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«Décivilisation» : pourquoi le terme employé par Emmanuel Macron fait polémique

Emmanuel Macron a comparé, mercredi 24 mai en Conseil des ministres, les violences «quelle que soit la cause» à un «processus de décivilisation». Accusé de reprendre le lexique de l’extrême droite, le président de la République se trouve sous le feu des critiques de l'opposition.

«Il faut être intraitable sur le fond. Aucune violence n'est légitime, qu'elle soit verbale ou contre les personnes. Il faut travailler en profondeur pour contrer ce processus de décivilisation», a déclaré le président de la République mercredi en Conseil des ministres, selon un participant à la réunion, confirmant une information du Parisien

Si le concept de «décivilisation» est à l’origine issu de la recherche en sociologie et plus particulièrement des travaux de Norbert Elias, qui l’a développé avant la Seconde guerre mondiale pour analyser l’apparition et la montée du national-socialisme en Allemagne, c’est bien l’extrême droite qui, depuis des années, s’est appropriée le terme en le calquant sur la société française. 

Lexique de l'extrême droite

Il s’agit notamment d’un concept utilisé par Renaud Camus, le théoricien identitaire, chantre de la théorie xénophobe du «grand remplacement», qui a publié un livre intitulé «Décivilisation» en 2011. Outre Renaud Camus, des personnalités n'appartenant pas à l'extrême droite comme David Lisnard (le maire LR de Cannes) et Bruno Retailleau, le président des sénateurs LR ont dernièrement dénoncé un processus de «décivilisation» en France.

«Je parle d'ensauvagement depuis des années et je me fais accuser de tous les maux», a de son côté expliqué la présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale, Marine Le Pen, ce jeudi sur CNEWS. «La décivilisation c'est la barbarie, donc en réalité Emmanuel Macron vient une fois de plus, si je puis me permettre, nous donner raison sur le constat que nous faisons», a-t-elle ajouté.

«pas de violence qui soit justifiable, jamais, dans une société, quelle que soit la cause»

Si Emmanuel Macron ne pouvait probablement pas ignorer l’origine et l’histoire de ce concept, il semble toutefois qu’il a choisi d’en faire usage pour désigner les multiples actes de violences qui ont marqué le pays ces dernières semaines, à l’image du meurtre d’une infirmière à Reims, de l’accident ayant coûté la mort de quatre personnes dont trois policiers dans le Nord ou encore de l’incendie volontaire de la maison d’un élu de Loire-Atlantique.

«Cette expression se veut une interpellation de la société sur elle-même, parce que le politique n'est pas le seul responsable», a expliqué en outre un proche du chef de l'Etat cité par le Parisien. Même si les violences, contre des élus ou des agents publics, ne sont pas toujours de même nature, Emmanuel Macron a souligné qu’il n'y avait «pas de violence qui soit justifiable, jamais, dans une société, quelle que soit la cause».

La gauche s'interroge

Des justifications qui ne convainquent pas les oppositions, à gauche notamment, où l’on s’interroge sur les réelles intentions d'Emmanuel Macron. «Soit le président de la République est en réalité dépourvu d’intelligence du verbe, d’inhibition républicaine et de réflexion sur les mots qu’il emploie. Soit le président de la République sait ce qu’il fait en reprenant les thèmes et les termes de l’extrême droite», s'est par exemple interrogé le député Génération.s Benjamin Lucas, sur Twitter.

«Considérer que ce serait pure coïncidence est soit une farce, soit affligeant», a pour sa part estimé son collègue (LFI) Alexis Corbière. Renaud Camus a d’ailleurs lui-même réagi sur les réseaux sociaux, à de multiples reprises, pour se satisfaire de la reprise de «son» concept par le président de la République. 

De son côté, Emmanuel Macron est ce jeudi à Roubaix (Nord) pour rendre hommage aux trois jeunes policiers tués dans une collision dimanche avec un véhicule dont le conducteur était fortement alcoolisé et drogué.

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