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Festival de Cannes 2024 : après avoir fui clandestinement l'Iran, le réalisateur Mohammad Rasoulof présente en personne son film

La présence de Mohammad Rasoulof à Cannes indispose la presse iranienne. [Sarah Meyssonnier/REUTERS]

Après avoir réussi à fuir clandestinement l’Iran, le cinéaste iranien Mohammad Rasoulof vient ce vendredi en personne défendre à Cannes son film «Les Graines du figuier sauvage», en lice pour la Palme d'or.

Ce vendredi, en accueillant en personne le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof, le 77e Festival envoie un signal «à tous les artistes qui, dans le monde, subissent violences et représailles dans l'expression de leur art», a souligné le délégué général du festival de Cannes, Thierry Frémaux, à l'AFP.

Après avoir bravé pendant des années la censure, le réalisateur, qui a récemment été condamné en appel à huit ans de prison dont cinq applicables et s'est vu privé de passeport pour «collusion contre la sécurité nationale» - en d’autres terme pour avoir réalisé des films et publié des déclarations hostiles à la République islamique - a dû se résoudre à fuir. «Je devais choisir entre la prison et quitter l'Iran. Le cœur lourd, j'ai choisi l'exil», a-t-il expliqué. Sa fuite a été clandestine, au prix d'un périlleux voyage à travers les montagnes pour passer la frontière à pied. 

Arrivé sain et sauf en Allemagne où il a trouvé refuge, il a expliqué avoir pu garder secrets «l'identité des acteurs et de l'équipe, ainsi que les détails de l'intrigue et du scénario». Certains acteurs «ont réussi à quitter l'Iran» à temps, se réjouit-il. Mais de nombreux autres membres de l'équipe y sont toujours s'inquiète-t-il, «et les services de renseignement font pression sur eux. Ils ont subi de longs interrogatoires. Les familles de certains d'entre eux ont été convoquées et menacées».

Amnesty International affirme que l'Iran, pays où les conservateurs concentrent tous les pouvoirs, et où les cinéastes sont régulièrement accusés de propagande contre le régime, a notamment exécuté 853 personnes en 2023, le nombre le plus élevé depuis 2015. 

La presse iranienne indignée

Courrier International note que la presse iranienne est indignée par la présence du cinéaste à Cannes. «Rasoulof, ce cinéaste pro-occidental dont les films amers montrent un Iran plongé dans la noirceur, a tourné le dos à son pays pour devenir le favori du festival politico-cinématographique de Cannes», a notamment réagi Iran Newspaper, qui lui reproche à travers ses documentaires et ses films, de «directement et indirectement attaquer et humilier la République islamique avec son regard destructeur», peut-on encore lire dans la publication gouvernementale, qui ajoute : «Les festivals et cérémonies comme Cannes et les Oscars sont soutenus financièrement et politiquement par les dirigeants de leur pays, et ils n’adressent de louanges qu’aux films et cinéastes qui servent les objectifs de ces derniers».

Courrier International relève aussi une déclaration dans Hamshahri, organe de la mairie de Téhéran : «Il semble que nous assistions à une série d’événements prévus pour lui assurer la Palme d’or», comparant Rasoulof au cinéaste turc Yilmaz Güney (1937-1984) qui avait été sacré à Cannes, en 1982, pour son film «Yol».

Et le nouveau film de Mohammad Rasoulof, «Les Graines du figuier sauvage», promet de déranger encore le pouvoir, racontant l'histoire d'un juge d'instruction sombrant dans la paranoïa, au moment où d'immenses manifestations éclatent dans la capitale Téhéran. 

La dernière fois que Mohammad Rasoulof était venu à Cannes, c’était en 2017. Il avait cette année-là reçu le prix Un certain regard pour «Un homme intègre», un long métrage qui dénonçait la corruption. Le réalisateur, lauréat notamment d’un Ours d’Or en 2020, avait déjà remporté le Prix de la mise en scène en sélection Un certain regard, en 2011.

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