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Les forces kurdes défendent une ville clé en Syrie face aux Turcs

Des soldats turcs et des combattants syriens alliés se rassemblent sur les abords de la ville de Minbej, dans le nord de la Syrie, près de la frontière turque, le 14 octobre 2019 [Zein Al RIFAI / AFP] Des soldats turcs et des combattants syriens alliés se rassemblent sur les abords de la ville de Minbej, dans le nord de la Syrie, près de la frontière turque, le 14 octobre 2019 [Zein Al RIFAI / AFP]

Les forces kurdes opposent une résistance acharnée mardi dans la ville frontalière clé de Ras al-Aïn, au septième jour d'une offensive lancée par Ankara dans le nord-est de la Syrie, ayant provoqué des déplacements massifs de population et le départ d'ONG.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé que l'opération, qui vise une milice kurde considérée comme «terroriste», se poursuivrait jusqu'à ce que ses «objectifs soient atteints», en dépit d'appels de nombreux pays, Etats-Unis en tête, à y mettre fin.

Les forces d'Ankara ont lancé le 9 octobre une offensive dans le nord de la Syrie contre les Unités de protection du peuple (YPG) et ont depuis pris le contrôle d'une bande frontalière de près de 120 km. Si la ville frontalière de Tal Abyad est tombée aux mains des Turcs et des supplétifs syriens, celle de Ras al-Aïn --plus à l'est--, semble résister pour l'instant.

Pour défendre cette autre ville frontalière, les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les YPG, utilisent un réseau dense de tunnels et de tranchées. Elles «ont lancé dans la nuit une vaste contre-attaque contre les forces turques et leurs alliés syriens près de Ras al-Aïn», a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau de sources dans le pays.

Un correspondant de l'AFP dans la région a confirmé la poursuite mardi des affrontements autour de la ville. Dans le même temps, les forces du régime de Bachar al-Assad se sont déployées au sud de Ras al-Aïn, à la périphérie de la ville de Tal Tamr, en vertu d'un accord conclu dimanche avec les Kurdes visant à contenir l'offensive turque.

«Scénario cauchemardesque»

Plus à l'ouest, des affrontements ont également eu lieu dans la nuit autour de Minbej entre combattants pro-Ankara et forces du conseil militaire de la ville, affilié aux autorités kurdes. Pour aider ces dernières, Damas a aussi envoyé des troupes dans cette ville.

La Turquie souhaite créer une «zone de sécurité» de 32 kilomètres de profondeur le long de sa frontière pour tenir les forces kurdes à distance et rapatrier une partie des 3,6 millions de réfugiés syriens sur son sol.

En sept jours, l'offensive turque a déjà tué 70 civils côté syrien et 135 combattants des FDS, selon l'Observatoire. Les affrontements ont également tué 120 combattants proturcs, selon la même source, et cinq soldats turcs, selon Ankara. En outre, 20 civils sont morts dans des tirs de roquettes sur des villes turques en provenance de la Syrie.

L'offensive a provoqué en outre l'exode de 160.000 personnes d'après l'ONU. A ce sujet, les autorités kurdes en Syrie se sont alarmées mardi de l'arrêt des activités de «toutes» les ONG internationales et le retrait de leurs employés du nord-est du pays.

«La situation des déplacés a empiré dans les régions visées par l'agression (turque), avec l'arrêt total de l'aide humanitaire, l'arrêt des activités de toutes les organisations internationales et le retrait de leurs employés», déplore un communiqué de l'administration semi-autonome kurde.

Lundi, l'organisation internationale Mercy Corps a annoncé «la suspension de ses opérations dans le nord-est de la Syrie et l'évacuation de son personnel international».

«C'est un scénario cauchemardesque», a indiqué le directeur-adjoint chargé de la Syrie, Made Ferguson. «Il y a des dizaines de milliers de personnes qui fuient et nous n'avons aucun moyen de les atteindre», a souligné M. Ferguson.

Le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) a indiqué de son côté que les Nations unies et leurs partenaires étaient «extrêmement préoccupés» par la sécurité de leurs centaines d'employés syriens.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a indiqué lui poursuivre ses activités, reconnaissant des «perturbations» touchant à la livraison dans certaines zones.

Nouvelle sanctions ? 

Les États-Unis, alliés jusqu'à présent aux forces kurdes dans la lutte contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI), ont annoncé dimanche le retrait de 1.000 soldats du nord-est de la Syrie, ouvrant la voie à l'opération turque.

Mais en dépit du feu vert américain, le président américain réitère depuis quelques jours ses appels pour un arrêt des hostilités. Lundi, son vice-président Mike Pence a annoncé qu'il se rendrait prochainement en Turquie, à laquelle son pays a imposé des sanctions à trois ministres, gelant leurs éventuels avoirs aux Etats-Unis.

«Pour éviter de nouvelles sanctions (...) la Turquie doit mettre fin immédiatement à son offensive», a prévenu le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo. «Nous allons poursuivre notre lutte (..) jusqu'à ce que nos objectifs soient atteints», a rétorqué mardi M. Erdogan.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan le 10 octobre 2019 [Adem ALTAN / AFP/Archives]
Le président turc Recep Tayyip Erdogan le 10 octobre 2019

«Nous allons rapidement sécuriser la région allant de Minbej jusqu'à notre frontière avec l'Irak», a-t-il encore dit. Emboîtant le pas à d'autres pays européens, la Grande-Bretagne a annoncé mardi suspendre ses exportations d'armes vers la Turquie.

Paris et d'autres capitales européennes craignent que de nombreux membres de l'EI détenus par les Kurdes ne réussissent à s'enfuir et que le groupe jihadiste ne profite du chaos sécuritaire pour se reformer sur le terrain.

Mardi, le président turc Recep Tayyip Erdogan a assuré dans le Wall Street Journal «qu'aucun combattant de l'EI ne pourra quitter le nord-est de la Syrie».

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