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Aux Caraïbes, le prince William regrette le passé esclavagiste «odieux» de la couronne britannique

Lors de cette tournée caribéenne, le duc et la duchesse de Cambridge se sont notamment rendus à Nassau, aux Bahamas. [CHANDAN KHANNA / AFP]
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En visite dans les Caraïbes à l'occasion des 70 ans de règne d'Elizabeth II, le prince William n'a pu faire abstraction du passé esclavagiste du Royaume-Uni. De passage en Jamaïque, il a dénoncé cette «épouvantable atrocité» et exprimé sa «profonde tristesse».

La tournée caribéenne du duc de Cambridge et de son épouse, Kate, a été marquée par les manifestations et les velléités de transition vers un régime républicain. Leur parcours devait leur permettre de visiter le Belize, la Jamaïque et les Bahamas, trois pays indépendants membres du Commonwealth, dont Elizabeth II est la cheffe d'Etat. Une partie de la tournée a néanmoins dû être annulée en raison de ces tensions.

Le Comité national de réparations des Bahamas a notamment accusé la famille royale britannique d'avoir bénéficié «du sang, de la sueur et des larmes» des esclaves. Evoquant des territoires et des peuples «pillés» pendant des siècles, ses membres ont appelé à des dédommagements.

Le rôle joué par la monarchie britannique dans le commerce d'esclaves remonte au XVIe siècle, quand la reine Elizabeth Ière a financé John Hawkins, figure de l'esclavagisme à l'époque. Au XVIIe siècle, le roi Charles II avait continué à encourager cette pratique, investissant des fonds privés dans la Compagnie royale d'Afrique, qui transportait des centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants d'un côté à l'autre de l'Atlantique, dans des conditions inhumaines. 

Plus tard enfin, le futur roi William IV avait tenté de s'opposer au mouvement abolitionniste. Le commerce transatlantique des esclaves a malgré tout été interdit en 1807 au Royaume-Uni, en 1833 dans tous les territoires britanniques.

La famille royale n'a jamais formellement prononcé d'excuses aux peuples caribéens concernant l'esclavagisme. Ces dernières années, elle est néanmoins revenue sur cette partie sombre de son passé. Le prince Charles avait notamment dénoncé une «atrocité» entachant «à jamais l'histoire» du Royaume-Uni lors de la proclamation de la République de la Barbade, en novembre dernier.

Cela «n'aurait jamais dû se produire»

Cette semaine, en Jamaïque, le prince William a repris des mots semblables, estimant que l'esclavagisme était «odieux» et «n'aurait jamais dû se produire». Un discours qui n'a pas empêché le Premier ministre jamaïcain, Andrew Holness, d'estimer la transition de son pays vers un régime républicain, qui ne reconnaîtrait plus Elizabeth II comme cheffe d'Etat, «inévitable».

Pour Olivette Otele, ces manifestations aux Caraïbes étaient prévisibles. «Si le but de la visite est de garder ces pays (sous la couronne britannique) et de garder la reine à la tête de ces Etats, (la famille royale) n'a peut-être pas compris que le débat est plus large ici», affirme-t-elle. «Il s'agit d'inégalité, de pauvreté et d'héritage du passé».

Elle évoque notamment le sort de la «génération Windrush», venue aider à la reconstruction du Royaume-Uni après la Seconde Guerre mondiale. Des dizaines de milliers d'immigrés caribéens arrivés légalement sur le sol britannique mais qui ont ensuite, selon elle, été privés de droits, voire renvoyés.

Vendredi, lors d'une réception à Nassau, capitale des Bahamas, le prince Williams a toutefois assuré qu'entre la couronne britannique et les pays caribéens «les relations évoluent» mais «l'amitié demeure».

«L'an prochain, je sais que vous êtes tous impatients de célébrer les 50 ans de votre indépendance - vos noces d'or, a-t-il souligné. Et avec la Jamaïque qui célèbre cette année ses 60 ans d'indépendance et le Belize qui a fêté l'an dernier ses 40 ans d'indépendance, je veux vous dire ceci : nous soutenons avec fierté et respect vos décisions concernant votre avenir.»

A l'issue de ce voyage, le duc de Cambridge a même ouvert la porte à une future diminution du rôle de la monarchie britannique dans le Commonwealth. Reconnaissant que «cette tournée a mis encore plus en lumière des questions sur le passé et l'avenir» il a assuré : «Ce qui m'importe, ce n'est pas de savoir qui le Commonwealth choisira pour diriger sa famille à l'avenir» mais «le potentiel de la famille du Commonwealth à créer un avenir meilleur pour les peuples qui la composent, et notre engagement à servir et soutenir du mieux que nous pouvons».

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