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Grève SNCF : les 6 raisons de la colère

Une manifestation contre la réforme de la SNCF du printemps 2018, le 19 avril. [© PASCAL PAVANI / AFP]

Après un arrêt de travail «surprise» à la mi-octobre, une nouvelle grève perturbe les lignes ferroviaires depuis lundi. Un avant-goût de la «grève illimitée» à compter du 5 décembre, mais surtout une énième illustration des tensions à la SNCF, les agents craignant aussi bien pour leur statut social que pour la sécurité des passagers (et la leur).

La future ouverture à la concurrence

La première inquiétude des grévistes concerne la future ouverture à la concurrence de la SNCF, prévue par la réforme promulguée en juin 2018 et destinée, entre autres, à résorber la dette abyssale de l'entreprise (plus de 50 milliards d'euros). Celle-ci ne sera plus un «établissement public à caractère industriel et commercial» mais une «société anonyme à capitaux publics».

Concrètement, des acteurs privés vont pouvoir utiliser le réseau ferroviaire de la SNCF et proposer aux usagers de nouvelles offres de transport. Ce qui devrait remettre en cause les spécificités du statut dont bénéficient les 146.000 cheminots, comme la garantie de l'emploi à vie, la gratuité sur le train, ou encore une sécurité sociale et une retraite plus avantageuses.

La réforme des retraites à venir

Comme tous les régimes spéciaux de retraite (RATP, EDF...), celui de la SNCF est amené à disparaître avec la future réforme voulue par le gouvernement, qui prévoit un «système universel» par points. Exit les avantages prévus dans le statut des agents ferroviaires, comme un départ à la retraite précoce et une pension supérieure aux autres fonctionnaires de l'Etat (et aux salariés du privé, bien sûr). Selon le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, cette réforme ne sera qu'un «enfumage déguisé» qui, dans les faits, fera «100% de perdants».

Un manque d'effectifs

C'est l'un des problèmes pointés du doigt lors de la «grève surprise» de mi-octobre, lancée après un accident survenu sur un TER. Comme déploré par le syndicat SUD-Rail, le conducteur du train, blessé et choqué, a lui-même «dû porter secours aux passagers car c'était le seul agent SNCF à bord».

Inquiets des risques de sécurité pour les voyageurs, les syndicats contestent le mode d'exploitation «Equipement agent seul» (EAS), qui consiste à faire circuler des trains sans contrôleur. Ils exigent aujourd'hui l'arrêt immédiat du déploiement des trains avec un seul employé ferroviaire à bord, le conducteur. D'après les organisations syndicales, «il y a 500 trains qui rouleraient sans [contrôleur], faute d’effectif», insiste Marnix Dressen, sociologue du travail et spécialiste du ferroviaire, auprès de Ouest France.

UN RÉSEAU de plus en plus délabré

Les cheminots sont d'autant plus inquiets pour la sécurité des passagers que le réseau SNCF est loin d'être sans faille. En août dernier, un rapport aussi alarmant que confidentiel du gendarme du ferroviaire, l'ESPF, publié par Le Parisien, révélait ainsi les problèmes de maintenance sont légion. Défauts de signalisation électrique, fils électriques rongés, boulons manquants, retards de réparation, manque de suivi des problèmes... Autant d'anomalies pouvant conduire à des accidents.

Des agressions en série 

Toujours sur le plan de la sécurité, les grévistes entendent alerter sur les agressions dont sont victimes les agents de la SNCF. Rien que le week-end du 12 octobre, pas moins de sept agressions de contrôleurs de train ont été recensées sur des lignes normandes et le Transilien. Dans la soirée de jeudi dernier, à Besançon, un agent SNCF qui cherchait à empêcher une agression a été roué de coups par un groupe de jeunes. Des actes de plus en plus fréquents, selon eux.

Un manque de considération du service public

A tous ces problèmes, disons «physiques», s'ajoute le sentiment, éprouvé par nombre de cheminots, d'un manque de considération de leur métier. «Ils ont l’impression de ne pas être respectés [alors qu'ils] se donnent beaucoup de mal. Certains parce qu’ils ont un vrai sens du service public, d’autres parce qu’ils n’ont pas le choix, parce que les réductions d’effectifs font qu’ils sont 'à l’os'», estime Marnix Dressen. Une impression partagée, à en croire les multiples mouvements sociaux actuels, par l'ensemble des acteurs des services publics, des soignants aux enseignants, en passant par les policiers et les pompiers.

Emmanuel Macron a déjà prévenu que, concernant la réforme des retraites, dénoncée par les cheminots, il n'aura «aucune forme de faiblesse ou de complaisance». Reste donc à savoir si les grévistes peuvent encore changer la donne. Les mêmes n'avaient pas réussi à mettre en échec la dernière réforme ferroviaire au printemps 2018, alors qu'ils s'étaient mobilisés durant trois mois de grève historique. 

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