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Préoccupation majeure des Français, les déserts médicaux s'invitent dans la campagne

La pénurie de médecins traitants est toujours un problème dans de nombreux territoires. [PHILIPPE HUGUEN / AFP]

Véritable serpent de mer, la question des déserts médicaux revient dans le débat politique à l'occasion de l'élection présidentielle. Si les initiatives se multiplient, aucune n'a jusqu'ici permis d'endiguer le phénomène. Les candidats sont attendus au tournant par les citoyens et les élus locaux.

L'accès au soin est une préoccupation quotidienne pour de nombreux Français. Pas une semaine ne passe sans que la presse locale ne se fasse l'écho du départ en retraite de l'unique médecin d'un village, laissant derrière lui toute une patientèle sans remplaçant. 

Si le phénomène n'est pas nouveau, il semble s'accélérer. Selon l'Association des maires de France (AMF), 7,4 millions de Français vivaient dans un désert médical en 2019, contre 5,7 millions en 2016.

Dans ces territoires, les médecins traitants ne prennent plus de nouveaux patients, les délais d'attente pour consulter un spécialiste s'allongent (jusqu'à un an pour un rendez-vous chez un ophtalmologiste ou un gynécologue) et les services d'urgences sont engorgés par des malades n'ayant pas trouvé de consultations «classiques». 

De graves inégalités d'accès aux soins

Le problème se pose aussi pour l'hôpital. En moyenne, les habitants de zone rurale consomment 20% de soins hospitaliers de moins que ceux des villes et un Français sur dix vit à plus de 30 minutes d'un service d'urgence. Une inégalité qui peut avoir des conséquences lourdes, notamment pour les patients les plus fragiles.

Comme le montre la carte ci-dessous (disponible en version interactive ici), les déserts médicaux se concentrent dans le centre du pays, principalement dans les régions Centre Val-de-Loire et Ile-de-France.

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«Alors que la population augmente, et notamment celle des personnes âgées, la croissance du nombre de médecins ne permet plus de suivre la demande et l’on assiste à une stagnation de la densité médicale à partir des années 2000», explique le chercheur Emmanuel Vigneron dans une note de l'Association des maires ruraux de France (AMRF). 

Un bilan en demi-teinte pour l'exécutif

Outre le manque de médecins, la perte d'attractivité de la vie rurale semble aussi en cause. «On observe une tendance à la concentration des jeunes médecins dans les départements urbains», souligne l'AMRF. Un constat partagé par l'exécutif. «La vie du médecin de campagne des romans français n'est plus celle que veulent vivre les nouvelles générations», a reconnu Emmanuel Macron lors de son déplacement dans la Creuse.

A quelques mois de l'élection présidentielle, le gouvernement vante le bilan de sa stratégie «Ma Santé 2022». Mais sur le terrain, les résultats peinent à se faire sentir.

La suppression du numerus clausus (qui plafonnait le nombre d'admis en étude de médecine) ne fera effet qu'à l'horizon 2030 et les maisons de santé pluridisciplinaires, doublées sous le quinquennat Macron, n'attirent pas autant de médecins que prévu. Quant au déploiement des stages d’internes en médecine dans les zones rurales sous denses, il reste peu effectif, faute de caractère d’obligation.

La liberté d'installation des médecins, toujours un tabou

Jusqu'ici, les politiques entreprises par les collectivités pour attirer les médecins en zone rurale relèvent de l'«aide à l'installation» : logement offert, aide à la recherche d'emploi pour le conjoint, prime d'installation, salariat... Des mesures d'appoint qui ne s'attaquent pas à ce qui est, aux yeux de certains, le nœud du problème : la liberté d'installation des médecins.

Honnie par les syndicats, la régulation demeure un tabou pour tout un pan de la classe politique. Dernier exemple en date, la proposition du député mayennais Guillaume Garot (PS) d'empêcher les médecins de s’installer dans les zones déjà suffisamment dotées a été largement rejetée à l'Assemblée nationale. 

Devant l'impasse, l'AMRF et d'autres associations ont interpellé les candidats sur la question de l'accès au soin, qualifiée de «bombe à retardement». Un appel reçu cinq sur cinq par les prétendants à l'Elysée.

les candidats multiplient les propositions

A gauche, la socialiste Anne Hidalgo souhaite créer un statut de «médecin assistant» assurant aux internes en dernière année déployés dans des «territoires en tension» une rémunération «équivalente au double d’aujourd’hui, soit environ 3.500 euros par mois». Plus radical, Jean-Luc Mélenchon propose que les «étudiants en médecine soient pris en charge par l'Etat» avant de devoir «dix années à l'Etat, sans possibilité de les racheter».

Egalement favorable à la régulation, Fabien Roussel estime quant à lui «que dans les zones denses, un médecin ne doit s'installer que pour remplacer un départ». Il est également pour l'ouverture d'«hôpitaux de proximité».

La candidate LR Valérie Pécresse préconise elle de créer une quatrième année d’internat en médecine générale pour envoyer des «docteurs junior» exercer leur stage en zone sous-dotée. Encore peu précise sur le sujet, Marine Le Pen, la candidate du Rassemblement national, a proposé des «incitations financières fortes» et une rémunération «modulée selon le lieu d’installation».

De son côté, Eric Zemmour propose que l'Etat «embauche en urgence 1.000 médecins». Le candidat défend aussi le rétablissement des «obligations de garde» pour les médecins libéraux afin d'«alléger» les urgences.

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