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On a visité l'exposition Léonard de Vinci au Louvre

Depuis des mois, voire des années, l'exposition sur Leonard de Vinci est annoncée au musée du Louvre. Après bien des rebondissements quant à la venue de certaines oeuvres, cet incroyable événement s'apprête à ouvrir ses portes au public, dès ce jeudi 24 octobre.

On peut aimer ou détester la Renaissance italienne, être plus ou moins sensibles aux tableaux de Leonard de Vinci (1452-1519) et ses inventions étonnantes, revêtir la blouse de specialiste du grand maître italien comme ne connaître que «La Joconde» de loin, une chose est certaine : il faut prendre ses billets pour cette visite, absolument exceptionnelle par la rareté de tant de chefs d'oeuvres réunis au même endroit, et pour la compréhension jubilatoire du génie le plus étudié de tous les temps.

Le parcours d'un peintre

Tout commence par une sculpture imposante signée... Andrea del Verrochio. Et Léonard, alors ? Etonnant choix que d'accueillir le visiteur avec une statue imposante de ce maître de la sculpture du XVe siècle. Très vite, cette décision fait sens. L'exposition se veut organisée selon quelques clés de compréhension chronologiques du travail de Léonard de Vinci.

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«Le Christ et Saint Thomas» ou «L'incrédulité de Saint Thomas» © Virginie Jannière

A seulement douze ans, en 1464, Leonard de Vinci devient l'élève de Verrochio. Mais s'il tire de nombreux enseignements de son maître, le jeune Leonard, impressionné par les maîtres flamands et attiré par la forme, se tourne naturellement vers le dessin et la peinture, recherchant inlassablement la perfection au sein d'une liberté créatrice folle. Car c'est le parcours incroyable de Léonard de Vinci qui donne à voir l'évolution de son art.

«Nous voulons montrer que Léonard n’est pas un ovni, c’est quelqu’un qui a aussi beaucoup regardé ses contemporains, qui a repris leurs meilleurs idées pour les faire siennes puis a développé son propre génie. Donc on tenait beaucoup aux œuvres de ses contemporains», explique Vincent Delieuvin, conservateur en chef du Patrimoine et l'un des deux commissaires de l'exposition (avec Louis Franck). De Florence à Milan, le jeune homme ne cesse de dessiner et de peindre afin de traduire le mouvement. L'exposition permet ainsi de (re)découvrir la très touchante étude pour la «Madone Benois» ou Le «Saint Jérôme».

Vient sa période milanaise et avec elle, quelques uns de ses plus grands chefs d'oeuvre réunis ici, comme «La Vierge aux rochers», «Le Musicien» ou encore la «Belle Ferronnière». Ces tableaux marquent ainsi le goût de Leonard de Vinci pour l'inachèvement, technique nécessaire et novatrice afin de rendre compte de ce mouvement.

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Léonard de Vinci, Portrait d’une dame de la cour de Milan, dit à tort La Belle Ferronnière © RMN-Grand Palais (musée du Louvre)_Michel Urtado

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De gauche à droite : «La Vierge aux Rochers», «Le Musicien» puis «La Belle Ferronnière» © Virginie Jannière

Parmi les quelques 160 oeuvres rassemblées au sein de l'exposition – dont 11 peintures si on compte La Joconde restée dans sa salle habituelle –, l'exposition donne à voir notamment ses travaux scientifiques, réunis dans la salle où trône la célèbrissime «Cène» (ici, la plus ancienne des copies encore existante) et où devrait être installé «L'homme de Vitruve». Ce dernier, se faisant encore désirer jusqu'à la dernière minute, ne devrait être exposé que durant deux mois pour des raisons de conservation.

Joie d'une scénographie impeccable, les nombreux travaux, études astrologiques, anatomiques, botaniques ou encore mathématiques, – Bill Gates et la reine d'Angleterre ont prêté respectivement oeuvres et manuscrits pour l'occasion ! – sont installés pour la plupart sur des plans inclinés, donnant ainsi l'impression de rentrer de plain-pied dans l'atelier du génie.

