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Cryptomonnaies : «En 2023, seuls les acteurs résilients survivront», estime Hasheur

Owen Simonin, alias Hasheur, est l'un des spécialistes des cryptomonnaies et de la blockchain parmi les plus suivis sur YouTube avec plus de 600.000 abonnés. [© Just Mining]

Du coup de tonnerre déclenché par la chute de FTX en passant par le climat d'incertitude lié à l'inflation et à la Guerre en Ukraine, 2022 a sonné la fin de la récréation chez les acteurs des cryptomonnaies, après une année 2021 euphorique. Spécialiste de ce domaine, Hasheur (600.000 abonnés sur YouTube) décrypte pour CNEWS les événements de l'année et évoque les perspectives pour 2023.

Le séisme provoqué par la chute de FTX, durant la semaine du 11 novembre, a achevé une année noire pour les cryptomonnaies. Un secteur qui avait pourtant vécu une année folle en 2021. Afin de mieux comprendre les tenants et les aboutissants de ce marché en pleine révolution, CNEWS a demandé à Owen Simonin, alias Hasheur, son expertise. L'animateur de la première chaîne YouTube francophone dédiée aux cryptomonnaies, mais aussi fondateur de l'entreprise Just Mining, estime que le secteur devrait se structurer en 2023, mais que beaucoup d'acteurs ne survivront pas.

Quelles leçons peut-on tirer de la chute de FTX, qui était tout de même la 2e plate-forme d'échanges de cryptomonnaies au monde ?

Aujourd'hui, il n'y avait pas encore eu de «too big too fail» (trop gros pour faire faillite) dans les entreprises liées aux cryptomonnaies. La chute de FTX est donc un exemple qui rappelle qu'il faut savoir protéger et stocker ses cryptomonnaies par ses propres moyens, notamment via des Wallets (NDLR : portefeuilles numériques). Comme on dit : «not your key, not your crypto» (si tu n'as pas la clé, tu ne possèdes pas ta crypto).

Quelles conséquences a eu cette faillite sur le secteur ?

On peut retenir quatre niveaux d'impact : le premier niveau est que tous les gens qui avaient déposé des fonds dessus ont désormais leur argent qui se trouve bloqué.

Le deuxième impact direct est le fait que toutes les entreprises, qui déposaient de l'argent sur FTX afin d'obtenir des rendements qu'elles redistribuaient elles-mêmes à leurs clients, sont aussi impactées. Par exemple, la société A propose 5 % d'intérêts à ses clients et prend cet argent des clients pour le déposer chez FTX à 7 % d'intérêts, naturellement si FTX bloque les comptes, la société A ne peux pas rembourser ses clients.

Le troisième impact est une crise de confiance. Car en plus d'avoir fait défaut alors qu'il était considéré comme un acteur sérieux, FTX avait dit quelques jours avant sa faillite : «nous procédons au retrait, vous pouvez retirer vos cryptomonnaies» et finalement, il sont revenus sur ce qu'ils ont dit en disant : «en fait on ne peut pas». Ils ont créé un manque de confiance, qui se répercute sur tous les acteurs du marché. Maintenant, plus personne n'a confiance dans les plates-formes et les gens se sauvent de partout.

Enfin, la 4e conséquence est que cette crise de confiance a fait baisser les prix des cryptomonnaies. En outre, il y a un effet dominos qui crée des blocages indirects chez certaines personnes qui pensaient être en sécurité, or elles avaient déposé de l'argent dans une société qui avait des fonds chez FTX ou bien cette société avait elle-même de l'argent dans une autre société qui avait des fonds chez FTX, etc.

FTX a dû passer par des étapes de croissance ultra-rapides et a donc bâclé beaucoup de chosesHasheur

Tout ça est-il symbolique d'un secteur encore jeune ?

Tout à fait. FTX est passé de rien du tout à une boîte qui était valorisée 40 milliards de dollars en seulement trois ans. Donc évidemment, cette société a dû passer par des étapes de croissance ultra-rapides et a donc bâclé énormément de choses. On s'en rend compte dans les récentes annonces. Apparemment, ils n'avaient pas de service comptable, la boîte avait prêté des milliards de dollars à son créateur... C'est hallucinant.

Et aucun garde-fou n'était présent...

Le problème est que les garde-fous, on est en train de les dessiner. La législation était en train d'arriver. Surtout, il y a une différence entre créer une régulation et vérifier qu'elle est bien appliquée. Dans le cas de FTX, la société était régulée au Bahamas...

Le régulateur va donc auditer plus régulièrement les sociétés du secteur, avec le risque possible d'avoir un régulateur qui se montre très strict et se mette à sanctionner tout le monde.

Quel conseil donnez-vous ?

Il convient de se renseigner d'abord sur les risques qu'on encourt lorsqu'on dépose son argent sur une plate-forme et de se renseigner sur les contreparties. Tout rendement est adossé à un risque. Il faut comprendre de quelle nature il est et comment est gérée la clé privée, c'est-à-dire qui détient la cryptomonnaie en votre nom ?

Quel bilan tirer de cette année 2022, très tendue pour les cryptomonnaies ?

Essentiellement du mauvais. On a d'abord assisté à la redescente et à l'accalmie après l'euphorie de 2021. Mais c'était attendu. Ce qui l'était moins ce sont deux gros événements dans le monde de la crypto, mais aussi deux gros événements dans le monde traditionnel...

Du côté des cryptos, on a eu l'UST qui était présenté comme un stablecoin (NDLR : cryptomonnaie dont la valeur est liée à celle du dollars) mais qui a perdu sa parité avec le dollar, ce qui a fait beaucoup de mal à l'écosystème. Et FTX en cette fin d'année, que personne ne voyait tomber, mais qui a fait défaut. Donc, il y a eu deux «cygnes noirs» en plus de la baisse attendue des cryptomonnaies. Ce qui a créé une crise de confiance.

Parallèlement, on est dans un contexte global où les marchés financiers ont peur, on a de l'inflation et la guerre en Ukraine, ce qui amplifie le climat d'incertitude.

Il sera difficile d'avoir une année 2023 pire que 2022Hasheur

Quelles seront les grandes tendances en 2023 sur ce secteur ?

2023 sera une année lors de laquelle on va tirer les enseignements de la curation de 2022. Avec tout ce qui se passe, seuls les acteurs résilients avec de vrais fondamentaux et de vraies ressources vont survivre. Ce qui va enlever un peu de surplus et de bruits inutiles. Il y aura une structuration et l'on sait qu'il y aura une régulation plus stricte. Je pense qu'il sera difficile d'avoir une année 2023 pire que 2022. Ce qui est une bonne nouvelle. Le problème de la chute de FTX est que de nombreuses entreprises pourtant vertueuses vont en subir les conséquences.

Assistera-t-on à de nouveaux usages de la blockchain et des NFT ?

C'est dans ce genre d'année qu'on construit, car les entreprises n'ont rien d'autre à faire. Il y a moins de demande et moins d'argent qui rentre. Donc les entreprises n'ont qu'une chose à faire, c'est de construire des solutions et de nouveaux usages. Naturellement, on va explorer là où la blockchain permet d'amener une évolution ou une révolution, comme l'identité décentralisée, les NFT, la propriété numérique dans les métavers, la finance décentralisée. Ce dernier point étant la conséquence de la chute de FTX qui était un acteur centralisé, les gens vont se tourner vers des structures décentralisées.

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