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A Barcelone, les indépendantistes montrent leur force en défilant en masse

Des centaines de milliers de Catalans se sont massés mardi sur une artère de Barcelone pour la «Diada», «fête nationale» catalane, démontrant leur capacité de mobilisation après l'échec de leur tentative de sécession de l'Espagne et avec neuf dirigeants politiques en prison.

À 17H14 (15H14 GMT) précises, en commémoration de la prise de Barcelone le 11 septembre 1714 par les troupes du roi Felipe V qui supprima l'autonomie de la région, les manifestants ont levé une marée de drapeaux séparatistes et clamé «Indépendance !» sur six kilomètres de l'avenue Diagonal. La mise en scène, savamment orchestrée par les influentes associations indépendantistes, consistait à faire tomber un mur symbolisant les obstacles surmontés dans la marche vers un État souverain.

«Liberté» et «démocratie»

La revendication de l'abandon des poursuites contre les dirigeants séparatistes, incarcérés ou ayant fui à l'étranger, pour leur rôle dans la tentative de sécession a été au centre de la manifestation convoquée sous le slogan «faisons la république catalane». Treize leaders catalans, dont l'ancien président régional Carles Puigdemont qui s'est exilé en Belgique, sont accusés de rébellion, ce qui pourrait leur valoir jusqu'à vingt-cinq ans de prison.

«J'ai honte, il n'y a pas d'autre mot. Je suis indigné, il ne peut pas y avoir de prisonniers politiques», a dit à l'AFP Santi Noé, agriculteur de 54 ans venu sur son tracteur auquel il avait accroché deux pancartes portant les mots «Démocratie» et «Liberté prisonniers politiques». «Qu'ils nous donnent de la liberté, qu'il n'y ait pas de censure, ils ne nous laissent rien faire. Nous sommes revenus quarante ans en arrière», affirmait Narcisa Doménech, 59 ans.

Le camp indépendantiste veut prouver qu'il reste puissant près d'un an après le référendum illégal d'autodétermination du 1er octobre 2017 et la vaine déclaration d'indépendance du 27 qui avait entraîné la mise sous tutelle de la Catalogne par Madrid. «Les indépendantistes vont descendre dans la rue et démontrer qu'ils sont la force politique organisée la plus importante» de Catalogne, mais contrairement à l'an dernier, «il semble qu'il n'y a pas de plan», a estimé Oriol Bartomeus, politologue à l'Université autonome de Barcelone.

Divisions

La «Diada» est utilisée depuis 2012 par les séparatistes pour réclamer l'indépendance de la riche région du nord-est de l'Espagne où la question divise fortement. Selon un dernier sondage publié en juillet par un institut dépendant du gouvernement régional, 46,7% des Catalans sont favorables à l'indépendance et 44,9% opposés. Les indépendantistes, qui contrôlent le parlement catalan, ont remporté les dernières élections de fin décembre avec 47,5% des voix.

«Aujourd'hui, nous les Catalans devrions célébrer notre fête nationale et non seulement un appel à l'indépendance qui est partagé par moins de la moitié de la population», a regretté depuis Strasbourg, le ministre espagnol des Affaires Etrangères, Josep Borrell, lui-même catalan.

Un homme vêtu d'un uniforme d'époque souffle dans un coquillage lors d'une reconstitution historique à l'occasion de la "Diada", la "fête nationale" catalane, à Barcelone le 11 septembre 2018 [PAU BARRENA / AFP]
Un homme vêtu d'un uniforme d'époque souffle dans un coquillage lors d'une reconstitution historique à l'occasion de la "Diada", la "fête nationale" catalane, à Barcelone le 11 septembre 2018

Les divisions sont également présentes au sein même du camp indépendantiste entre les plus modérés de la Gauche républicaine (ERC), qui veulent abandonner la voie unilatérale, et les plus radicaux. «Si un indépendantiste est assez ingénu ou stupide pour croire qu'il peut imposer l'indépendance à 50% des Catalans qui ne le sont pas (indépendantistes), il est évident qu'il se trompe», a souligné la semaine dernière Joan Tarda, député d'ERC.

Autonomie contre autodétermination

Le discours radical du président régional Quim Torra - choisi par Carles Puigdemont qui continue à tirer les ficelles de la politique catalane depuis la Belgique - s'est pour l'instant limité à des effets de manche. «Notre gouvernement s'est engagé à rendre la République effective (...) Le peuple (catalan) est un peuple qui se sent libre et veut être libre. Et qui a décidé d'être maître de son destin», a-t-il déclaré lundi.

Le président régional QuimTorra (C) accueille les participants à une reconstitution historique à l'occasion de la "Diada", la "fête nationale" de la Catalogne, à Barcelone le 11 septembre 2018 [PAU BARRENA / AFP]
Le président régional QuimTorra (C) accueille les participants à une reconstitution historique à l'occasion de la "Diada", la "fête nationale" de la Catalogne, à Barcelone le 11 septembre 2018

Quim Torra exige du gouvernement central l'organisation d'un référendum d'autodétermination et assure que si Madrid continue à refuser, il ne renoncera à «aucune voie» pour mener la Catalogne à l'indépendance. Mais tout acte unilatéral obligerait presque certainement Madrid à reprendre le contrôle de la région comme l'a fait en octobre dernier le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy.

Son successeur, le socialiste Pedro Sanchez, au pouvoir depuis le 1er juin notamment grâce aux voix des indépendantistes catalans, a, lui, repris le dialogue et proposé la tenue d'un référendum sur plus d'autonomie pour la région. Une offre rejetée par Quim Torra.

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