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Léonard de Vinci, Étoile de Bethléem, Anémone des bois, Euphorbe Petite Éclaire © Royal Collection Trust  © Her Majesty Queen Elizabeth II 2019

Après dix ans de lectures, de recherches et de voyages, les deux commissaires de l'exposition se montrent très émus du résultat. «On connaît les dessins, les tableaux de Léonard de Vinci, explique Vincent Delieuvin. De les voir réunis, on a l'impression d'avoir redonné vie à l'atelier de Léonard en mettant côte à côte des dessins et des tableaux qui le furent en leur temps».

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La salle consacrée à la science ©Virginie Jannière

Un art en évolution permanente

Mais c'est surtout à travers les études dessinées (et très nombreuses) du maître – le visage de l'ange de «La Vierge aux rochers» ici, une étude de mains par là – que l'émotion jaillit instantanément.

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Étude de figure pour l’ange de la Vierge aux rochers - Musei Reali - Biblioteca Reale di Torino © Virginie Jannière

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Léonard de Vinci, Étude de mains © Royal Collection Trust  © Her Majesty Queen Elizabeth II 2019

Léonard de Vinci n'aurait peint finalement que très peu de tableaux mais aurait passé à chaque fois des années à les remanier, à rechercher la pose et l'expression juste, par le biais de dessins et d'études inombrables, mais aussi en effaçant et en retraçant inlassablement, faisant de ses plus grands travaux des oeuvres, par essence, inachevées.

Dans cet esprit, les organisateurs de l'exposition ont pensé à montrer les hésitations et les repentirs sur certaines oeuvres grâce à la technique de la reflectographie infrarouge. On découvre ainsi ce que nos yeux ne peuvent deviner : des enfants présents au loin derrière «La Vierge au dévidoir» ou encore la fameuse technique du «Sfumato» pour atténuer les contours et jouer avec les ombres pour le «Saint Jean Baptiste» ou «La Joconde».

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L'ange de «La vierge aux rochers». Grâce à la reflectologie infrarouge, on peut voir que sa main a été ajoutée © Virginie Jannière

Le clou de l'exposition ? Difficile de choisir au milieu de tant de beautés même si le visage d'Anne et sa tendresse infinie rivalise avec les boucles évanescentes de «La Scapigliata» et la délicatesse émouvante des études de mains au charbon de bois.

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Léonard de Vinci, Tête de femme dite  La Scapigliata © Licensed by Ministero dei Beni e delle Attività culturali - Complesso Monumentale della Pilotta-Galleria Nazionale

au plus près de «la Joconde», une expérience en réalité virtuelle

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Juste avant la sortie de l'exposition, une pièce est réservée à l'expérience de «La Joconde» en réalité virtuelle ©Virginie Jannière

Certains y verront un petit plus, d'autres la cerise sur un gâteau déjà bien gourmand. A l'issue de l'exposition, il ne faut en tout cas pas rater l'expérience de réalité virtuelle proposée par HTC Vive Arts, permettant de découvrir le tableau de «La Joconde» de plus près. Le tableau est resté dans sa salle pour des raisons de conservation et certainement d'affluence.

Avec «En tête-à-tête avec la Joconde», le visiteur peut découvrir le célèbre tableau comme on ne le voit jamais, retourner le cadre et y repérer la fissure du bois, découvrir les couleurs d'origine du portrait ou la véritable coiffure de La Joconde, mais aussi comprendre les craquelures, la technique du «Sfumato» et même balader son regard dans le patio où la dame a posé.

Enfin, le public a la possibilité de voler sur l'une des machines imaginées par le maître italien au-dessus du paysage qu'il a peint. Un moment d'une poésie rare qui clôt en beauté une exposition qui ne peut qu'émouvoir le plus fermé des visiteurs.

«On a un mythe en tête, des images de peintures et de dessins, mais derrière ces images, il y a des oeuvres d'art qui ont une puissance, une émotion en elles éblouissantes, témoigne Vincent Delieuvin. Je crois qu'on ne sort pas indemne de cette visite». On confirme.

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