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Valérie Kaprisky : «Mon métier m'offre la chance de pouvoir m'échapper d'une réalité tellement dure»

Valérie Kaprisky, icône du cinéma des années 1980, a depuis largement diversifié ses activités artistiques. [© Gaétan GHIONDA]

Icône des eighties au succès fulgurant puis à la filmographie plus sélective, Valérie Kaprisky est ce mercredi à l'affiche du dernier film d'Alexandre Arcady, «Le petit blond de la Casbah». Une occasion en or d'évoquer avec elle une carrière artistique devenue protéiforme.

Quarante ans déjà ! Elle représente une bulle de nostalgie, de légèreté, de sensualité et d’insouciance qui, forcément, en a fait chavirer plus d’un… Valérie Kaprisky, actrice iconique de «L’Année des Méduses», se diversifie désormais avec enthousiasme : théâtre, télévision, cinéma, écriture d’un scénario… Et une belle sérénité retrouvée. 

Dans «Le petit blond de la Casbah», vous interprétez Josette, une citoyenne kabyle d'Alger, qui fut une proche du cinéaste durant son enfance et sa pré-adolescence. En quoi ce personnage vous a-t-il touchée ?

Parfois, on choisit un film pour un rôle et à d’autres occasions, on le choisit pour le scénario dans son intégralité... J'avais envie de faire partie de cette aventure ! Même si Alexandre Arcady a déjà abordé le thème des Pieds-noirs, il y dévoile quelque chose de plus intime et de très bouleversant.

Il m'a appris que «cette fameuse Josette» existait vraiment. Elle a fait partie de ses premiers émois d'adolescent ! Alexandre avait des souvenirs à chaque coin de rue, ça me parlait beaucoup, c'était chargé en émotions. J'ai toute ma belle-famille qui a vécu en Algérie, j'avais entendu parler pendant plus de vingt ans d'Alger la blanche…

Quel effet cela fait-il de se retrouver dans un film choral ?

Claude Lelouch (avec qui elle tourna «Salaud, on t’aime !», ndlr) a toujours dit : «Il n'y a pas de second rôle». Alexandre écrit tous les personnages avec le même soin et la même intensité. Chacun a son moment et sa place dans ce «petit blond de la Casbah».

Dans la mémoire collective, les temps forts de votre carrière, ce sont les années 1980. «À bout de souffle made in USA», «La Femme publique» d'Andrzej Zulawski, «L'Année des Méduses», multirediffusé en télé, «La gitane» et ses millions d'entrées, le Festival de Cannes 1984, une nomination aux César... Quel regard portez-vous sur cette période ?

J'ai eu une chance inouïe de vivre cela, ça a été énorme, le succès, la médiatisation... En fait, quand on démarre ce métier très jeune, on ne peut pas se permettre d’hésiter : la chance, il faut la saisir au vol dès qu’elle se présente.

Quand on démarre ce métier très jeune, on ne peut pas se permettre d'hésiter.

Ça a été fulgurant parfois, pas si facile psychologiquement. Ça m’a un peu atteinte à l’époque et j’ai désiré prendre du recul. J’ai alors refusé beaucoup de propositions après «L’Année des Méduses» de Christopher Franck. Je porte cependant un regard très bienveillant sur la petite Valérie des années 1980 !

À cette époque, la tradition et l’usage voulaient qu'aucune actrice ne puisse vraiment faire carrière sans se déshabiller. Est-ce que #Me Too est passé par là depuis ?

De la séduction, de la nudité, de l'érotisme, de la sensualité : il y en a toujours eu dans le cinéma et il y en aura toujours. Après c'est le degré et si l'histoire s'y prête... Il peut y avoir une scène d'amour, ça peut faire partie du scénario mais on n'est pas obligé de faire de la surenchère... Il ne faut pas oublier que tout ça arrivait après la révolution sexuelle des années 1970 ; c'était aussi une manière de rejeter l'ordre bourgeois, de reprendre possession de son corps... La différence aussi - ne l’oublions pas et ne mélangeons pas tout - réside dans le fait que #Mee Too s’adresse au harcèlement en général, dans le milieu du cinéma comme ailleurs ; et pas envers les actrices (ou acteurs !) qui consentent et acceptent un rôle dénudé en toutes connaissances de cause.

Jean-Jacques Beineix a révélé, dans l'une de ses dernières interviews, avoir écrit «37°2 le matin» pour… Valérie Kaprisky et Gérard Lanvin ?!

Je me souviens l'avoir rencontré effectivement. Je ne sais plus ce que je lui ai dit à ce moment-là ; il est fort probable que j'aie trouvé que le personnage de Betty était trop proche de celui que je venais de jouer dans «La Femme publique»...

Vous avez malgré tout réussi à construire une carrière sur plusieurs décennies, un métier pérenne finalement. Et une vie familiale.

Ce n'est pas vraiment un métier serein, il faut l’admettre. Et ce, même quand on connait ou on a connu une grande célébrité. Je ne conseillerais pas forcément à des jeunes aujourd'hui de se lancer dans la carrière exclusive de comédien. C'est un challenge formidable mais c'est très déstabilisant, très incertain. Tellement aléatoire. J'aime jouer, c’est évident.

À mon âge, je considère que je n'ai plus besoin de prouver quoi que ce soit.

Aujourd'hui, j'exerce mon métier d'une façon différente, il y a quelque chose de plus apaisé chez moi. À mon âge, je considère que je n'ai plus besoin de «prouver» ou de «démontrer» quoi que ce soit ; et j’exerce mon métier pour prendre du plaisir, rencontrer des gens intéressants, partager des moments formidables et rares. On a la chance de pouvoir s'échapper de la réalité qui est tellement dure, l’opportunité de raconter des histoires, des rêves et des récits souvent forts, singuliers et passionnants… Alors oui, je suis plus discrète dans le paysage audiovisuel c’est vrai, ça reste aussi pour moi une manière de poursuivre une carrière sereine et apaisée.

Pouvez-vous nous dévoiler quelques projets ?

Je suis en train d'écrire un scénario destiné à la télévision. J'ai appris que le travail de scénariste est un investissement énorme. Ça m'a enseigné l'humilité... Il s'agira d'un film choral sur les femmes qui s'appellera «Les insolentes». Je serai l'une des actrices. Côté théâtre, je vais jouer dans une pièce d'Éric Assous («Secret de famille») mise en scène par Philippe Hersen que j'adore, et avec Xavier Deluc comme partenaire - avec qui j'avais déjà travaillé dans «Section de recherches»… Ce sera aussi une tournée dès octobre 2024 puis une reprise à Paris...

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