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Affaire Jacquie et Michel : Canal+ suspend la diffusion de la chaîne pornographique

Le 22 février dernier, le collectif Les Amazones avait manifesté devant un sex shop Jacquie et Michel pour dénoncer la condition des femmes dans l’industrie du porno.[JULIEN DE ROSA / AFP]

Suite à la mise en examen pour complicité de viol vendredi du propriétaire du site pornographique Jacquie et Michel, le groupe Canal+ a annoncé ce lundi avoir suspendu la diffusion de la chaîne du même nom.

Une suspension immédiate. Canal+ a décidé de suspendre la chaîne Jacquie et Michel suite à la mise en examen vendredi du propriétaire du site pornographique.

«Compte tenu des éléments d'actualité concernant le groupe éditant la chaîne Jacquie et Michel TV et dans l'attente d'informations complémentaires, le groupe Canal+ a décidé d'en suspendre la diffusion», a indiqué ce dernier dans un communiqué diffusé ce mardi. «Cette suspension est effective en France depuis vendredi 17 juin», y est-il précisé.

Incluse dans l'offre la plus complète (Intégrale+) et intégrée au sein d'un pack de chaînes pour adultes à 18 euros par mois, «Jacquie et Michel TV» était également disponible en option seule à 6 euros par mois.

Viol et traite d'être humain en bande organisée

Michel Piron, 64 ans, propriétaire de Jacquie et Michel, a été interpellé mardi avec son épouse et trois autres hommes, et mis en examen à l'issue de 72 heures de garde à vue pour complicité de viol et traite d'être humain en bande organisée.

Il a été placé sous contrôle judiciaire et a donc pu ressortir libre du tribunal, alors que le parquet avait requis son placement en détention provisoire, a constaté l'AFP lors d'une audience publique devant le juge des libertés et de la détention.

Les trois autres hommes - un ancien acteur et deux anciens réalisateurs - ont également été mis en examen dans ce dossier, pour viols, complicité de viol, proxénétisme en bande organisée et traite d'être humain en bande organisée. L'un d'eux est aussi poursuivi pour complicité de viol avec acte de torture et de barbarie. Il a été placé en détention provisoire.

L'épouse de M. Piron, Araceli, a elle été placée sous le statut intermédiaire de témoin assisté, et est donc ressortie libre vendredi du tribunal judiciaire de Paris.

Démission de Michel Piron

«L'infraction de proxénétisme n'a pas été retenue à son encontre», a déclaré l'avocat de Michel Piron qui a annoncé par ailleurs que son client avait décidé de quitter le groupe le temps de cette procédure.

«Le groupe Jacquie et Michel acquiert et diffuse des milliers de vidéos par an réalisées par des producteurs indépendants et regrette profondément que 7 scènes litigieuses aient pu être tournées parmi celles-ci, sur les 20 dernières années», a-t-il avancé.

Devant le juge des libertés et de la détention, la représentante du ministère public a quant à elle décrit tout un «système de proxénétisme et de traite des êtres humains», avec des «femmes démolies».

«On les entraîne dans un piège», a-t-elle déclaré, dénonçant un «mode opératoire qui enferre les victimes dans ce système».

«L'impunité des pornocriminels se fissure et la justice écoute enfin les victimes. C'est toute l'industrie pornographique qui est dorénavant face à la justice : acteurs, rabatteurs, producteurs, réalisateurs, diffuseurs constituent un véritable système proxénète et criminel», a écrit l'association Osez le Féminisme, qui se réjouit de cette mise en examen.

«Le 'porno amateur' est un vaste mensonge. Seul existe un système de proxénétisme organisé. Les pénétrations sexuelles obtenues sous contrainte, les violences sexuelles et les actes de torture infligés, les manipulations commises contre des femmes rabattues et piégées, les diffusions incontrôlées des vidéos sont la norme de cette industrie criminelle», selon l'association féministe.

En juillet 2020, le parquet avait ouvert une enquête confiée à la police judiciaire parisienne, après un signalement adressé par les associations Osez le féminisme, les Effronté-es et le mouvement du Nid qui relayaient les témoignages de plusieurs actrices assurant avoir été contraintes à des «pratiques sexuelles ‘hors normes et douloureuses’», alors qu'elles n'étaient pas consentantes.

Ce signalement avait suivi la diffusion en février par le site Konbini d'une vidéo intitulée «les coulisses sordides du porno amateur», dans laquelle deux femmes témoignaient de ces pratiques.

Dans un livre-enquête intitulé «Judy, Lola, Sofia et moi» (Ed. Goutte d'Or, 2018), le journaliste Robin d'Angelo avait raconté son infiltration dans l'industrie du porno amateur et dénoncé lui aussi l'absence récurrente de consentement ainsi que le non-respect du droit du travail.

Le groupe Jacquie et Michel annonçait 15 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2016, selon le journaliste, et a fondé son succès sur l'achat à petits prix de vidéos amateur en France, avant de professionnaliser peu à peu sa production pour en venir à concurrencer désormais Dorcel parmi les leaders de l'industrie pornographique.

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