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Le Pass Culture, outil de relance d'un secteur durement touché

Promesse d’Emmanuel Macron apparue dès 2017 lors de la campagne présidentielle, le Pass Culture est devenu réalité en juillet 2019, sous la forme d’une application. Elle permet aux jeunes âgés de 18 ans d’utiliser jusqu’à 500 euros, pendant 24 mois, pour avoir accès à une offre culturelle et artistique de proximité. Si les différents confinements et couvre-feux ont logiquement réduits – temporairement - sa portée, le dispositif pourrait désormais devenir un véritable outil de relance du secteur de la culture.

Livres, concerts, théâtres, musées, abonnements numériques ou encore cours, entre autres, de musique, l’offre proposée sur la plate-forme se veut variée, et mise sur les réseaux de proximité puisque l’inscription au dispositif implique la géolocalisation du bénéficiaire. A l’heure actuelle, le Pass Culture – qui recouvre une mission de service public – est encore dans sa phase d’expérimentation, avec 14 départements concernés, pour 135.000 personnes éligibles. Alors que le montant du budget global annuel alloué à ce dispositif est toujours en discussion, le Sénat a très récemment décidé de lui retirer 25 millions d’euros contre l'avis du Gouvernement, soit près de la moitié de son enveloppe pour 2021 (5 millions en 2018, 29 en 2019, et 39 en 2020). Un souhait des sénateurs qui ne devrait toutefois pas résister à la navette parlementaire, l’Assemblée nationale allant selon toute probabilité rétablir le montant initialement prévu pour préparer la généralisation du dispositif.

Le livre, grand gagnant de l’offre culturelle

Surtout, malgré la situation sanitaire, qui a touché de plein fouet ce secteur, et a nécessairement réduit les possibilités d’offres auprès des jeunes, les tout derniers chiffres se veulent encourageant. Les craintes étaient pourtant multiples : une ruée vers l’offre numérique plutôt que physique (même si le confinement a réduit cette tendance), et une adhésion plutôt du côté des populations jeunes dont l’accès à la culture est déjà favorisé par le milieu social ou géographique. 

«Les 14 départements bénéficiaires ont été choisis pour tester le Pass dans des configurations très différentes, urbaines comme rurales, en banlieue comme en province, ainsi qu’en outremer avec la Guyane », explique ainsi Damien Cuier, président de la société Pass Culture, «75 à 80% des jeunes inscrits font de la réservation physique, et nous avons été surpris que sur les 550.000 réservations, plus de la moitié concerne des livres à retirer en librairie, devant la musique et l’audiovisuel». Certaines pratiques culturelles, comme le théâtre, les musées ou la presse, doivent encore progresser, et confirment les résultats des différentes enquêtes sur les pratiques culturelles des Français, et les grandes différences d’usage selon les générations.

Plus de la moitié des réservations concerne des livres à retirer en librairie.Damien Cuier, président de la société Pass Culture

Certaines données restent encourageantes : 24 heures après le premier confinement du mois de mars, l’utilisation est passée logiquement à 95% en numérique. Mais dès le samedi 28 novembre, date d’allègement du second confinement, 140% de réservations supplémentaires, principalement pour des livres et des pratiques artistiques, ont été constatées.

Une réévaluation du dispositif ?

Les doutes quant à l’efficacité du dispositif, à l’image du débat qui s’est déroulé au Sénat la semaine passée, sont toujours présents. Si 120.000 jeunes sur les 135.000 éligibles ont désormais fait au moins une demande via l’application – soit un taux d’inscription de 88 % - , et 649 000 réservations ont été effectuées depuis février 2019, ils n’ont dépensé que 131 euros pour 6 achats en moyenne. Un chiffre qui doit toutefois être relativisé puisqu'il a été calculé sur 9 mois d'utilisation quand les jeunes ont 24 mois pour utiliser tout leur crédit. De quoi imaginer une autre formule au moment de l’instauration du Pass Culture sur tout le territoire, qui devrait alors concerner jusqu’à 810.000 jeunes. « Au moment de la généralisation du système, le montant alloué sera sans doute inférieur à celui de 500€, on se situera plutôt aux alentours de 300 euros, car ces crédits sont en effet rarement dépensés dans leur intégralité», concède Damien Cuier. 

Transformer le Pass Culture en outil de relance du secteur

Reste que la pandémie qui a touché tout particulièrement le secteur de la culture, et a fortiori celui de l’art vivant, avec de nombreux domaines qui ne pourront survivre que grâce à des aides ou subventions sous peine de disparaître, pourrait bien offrir au Pass Culture une légitimité inattendue lors de sa généralisation. Il pourrait ainsi devenir un véritable outil de relance du secteur, notamment grâce à son principe de géolocalisation, qui permettrait de cibler les secteurs particulièrement à la peine et les acteurs culturels de proximité, par le biais d’une mise en valeur améliorée sur l’application utilisée. C’est en tout cas l’un des arguments avancés par la ministre de la Culture Roselyne Bachelot lors du débat parlementaire : « le pass Culture a participé à la relance du secteur culturel. On ne peut pas parler de crédits perdus pour la culture », a-t-elle ainsi relevée.

Pour prendre l’exemple des librairies, considérées à leur grand désespoir comme des commerces non essentiels lors du deuxième confinement, elles ont bénéficié de la mise en valeur du Clic and Collect sur le site du Pass Culture. En tête des catégories proposées par le dispositif, la commande de livres se fait à 95 % en «physique».

Lorsque les salles de cinéma et de spectacle pourront rouvrir, pas avant le 7 janvier 2021 depuis les dernières annonces du Gouvernement, le Pass pourrait «se tranformer en canal de distribution supplémentaire, et devenir un outil d’accompagnement des acteurs culturels, en facilitant notamment le report des réservations faites avant le confinement», précise Damien Cuier. Autre revendication des détracteurs du dispositif, sur laquelle travaillent les acteurs du Pass Culture, la diversification des publics touchés. Les utilisateurs ont ainsi été à 91% des étudiants ou lycéens, contre 9% seulement des actifs, apprentis, ou demandeurs d'emplois. C'est un des aspects sur lequel les équipes du Pass travaillent en priorité, à travers notamment des partenariats avec le service civique, les écoles de la 2eme chance et Eloquentia, un programme visant à développer l'aisance à l'oral.

«Il faut éditorialiser encore l’offre, pour que tous les secteurs et acteurs de la culture en bénéficient, et faire coup double en permettant à d’autres publics de participer à la relance, eux qui bien souvent considèrent que la culture ne leur est pas, socialement, accessible», concède le président du Pass Culture. «Le nombre d’offreurs culturels a été multiplié par trois en un an, et nous poussont pour que soit mis en avant sur l’appli les événements spéciaux, inédits, les rencontres avec les artistes, les séances de dédicaces, et tout ce qui peut être au plus près des goûts de ce public».

Avec, in fine, l’idée de consolider les habitudes prises pendant ces 24 mois par les jeunes utilisateurs, et les faire perdurer tout au long de leur vie future.

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