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Qui est Jeremy Corbyn, nouveau leader du Labour ?

Le leader du parti d'opposition travailliste britannique Jeremy Corbyn lors d'un meeting à Londres, le 20 juin 2015 [Justin Tallis / AFP/Archives]

Ancré résolument à gauche du parti, Jeremy Corbyn a réussi l'impensable en devenant le nouveau chef du Labour après en avoir longtemps été le principal rebelle.

 

Que ce soit sa personnalité, son parcours ou sa place au sein du parti, rien ne destinait le vétéran barbu de 66 ans à devenir un jour le nouveau leader du principal parti d'opposition britannique. Jusqu'ici, il était un outsider au Labour. Un rebelle solitaire qui a voté 533 fois contre la ligne de son parti à la chambre des Communes depuis 1997 et l'arrivée au pouvoir de Tony Blair.

De fait, il est l'exact opposé de l'ancien Premier ministre. Blair a missionné les forces britanniques en Irak ? Corbyn, président de Stop the War, est contre toutes les guerres. L'un était le champion du New Labour et de la social-démocratie ? L'autre est un membre de l'aile gauche du parti qui milite pour la réouverture des mines de charbon. Blair était un rassembleur au charme messianique ? Corbyn est la sobriété incarnée, jamais un mot plus haut que l'autre.

 

Contre l'austérité

Le pourfendeur de l'austérité a toujours tenu à mener la révolution à l'intérieur du parti, plutôt que de trouver refuge dans un Syriza ou un Podemos à la sauce britannique. "J'ai souvent été extrêmement frustré par le Labour. Mais ça a toujours été ma maison. Tony Benn me disait: tu sais camarade, on en fait partie, voilà tout", a-t-il confié un jour. Tout Jeremy Corbyn est dans cette phrase : le mot "camarade", l'héritage de Tony Benn, frondeur vénéré des années 1980, la défiance par rapport au parti. Mais aussi une fidélité à toute épreuve.

Cet amour du parti et le sens de l'engagement lui ont été légués par ses parents, un ingénieur et une enseignante, tombés amoureux lors d'une manifestation contre la guerre civile en Espagne. Elevé dans l'ouest de l'Angleterre dans une famille de quatre garçons, il n'est en revanche guère passionné par les études. Après le bac, il part deux ans en Jamaïque pour le compte d'une association caritative. A son retour au Royaume-Uni, il devient tout de suite syndicaliste, puis politique professionnel, tout en épousant de multiples causes (anti-apartheid, anti-nucléaire, pro-palestinien,...).

 

Dinosaure gauchiste

Elu député d'Islington North, un quartier du nord de Londres, en 1983, il ne cesse depuis de faire la navette entre les bancs de l'Assemblée et les piquets de grève. Quintuple lauréat du concours de "la plus belle barbe du Parlement", il promène son look de prof à la retraite -- sandales, veste fatiguée et chemise col ouvert -- imperméable aux quolibets de la droite qui le taxe de "dinosaure gauchiste". "Il est en paix avec lui même. Peu importe ce que disent les autres, il ne dévie pas de sa route", tranche une proche, la députée travailliste Emily Thornberry.

Une fois rentré chez lui auprès de sa troisième épouse, une Mexicaine plus jeune de vingt ans, il mène une vie tranquille, presque ascétique. Végétarien, il cultive son potager et fait sa propre confiture pomme-cassis, d'excellente réputation. "Je mène une vie normale, je roule à vélo, je n'ai pas de voiture. Je ne suis pas très dépensier", a-t-il dit au Guardian en juin. Les malfrats qui ont cambriolé sa modeste maison il y a quelques années, repartant avec un blazer rouge qu'ils allaient finir par jeter, peuvent témoigner d'un style de vie dépouillé. Lorsque le scandale des notes de frais a secoué Westminster en 2009, on a appris que Corbyn était le député réclamant le moins de remboursements: 8,99 livres pour une cartouche d'encre.

 

Un homme gentil

Même ses ennemis le reconnaissent : Jeremy Corbyn est un homme respectable, profondément gentil. "C'est agréable de prendre le thé avec lui et il est totalement sincère, même si ses idées remontent au Jurassique", souligne Alex Burghart, candidat conservateur malheureux contre lui en mai dernier. Ces qualités ont largement contribué à son succès. Elles alimentent également les critiques de ceux qui jugent qu'il n'a pas l'étoffe d'un leader et encore moins d'un Premier ministre.

Les doutes se propagent jusque dans son camp. "J'adore Jeremy, mais c'est quelqu'un qui ne fait pas de compromis. Ca passe quand on tient un certain rôle. Ca ne passe plus quand on est le leader du Labour", souligne Emily Thornberry.

 

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