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La Poste : une saga française

La Poste est depuis le 23 mars 2010 une société anonyme à capitaux publics[CC/Kathleen Tyler Conklin]

Avec la transformation de La Poste en une société anonyme à capitaux publics le 23 mars 2010, l’institution a tourné une page de son histoire. Elle est aujourd'hui en pleine évolution, confrontée à la montée en puissance irréversible du courrier électronique. Retour sur un amour épistolaire vieux de six cent ans.

 

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La Poste, l’une des institutions auxquelles les Français sont notoirement le plus attachés, n’est pourtant pas si antique que cela. Ainsi, au Moyen Age, il vous aurait été impossible d’envoyer votre carte de vœux au cousin de Vendée, à moins de la transmettre au colporteur du coin, de réquisitionner un crieur public ou d’affréter un messager de l’université. Mais de toute façon, l’année ne commençait pas au 1er janvier à cette époque-là et peu importait d’ailleurs à qui que ce soit qu’on fût à son début, à son milieu ou à sa fin.

Bref, entre la chute de l’Empire romain et 1477, année où Louis XI établit les premiers relais de poste, sauf si vous aviez l’heur de disposer d’une valetaille efficace, vous aviez peu de chance d’établir une relation épistolaire suivie avec la dame de vos pensées. Et quand le bon roy se résout à jeter les bases de l’ancêtre du service public qu’affectionne tant Olivier Besancenot, il ne s’agit alors que de routes provisoires qui aboutissent pour leur majorité aux théâtres d’opérations militaires. La Poste française, ainsi qu’à peu près tout le reste comme le savait Héraclite, est donc d’abord fille de Polemos, c’est-à-dire de la guerre. Ces premiers relais espacés de 28 kilomètres chacun sont aux mains de "tenants postes", qui deviendront plus tard les maîtres de poste.

 

Une lente évolution

Pendant un certain temps, seule la correspondance du roi sera transportée, mais un siècle plus tard quand apparaissent les offices de messagers royaux, spécialisés dans le transport des sacs de procès, on les autorise à prendre en sus les lettres des particuliers. C’est d’ailleurs en cette fin de XVIe siècle que naissent les premiers bureaux de poste.

En 1632, alors qu’est éditée la première carte des routes de poste, on sait qu’il existe 623 relais, très loin encore des 17 000 bureaux actuels, même s’il y a du progrès. En 1653, Renouard de Velayer, conseiller d’Etat, crée des boîtes aux lettres, mais aucune lettre n’arrive à bon port, rapporte Antoine Furetière, premier encyclopédiste de la langue française, dans son Roman bourgeois.

A la fin du XVIIe, quand est créée la ferme générale des postes sous la férule de Louvois, la colonne vertébrale du système moderne est bâtie. Mais il faut attendre 1760 et Claude Humbert Piarron de Chamousset pour qu’apparaisse le facteur de ville, à Paris, suivi bientôt par les grandes villes : Bordeaux, Nantes, Rouen, Nancy, Lyon, Strasbourg, Marseille et Lille.

 

Vidéo : C'est pas sorcier sur La Poste :

 

 

Lorsque la Révolution éclate, les maîtres de poste sont remplacés par des directeurs élus au suffrage universel dans les 1 300 bureaux de France. En 1791, la ferme est supprimée et les postes sont exploitées directement par l’Etat. En 1801, un arrêté du Consulat réaffirme définitivement le monopole d’Etat sur les postes. Trente ans plus tard est enfin mis en place le service rural : les campagnes seront désormais desservies par le personnage du facteur, promis à un illustre avenir, à raison d’une tournée quotidienne à partir de 1832.

Mais jusqu’ici, étrangement, le paiement de la lettre est à la charge du destinataire, qui jouit donc du droit de la refuser. Dix ans après qu’un Anglais a eu l’idée du timbre poste, il apparaît en France, en 1849.

