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Rue Erlanger : le procès de l’incendie mortel s’ouvre ce lundi

A partir de ce lundi 6 février et pendant trois semaines, l'incendiaire présumée de la Rue Erlanger, suspectée d'avoir causé la mort de dix personnes il y a quatre ans, doit être jugée devant la cour d'assises de Paris.

Dans la nuit du 4 au 5 février 2019, les pompiers se sont battus contre les flammes pendant six heures, rue Erlanger, à Paris. Dix personnes ont perdu la vie et des dizaines d'autres ont été blessées lors de cet incendie d'habitation, parmi les plus meurtriers en France ces dix dernières années. A partir de ce lundi 6 février, l'incendiaire présumée est jugée devant la cour d'assises.

Au moment des faits, Essia Boularès, 44 ans, avait été interpellée en état d'ébriété à proximité de cet immeuble du 16e arrondissement de la capitale. Elle avait d'abord nié les faits, avant de les reconnaître en fin d'instruction.

Atteinte d'importants troubles psychiatriques, elle est suspectée d'avoir mis le feu au deuxième étage de son immeuble après un différend avec son voisin, qui lui reprochait d'écouter de la musique à plein volume. Quelques minutes avant le départ du feu, ce soir-là, les policiers avaient été appelés pour nuisances sonores. La suspecte avait alors lancé à ce voisin : «T'es pompier, t'aimes les flammes, ben t'inquiètes pas tu vas en voir».

L'incendie avait rapidement ravagé les huit étages de ce bâtiment difficile d'accès pour les secours, puisque situé en fond de cour. Une cinquantaine d'habitants avait pu être évacués mais d'autres sont restés piégés. Dix personnes âgées de 16 à 92 ans sont décédées, asphyxiées par la fumée ou défenestrées.

En détention provisoire depuis quatre ans, Essia Boularès avait écrit au juge d'instruction en novembre 2021, disant regretter son geste et ne pas en avoir réalisé les conséquences. A partir d'aujourd'hui et pendant les trois semaines d'audience, ses proches, les pompiers et les policiers vont témoigner devant la cour d'assises de Paris.

«MAMAN, J'AI LES FLAMMES SUR MOI»

Les familles de victimes et 45 rescapés de l'incendie seront également entendus. Selon l'avocate Déborah Meier-Mimran, ils veulent non seulement raconter «ce qu'ils ont vécu» lors de cette nuit de cauchemar, mais aussi l'«après, les galères matérielles, psychologiques, parfois la perte de toute une vie».

Dans la nuit du 4 au 5 février 2019, Claire Mussy a passé deux heures pieds nus sur son balcon du 8e étage, à regarder les flammes progresser. Depuis, elle a quitté Paris, ne peut plus vivre à un étage élevé et garde une corde chez elle, à portée de main, au cas où elle serait confrontée à un autre incendie.

Auprès de CNEWS, elle a raconté le traumatisme vécu cette nuit-là. «J'entends mes voisins hurler, j'entends des cris que je n'ai jamais entendus de toute ma vie. Des hurlement de quelqu'un qui souffre, quelqu'un qui se fait attraper par le feu et qui est en train de mourir, brûlé vif».

La jeune femme a pensé mourir dans cet incendie et raconte avoir «dit au revoir à toute [sa] famille et à tous [ses] amis, dans [sa] tête». L'une des ses voisines, Adèle, est décédée ce soir-là. La mère de cette dernière, Pascale Gorgatchev, était au téléphone avec elle et se souvient des derniers mots de sa fille : «Maman, j'ai les flammes sur moi».

Une trentaine de séjours en hôpital psychiatrique

Comme elle, d'autres proches de victimes espèrent obtenir certaines réponses, notamment concernant les normes de sécurité dans l'immeuble, les conditions d'intervention des pompiers, ou encore le suivi psychiatrique de l'accusée.

Peu avant l'incendie, le 18 janvier 2019, Essia Boularès avait en effet été hospitalisée sous contrainte à la demande de sa soeur, pendant 12 jours. Avant cela, son parcours avait déjà été marqué par une trentaine de séjours en hôpital psychiatrique, en raison de ses addictions ou de bouffées délirantes liées à sa consommation de stupéfiants.

Les deux expertises psychiatriques réalisées dans le cadre de cette affaire ont estimé probable un diagnostic de personnalité «borderline». Ce trouble se caractérise par une grande instabilité dans les relations sociales et l'image de soi, mais aussi par des fluctuations extrêmes de l'humeur.

Les experts ont conclu que le discernement d'Essia Boularès était «altéré» mais pas «aboli» au moment des faits. Si cette conclusion est retenue par la cour, l'accusée encourra trente ans de réclusion au lieu de la perpétuité.

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