En direct
A suivre

Taubira assure les magistrats de son soutien

Christiane Taubira. Christiane Taubira.[AFP]

Les amis de Nicolas Sarkozy, indignés par sa mise en examen pour "abus de faiblesse" dans le dossier Bettencourt, ont violemment contre-attaqué vendredi en ciblant le juge d'instruction, amenant la garde des Sceaux Christiane Taubira à s'interposer pour défendre le travail de la magistrature.

Mme Taubira "regrette tous propos qui porteraient atteinte à l'honneur des juges et assure les magistrats qui seraient mis en cause de son soutien", selon un communiqué de la Chancellerie, rappelant que "l'indépendance de l'autorité judiciaire est garantie par la Constitution".

Avant la ministre de la Justice, plusieurs voix à gauche s'étaient déjà émues du "spectacle" donné par la droite après la mise en examen de l'ancien président. "Je trouve particulièrement délétère cette façon de chasser en meute, en clan, pour impressionner et faire pression", a dit à l'AFP le porte-parole du PS David Assouline.

Les sarkozystes et l'UMP avaient été sidérés à l'annonce jeudi soir du soupçon pesant, aux yeux du juge d'instruction Jean-Michel Gentil, sur l'ancien locataire de l'Elysée: avoir abusé des absences d'une des vieilles dames les plus riches du monde pour financer sa campagne électorale victorieuse de 2007. Quelques heures plus tard, la colère prenait le dessus. Les plus proches de l'ancien chef de l'Etat étaient les plus violents ou les plus accusatoires, notamment Henri Guaino, enflammé, qui a exigé que le juge Gentil, accusé d'avoir "déshonoré la justice", vienne s'expliquer devant les Français.

Thierry Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, le 2 octobre 2012 à Bordeaux [Thomas Samson / AFP/Archives]
Photo
ci-dessus
Thierry Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, le 2 octobre 2012 à Bordeaux
 

"J'ai envie de dire à M. Guaino qu'il déshonore la République et (...) ses fonctions de député. C'est juste abject de tenir ce genre de propos", a rétorqué, également sur Europe 1, le président du principal syndicat de magistrats (USM), Christophe Régnard.

Nicolas Sarkozy lui-même juge "scandaleux" le traitement qui lui est infligé, a lancé son avocat, Me Thierry Herzog, qui s'est démultiplié sur les radios.

Ce ténor du barreau n'a pas hésité à mettre en cause l'impartialité du juge. "Est-ce que vous pensez que l'instruction a vraiment été à charge et à décharge ?", a-t-il demandé, dénonçant une mise en examen "incohérente et injuste". Il va contester la décision du juge devant la chambre d'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, où se déroule l'enquête.

Ami intime de l'ancien président, l'UMP Brice Hortefeux s'est étonné d'une mise en examen "bien à propos" sur fond de popularité croissante pour M. Sarkozy et décroissante pour le président François Hollande. Il a parlé lui aussi d'un traitement "exclusivement à charge".

Le juge Jean-Michel Gentil à Bordeaux, le 19 février 2013 [Patrick Bernard / AFP/Archives]
Photo
ci-dessus
Le juge Jean-Michel Gentil à Bordeaux, le 19 février 2013
 

Après Jean-François Copé, d'autres ténors de l'UMP ont embrayé sur le thème de l'"incompréhension" face à une mise en cause injustifiée à leurs yeux.

"Pour avoir été son ministre et sa porte-parole pendant la campagne présidentielle (de 2012,ndlr): rien ne me paraît plus difficile à croire qu'imaginer Nicolas Sarkozy se livrer à un abus de faiblesse sur une vieille dame", a déclaré Nathalie Kosciusko-Morizet.

François Fillon a qualifié la mise en examen d'"injuste et extravagante".

La veille déjà, de multiples voix du premier parti d'opposition avaient donné une lecture très politique d'un développement judiciaire survenu deux jours après la démission du ministre socialiste Jérôme Cahuzac. On avait parlé "d'instrumentalisation" (Christian Estrosi), "acharnement" (Geoffroy Didier), calendrier bizarrement opportun (Laurent Wauquiez).

Gare aux pressions sur la justice, s'est alarmé vendredi le numéro un socialiste Harlem Désir. "C'est insupportable de mettre ainsi en cause la probité et l'indépendance des juges", a-t-il dit en mettant l'accent sur la gravité des faits soupçonnés, s'ils étaient avérés.

Une gravité mise aussi en avant par le coprésident du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon ("la racine des problèmes est dans un modèle démocratique où l'argent règne sur tout") et par la présidente du Front national, Marine Le Pen ("Il s'agirait d'un abus de faiblesse sur une femme âgée et diminuée, dans le cadre du financement illégal d'une campagne électorale").

Première membre du gouvernement de Jean-Marc Ayrault à commenter (l'Elysée a opposé un non résolu à toutes les demandes de réactions), la ministre écologiste, Cécile Duflot, a simplement jugé "normal" cet épisode d'un dossier tentaculaire dont l'instruction semble en voie d'achèvement avec 17 mises en examen prononcées.

Le socialiste Jean-Christophe Cambadélis a mis en garde de son côté contre la "colère de l'opinion" devant ce qu'il a elliptiquement qualifié de "pluralité des mises en cause", évoquant ainsi les cas de Jérôme Cahuzac et Nicolas Sarkozy.

Un premier test de cette "colère" pourrait être la législative partielle de l'Oise qui voit s'affronter au second tour dimanche un UMP et une candidate FN.

Un parti dont la présidente - également avocate - a assuré que désormais, Nicolas Sarkozy ne pouvait plus siéger au Conseil constitutionnel dont sont membres de droit tous les anciens chefs de l'Etat. Le député écologiste Noël Mamère a aussi demandé à M. Sarkozy de "démissionner".

Le projet un temps défendu par l'ancien président de supprimer le juge d'instruction a surgi aussi dans les commentaires vendredi, Patrick Balkany, ami de Nicolas Sarkozy, voyant dans sa mise en examen la preuve que les juges "lui en veulent beaucoup" désormais.

 

Sarkozy mis en examen pour abus de faiblesse

Qui est Jean-Michel Gentil, le juge qui a mis en examen Nicolas Sarkozy

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités