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Une haine au quotidien

Après deux années consécutives de baisse, les actes antisémites ont augmenté de 74 % en 2018, selon l'Intérieur. Après deux années consécutives de baisse, les actes antisémites ont augmenté de 74 % en 2018, selon l'Intérieur. [© SEBASTIEN BOZON / AFP]

Pas un jour ne passe sans. Alors que les violences visant des communautés se succèdent, le constat est sans appel : la haine gagne du terrain dans l’Hexagone, aussi bien dans les actes que dans les esprits.

Prenant pour cible l’ensemble des minorités sans distinction (religieuses, sexuelles...), elle s’affiche de manière de plus en plus décomplexée, et souvent avec un sentiment d’impunité quasi-total. Un climat qui traduit un phénomène de banalisation des violences.

Des haines plurielles

Le «poison» de l’antisémitisme, selon les mots du ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, est celui qui a le plus ressurgi ces derniers jours. Portraits de Simone Veil recouverts de croix gammées, le mot «Juden» (juif en allemand) sur un magasin, arbres en hommage à Ilan Halimi sciés, symboles néonazis sur la permanence d’un député... Un véritable déferlement de vandalisme contre la communauté juive. Mais elle n’est pas la seule concernée : la semaine dernière, cinq églises du pays ont subi des dégradations, poussant le parti LR à évoquer une «christianophobie».

Au-delà des cultes, l’orientation sexuelle est aussi cible de haine. Les agressions contre les gays (verbales, physiques...) se sont ainsi multipliées ces derniers mois, à tel point qu’il y en a désormais une toutes les 33 heures, selon l’Intérieur. Dernier exemple en date, la vague d’insultes dont a fait l’objet le chanteur Bilal Hassani, représentant de la France à l’Eurovision.

Sans compter les sorties racistes qui ont émaillé les manifestations de gilets jaunes – malgré eux – ces derniers mois, ou plus récemment, le sexisme des membres de la «Ligue du LOL» sur Facebook. Mercredi, une inscription dans une rame de RER a même illustré tous les visages de la haine, en qualifiant le champion du monde Kylian Mbappé d’«enculé de nègre enjuivé».

«Il y a souvent un lien entre ces différents préjugés : un antisémite risque d’être aussi homophobe», note Nonna Mayer, directrice de recherche au CNRS. Pour elle, le contexte actuel favorise cette résurgence de la haine : «Le fort sentiment d’insécurité économique et de défiance vis-à-vis des politiques et des institutions est un climat idéal pour désigner un bouc émissaire.» Ce qui expliquerait que la fronde des gilets jaunes, dirigée contre les élites, soit «propice au défouloir» des extrémistes. Et d’autant plus lorsque les réseaux sociaux garantissent l’entre-soi et l’anonymat.

La difficile réponse de l’Etat

Face à ce fléau du quotidien, l’Etat tente de trouver la parade. Une mission ardue, alors que la plupart des auteurs d’actes haineux, que ce soit dans la «vraie vie» ou en ligne, ne sont jamais condamnés, car jamais retrouvés. Un climat qui n’est pas propre à la France : les actes haineux ont augmenté de plus de 66 % en Italie en 2018, et de 50 % aux Etats-Unis, au-delà même de la hausse en France.

Les choses pourraient néanmoins changer pour les internautes français : après la loi anti-fake news, le Premier ministre, Edouard Philippe, a annoncé mardi une loi «avant l’été» pour réguler les contenus sur les réseaux sociaux.

Mais c’est d’abord en combattant le mal à la racine que l’Etat entend agir, via l’éducation scolaire et la transmission des valeurs républicaines (drapeaux, hymne...), mais également la prévention, l’accompagnement des victimes, ou des actions de lutte dans différents champs de la société (associations, sport, médias...).

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