée à Margrethe Vestager, ils faisaient part de leur «consternation» : «A l'heure où nos institutions font l'objet d'un examen minutieux face aux ingérences étrangères, nous ne comprenons pas que des candidats non-européens soient pris en considération pour un poste aussi stratégique et de haut niveau».

L'Allemand Manfred Weber (PPE), l'Espagnole Iratxe Garcia Perez (S&D), le Français Stéphane Séjourné (Renew) et le Belge Philippe Lamberts (Verts) avaient souligné le fait que la nomination de Fiona Scott Morton survenait au moment où l'UE devait mettre en oeuvre de nouvelles législations ambitieuses pour réguler le secteur du numérique et se disaient «très préoccupés par les opinions opposées» à ces nouvelles législations que l'Américaine «a publiquement exprimées».

La pression s'est accentuée mardi

La pression s'est accentuée, mardi soir, lorsque cinq commissaires - dont le Français Thierry Breton - ont adressé une lettre à la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, demandant que la nomination de Fiona Scott Morton soit «réévaluée» et qu’elle puisse faire l’objet d’un débat. Cette polémique a nourri les critiques contre la présidente de la Commission, considérée comme très atlantiste.

«Si nous n'avons aucun chercheur (européen) de ce niveau pour être recruté par la Commission, ça veut dire que nous avons un très grand problème avec tous les systèmes académiques européens», avait déploré Emmanuel Macron.

«Etant donné la controverse politique provoquée par la sélection d'une non Européenne pour occuper ce poste et l'importance pour la direction générale (de la Concurrence) d'avoir le plein soutien de l'Union européenne (...), j'ai estimé que la meilleure chose était pour moi de me retirer», a écrit Fiona Scott Morton, dans sa lettre adressée à Margrethe Vestager.

«Je salue la décision responsable de Fiona Scott-Morton (...). La souveraineté numérique de l'Europe est une exigence absolue», a déclaré à l'AFP le ministre français délégué au numérique Jean-Noel Barrot, quelques minutes après l'annonce. 

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