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L'exemple d'Eyam, ce village anglais qui a fait reculer la peste grâce au confinement

Pour lutter contre la propagation du coronavirus, le révérend actuel d'Eyam est confiné chez lui avec sa famille car son épouse a été testée positive au Covid-19.[Capture d'écran Youtube]

Un temps accusé d'inaction face à la pandémie de coronavirus, le Royaume-Uni a soudain pris une série de mesures vendredi 20 mars. Mais le confinement général n'est toujours pas à l'ordre du jour. Pourtant, l'histoire anglaise est marquée par celle d'Eyam, ce petit village du Derbyshire qui a sauvé des milliers de vies grâce à la quarantaine au XVIIe siècle.

C'était en 1665 et 1666, alors que l'épidémie de peste bubonique faisait de multiples victimes, notamment à Londres. La maladie est justement arrivée jusqu'à Eyam depuis la capitale, dans un colis de tissu envahi par des puces infectées.

Lorsque les premiers cas sont apparus, les habitants de ce petit village, paniqués, ont commencé à fuir. Le jeune révérend William Monpesson, âgé de 27 ans à l'époque, est alors intervenu pour convaincre les villageois de faire l'inverse. C'est à dire se confiner.

Avant de fermer les portes d'Eyam, l'homme d'église a néanmoins éloigné ses propres enfant, envoyés à Sheffield. Lui-même est resté, en compagnie de sa femme, Catherine, qui a été l'une des victimes de la peste.

Ces habitants du Derbyshire ont eux-mêmes établi un cordon sanitaire autour de leur village. Ils ont pu continuer à vivre grâce à la solidarité des communes voisines, qui venaient leur déposer de la nourriture et des médicament, à distance. En échange, les villageois en quarantaine laissaient un peu d'argent, trempé dans du vinaigre, au même endroit.

Comme les Français à l'heure actuelle, les habitants d'Eyam tentaient de garder un semblant de vie sociale. Impossible à l'époque de compter sur Facetime, Facebook ou Whatsapp. Mais il y avait Cucklet Delph.

Les villageois se réunissaient dans cet amphithéâtre naturel qui leur permettait d'échanger tout en restant à distance les uns des autres. Situé juste à l'extérieur du village, ce lieu accueillait également les services religieux.

L'histoire raconte qu'un habitant d'Eyam, Emmott Sydall, 22 ans, retrouvait quotidiennement sa fiancée à Cucklet Delph. Jusqu'au jour où elle ne s'est plus présentée. La jeune femme avait succombé à la peste.

D'autres récits tragiques sont liés à la quarantaine d'Eyam. L'un des plus connus parle d'Elizabeth Hancock, qui a perdu son mari et ses six enfants en seulement huit jours. Elle a été forcée de creuser elle-même leurs tombes, car les règles de lutte contre l'épidémie imposaient de limiter les contacts avec les défunts.

Une quarantaine qui a duré six mois

Ces destins sont déchirants mais, sans cette initiative des habitants d'Eyam, la peste aurait fait encore plus de victimes. Sur les quelque 700 habitants que comptait le village à l'époque, plus de 260 ont péri pendant la quarantaine. Mais la maladie a été contenue.

Le bilan aurait été incroyablement plus lourd si la contamination avait atteint les grandes villes voisines telles que Sheffield, Bakewell ou Manchester. Sachant qu'à Londres, la peste a tué environ 100 000 personnes.

L'isolement autoinfligé des habitants d'Eyam a duré six mois. En novembre 1666, après deux semaines sans nouveau décès, les cloches de l'église ont enfin sonné. La quarantaine était terminée. Ils étaient libres.

Depuis, cette bourgade du Derbyshire est connue en Angleterre comme «le village de la peste». Eyam a fait de son histoire héroïque un attrait touristique. Les visiteurs peuvent ainsi visiter le Plague cottage, à savoir la maison ou le premier décès est survenu, et un musée est entièrement dédié à cette période.

Des siècles plus tard, Eyam est aujourd'hui confronté à un nouveau défi : le coronavirus. Le révérend actuel, Mike Gilbert, est confiné chez lui avec sa famille car son épouse a été testée positive. Le magasin général est fermé, le musée aussi et l'église s'est organisée pour livrer de la nourriture aux personnes isolées.

Là ou le Royaume-Uni s'est vu reprocher sa réaction tardive face à la pandémie, il semblerait que «le village de la peste», lui, ait retenu les leçons du passé.

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