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La semaine de Philippe Labro : la consécration de 2015, les ruptures de l’an XV

Philippe Labro, écrivain, cinéaste et journaliste.[THOMAS VOLAIRE]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

 

DIMANCHE 1er FÉVRIER

Entre 17 et 19 heures, à peu près, nous nous retrouvons (de 9 à 12 millions de gens) agglutinés devant la télévision pour voir la France remporter son cinquième titre de champion du monde de handball – au Qatar. Finale étrange, avec cette équipe qatarie composée de façon artificielle, quasi indécente, des mercenaires achetés un peu partout et qui, soudain, se découvrent une âme qatarie.

Comme si, en l’espace de quelques saisons, ces Espagnols, Bosniens, Français, Iraniens, Syriens, Cubains pouvaient sincèrement intégrer l’idée qu’ils appartiennent à une autre nation ! Passons. Et accueillons et approuvons la lucidité du «coach» français, Claude Onesta, qui déclara, une fois la partie remportée : «Je ne dis pas que l’honneur est sauf, mais que peut-être, effectivement, pour la symbolique, c’était mieux que ce soit nous qui gagnions

Onesta, figure typique de ce qu’on fait de mieux dans le monde du sport : carré, costaud, calme, enthousiaste, mais sachant maîtriser ses humeurs, sachant cimenter une équipe, sachant prolonger un héritage, capable de dire clairement de telles évidences. N’en rajoutant pas trop, mais appelant un chat un chat et fustigeant le «grand bazar des passeports temporaires».

Au cours des deux périodes, on a un peu tremblé, quand même, pour les «extraterrestres». Mais nous n’étions pas dans leur peau, ni dans leur tête. Pour eux, pour le gardien Omeyer comme le demi-centre Nikola Karabatic, il n’y eut jamais de doute. Non que ces athlètes aient fait preuve d’arrogance, mais ils possédaient, me semble-t-il, la certitude d’avoir engrangé suffisamment de victoires et d’expériences, pour savoir, au plus profond d’eux-mêmes, que le trophée ne pouvait leur échapper.

Ces hommes encore jeunes (ils ont entre 25 et 38 ans) ont affiché des qualités et des vertus que des millions de gens attendent, souhaitent, pour conclure qu’au fond, de tels comportements peuvent servir d’exemple à un pays qui vit et observe un début d’année fort en surprises tragiques, événements inattendus, dans un climat de rupture.

 

LUNDI 2, MARDI 3 ET MERCREDI 4 FÉVRIER

Le terme «rupture» revient fréquemment à la suite du résultat du premier tour de la législative partielle dans le Doubs. On assiste à des valses hésitations, querelles internes, fragmentations de solidarité au sein du même parti – l’UMP – tandis que, benoîtement, le PS, trop heureux d’être présent au second tour, et le FN, trop satisfait d’avoir enregistré son succès, se frottent les mains en suivant ce qui se passe au sein de la droite.

Si le mot «rupture» est trop fort, optons pour «fissure». Mais j’ai utilisé ce terme car il constitue le sous-titre de 1515, un ouvrage de Jacky Lorette, qui paraît aux éditions de l’Archipel. On a déjà émis l’idée selon laquelle il existe une fatalité qui pèse sur l’an XV des siècles : en général, un événement majeur se produirait toujours à la charnière des années 14 et 15. C’est la thèse de deux autres auteurs (chez le même éditeur), Lecherbonnier et Cosseron, des historiens qui ont étudié Marignan en 1515, Waterloo en 1815, le début de la Première Guerre mondiale en 1914, etc. Lorette, pour revenir à lui, illustre ce passionnant thème : en l’an 1515, en religion, en économie, en découvertes de territoires, tout fut rupture.

Faut-il croire que 2015 va nous imposer une autre vision du monde ? Une simple élection partielle ne peut guère renverser l’ordre des choses. Mais il va falloir qu’hommes politiques de tous bords prêtent attention à ce chiffre 15. Les pessimistes – ils sont trop nombreux – opteront pour le désordre. Les optimistes vous diront que de toute rupture peut naître une chance.

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