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Najat Vallaud-Belkacem : «il faut stopper le racisme à l'école»

«Les maux de notre société se retrouvent dans les cours d'écoles», explique Najat Vallaud-Belkacem. [© DESSONS/JDD/SIPA]

Confrontées aux dérives haineuses dont l’école peut être le théâtre, les autorités se mobilisent. La ministre de l'Education Nationale veut miser sur la sensibilisation.

Un fléau à combattre au quotidien. La France est confrontée à une montée du ­racisme et de l’antisémitisme, y compris dans les cours de récréation. Face à ces rejets, la ministre de l’Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a lancé ce lundi une semaine de prévention. Des opérations de sensibilisation sont organisées dans les écoles. L’objectif : rassembler les jeunes ­autour des valeurs de la République.

Quatre mois après les attentats, pourquoi cette opération était-elle nécessaire ?

C’est absolument indispensable. Car la tension extrême que l’on connaît aujourd’hui dans nos pays européens franchit bien sûr le seuil de l’école. Les maux de notre société se retrouvent dans les cours d'écoles qui ne sont préservées ni du racisme ou de l'antisémitisme ordinaire, qui conduisent certaines familles juives à craindre de  mettre leur enfant dans une école publique, ni des pressions identitaires. Rien de cela n’est acceptable. Il faut éduquer au vivre ensemble et stopper le racisme et l’antisémitisme à l’école, comme toutes les formes de haines.

Comment lutter contre ce fléau ?

J’ai voulu qu’aucun enseignant ne puisse avoir le sentiment d’être laissé seul pour traiter un sujet aussi grave. Nous avons le devoir de les accompagner, et un plan de formation a été mis en place, afin qu’ils puissent apporter des réponses et démonter préjugés et stéréotypes le plus tôt possible. Nous avons aussi mis en place la réserve citoyenne (NDLR, composée de bénévoles venant transmettre  les valeurs de la République à l’école), qui compte plus de six mille inscrits. Il fallait que les établissements scolaires puissent accueillir en leur sein, aux côtés des enseignants, des personnes qui sont mues par une volonté sincère de faire comprendre aux enfants la richesse de la différence et lutter contre la tentation du repli sur soi.

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La laïcité est-elle la réponse à ces questions ?

Depuis la rentrée 2015, la création de l’enseignement moral et civique a enfin donné aux élèves une occasion d’aborder ces sujets et de comprendre ce qui n’est pas tolérable. Et j'ai lancé ce lundi un vaste portail sur les valeurs de la République, c’est-à-dire une série de ressources pédagogiques destinées aux enseignants, qui ont été réalisées à notre demande par des chercheurs. Il est important d’avoir ces outils pour éveiller les consciences des élèves. Car les mécanismes qui sont à l’œuvre dans l’antisémitisme et le racisme, nous en connaissons le fonctionnement, c'est toujours le même. Cela commence par du rejet, des insultes d'«apparence banales» et on sait jusqu’où cela peut conduire.

Ne faut-il pas revoir l’enseignement des religions à l’école ?

Dans le cadre des nouveaux programmes, qui entrent en vigueur à la rentrée prochaine, l’enseignement laïc du fait religieux occupe une place plus importante. On abordera les religions et le fait convictionnel (c'est-à-dire y compris la liberté de ne pas croire) de façon apaisée, comme un vecteur de connaissances. L’objectif étant finalement d'aiguiser l'esprit critique des élèves, et, j’espère, d'en finir avec les caricatures et les peurs réciproques. 

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Qu’en est-il de la mixité sociale dans les établissements ?

Sujet essentiel. Il est évident que des élèves qui entendent tous les jours parler de «liberté, égalité, fraternité», mais n’en font pas l’expérience dans leur vie quotidienne, parce qu’ils ne connaissent que des établissements socialement ségrégués et minés par le défaitisme scolaire, développent une grande défiance à l’égard des institutions et de la République. Le système scolaire doit veiller à faire réussir tous les élèves. C'est tout le sens des réformes que nous avons entreprises depuis 2012 et du travail que je fais pour rééquilibrer la composition sociale des établissements. 

Faut-il durcir les sanctions ?

Mes consignes en la matière sont claires : tous les incidents qui se déroulent dans les établissements scolaires doivent faire l’objet d’un traitement sérieux, on ne doit ni occulter ni minimiser. Les équipes enseignantes doivent se savoir soutenues. Nous avons ainsi créé des outils de remontée qui n’existaient pas avant, et qui nous permettent d’avoir des études régulières pour apprécier le climat scolaire dans les établissements, et veiller aux sanctions éducatives qui doivent accompagner chaque fait grave. 

Comment mobiliser les jeunes sur ces questions ?

S'il ne fallait retenir qu'une chose je dirais : leur donner l’exemple. Et trois acteurs me semblent avoir un rôle particulier à jouer en la matière : l'école en traitant équitablement les élèves et en leur donnant les mêmes chances de réussite. Les médias en mettant l'éthique et la responsabilité au cœur de leurs informations. Les responsables politiques en s'interdisant toujours d'ajouter du trouble au trouble, ce qui est bien plus exigeant que de surfer sur les peurs. Il nous faut toujours nous rappeler que des jeunes nous regardent et nous écoutent. Si on ne veut pas qu’eux-mêmes cèdent a la facilité, à la bassesse et à la lâcheté, n'y cédons jamais nous mêmes.

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