En 1872, la carte postale naît officiellement par une loi de finances et sera mise en vente le 15 janvier 1873. Jusqu’en 1875, elle reste un monopole de l’administration des postes. La carte du nouvel an apparaît, elle, au début du siècle.

Le début du XXe siècle voit l’apparition du transport de courrier par avion. En 1911, Le Français Henri Péquet transporte environ 15 kg de courriers, d’Allahabad à Naini Junction, en Inde (10 kilomètres), dans un avion Sommer. Son vol durera 27 minutes et 6000 lettres furent distribuées. De nombreux pilotes s’illustreront dans l’aventure de l’aéropostale : Joseph Kessel, Antoine de Saint-Exupéry, Mermoz … Dans l’après-guerre, les campagnes sont envahies par les 2CV jaunes des facteurs.

En 1991, La Poste devient un exploitant autonome de droit public, statut qu’elle a conservé jusqu’à 2010, où elle est devenue une société anonyme à capitaux publics, prête à affronter la concurrence. Une page se tourne.

 

Vidéo : La Poste et ses voitures, une longue histoire d'amour : 

 

 

Les étapes du courrier

Première étape, la relève. Chaque jour, les facteurs de La Poste collectent environ 75 millions de plis, grâce aux 135 000 points de collecte, qui sont ensuite acheminés jusqu’à un centre de groupement du courrier, affecté à une ou plusieurs communes. Puis la plate-forme du centre de préparation et de distribution du courrier procède à la double centralisation du courrier des entreprises et de celui des particuliers.

Deuxième étape, le tri et le transport. Une fois triés, les lettres, cartes et colis sont transportées vers leur centre de traitement de destination respectif au moyen de 3 TGV, 13 avions et 460 poids lourds. Pour les envois à destination des autres pays, le courrier transite par Roissy ou Mitry-Mory. Ensuite, c’est l’opérateur postal local qui prend en charge l’acheminement.

Troisième étape, la distribution. Au centre de distribution, les pilotes de production et les facteurs préparent les plis, dans l’ordre de la tournée. La distribution bénéficie de casiers de tri ultra-modernes et ergonomiques. Les 100 000 facteurs de La Poste utilisent 40 800 véhicules pour leurs 70 000 tournées, assurant la livraison quotidienne de 95 millions de documents dans 27 millions de boîtes aux lettres.

 

Les français aiment leur facteur

Le personnage du facteur reste intimement sympathique à la plupart des Français, quoi qu’il arrive, même s’il est en grève. Peut-être parce que ce personnage, vêtu de façon originale donc reconnaissable, incarne le service public, sans avoir en sus les attributs martiaux du policier qui représente l’ordre.

Le facteur rend un pur service, que l’on paie certes, mais à un niveau modeste. De plus, il est le messager. Lourde tâche, symboliquement chargée à travers les siècles, que celle d’Hermès, dieu grec messager des Olympiens qui transmet bonnes et mauvaises nouvelles.

Attendu et redouté à la fois, il représente la nouveauté dans le train-train du quotidien.

En cela, il a endossé aussi le rôle du colporteur aujourd’hui disparu. On le constate entre autres dans Bienvenue chez les Ch’tis, de Dany Boon, où la tournée se transforme en une cuite mémorable. Le facteur François dans Jour de fête de Jacques Tati joue aussi un rôle central dans la folie qui s’empare du village.

 

Vidéo : Jour de fête de Jacques Tati (1949)

 

 

Dans la réalité, ce messager peut être aussi mystérieux quand il se nomme Ferdinand Cheval et bâtit, solitaire, un palais idéal dans son jardin, à partir des pierres ramassées sur les chemins, lors de ses tournées. On n’oubliera pas non plus Angelo Thiburce qui faisait des tournées à pied de quatre jours et demi (soit 120km) sur l’île de La Réunion ou Olivier Besancenot qui rêve de révolution entre deux tournées à Neuilly-sur-Seine.

 

(ARCHIVE)

 

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