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Réforme des retraites : un 49.3 inévitable ?

Au début du parcours législatif à l’Assemblée, lundi 17 février, plus de 41.000 amendements avaient été déposés. [J.-P. PARIENTE / SIPA].

«Une arme nucléaire législative». Après avoir répété qu’il ne souhaitait pas recourir à l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer la réforme des retraites, le gouvernement pourrait bien changer d’avis.

Alors que les débats sont englués à l’Assemblée, le discours de la majorité a en effet évolué et un recours à cet article, qui permet de faire passer un projet de loi sans vote, est de plus en plus évoqué.

Suivant les textes, c’est le chef du gouvernement qui en décide après délibération en conseil des ministres. Celui-ci devant se réunir ce mercredi matin, Edouard Philippe pourrait donc l’enclencher dans la foulée.

A moins que l’exécutif ne décide de temporiser. Car si le 49.3 est redoutable, il peut aussi se retourner contre son utilisateur.

De lourdes conséquences possibles

Si ces derniers jours, les marcheurs n’ont cessé d’agiter le spectre du 49.3, ils ont cependant toujours dit que sa mise en œuvre ne se ferait, selon eux, que contrainte et forcée.

A l’arrivée du texte en séance publique à l’Assemblée, lundi 17 février, plus de 41.000 amendements avaient en effet été déposés par les oppositions, dont 23.000 pour la seule France Insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon.

Face à une «obstruction parlementaire» assumée - seul le premier des 65 articles du projet a jusqu’ici été adopté - il est en effet impossible de tenir les délais qui consistent à voir la réforme adoptée en première lecture avant les élections municipales, et votée à l’été.

«Lorsqu’il faut prendre ses responsabilités, je le fais sans hésiter et j’utilise toute la Constitution, rien que la Constitution», a même prévenu, ce mardi, Edouard Philippe.

Reste que, dans ce contexte, les oppositions pourraient déposer, dans les vingt-quatre heures qui suivent, une motion de censure, qui aurait toutefois peu de chances d’être adoptée. Car il faut, pour cela, la majorité des membres composant l’Assemblée.

Pour le gouvernement, c’est paradoxalement plutôt des macronistes eux-mêmes que pourrait provenir le danger. L’idée d’un recours au 49.3 est en effet loin de faire consensus parmi les députés LREM.

Vendredi 21 février, quatre d’entre-eux (et deux apparentés) ont même publié une tribune sur le site du Monde pour faire part de leur hostilité à un tel choix.

Alors qu’au total ils sont aujourd’hui 300 à l’Assemblée, contre 314 en 2017, d’autres départs pourraient suivre, ce qui rapprocherait dangereusement du seuil de la majorité absolue, fixé à 289 sièges.

Enfin, le recours au 49.3 pourrait avoir comme conséquence de relancer l’opposition syndicale dans la rue, alors même qu’une nouvelle journée de mobilisation est déjà prévue le 31 mars prochain.

Un coût politique à évaluer

En dehors des conséquences à court terme, déjà lourdes, d’un possible usage du 49.3, l’enjeu pour la majorité devrait aussi consister à limiter une addition politique qui risque d’être particulièrement salée.

Selon un sondage BVA publié la semaine dernière, 72 % des Français désapprouvent en effet toujours la réforme des retraites et beaucoup pourraient faire payer le gouvernement dans les urnes non seulement à l’occasion des municipales, mais également lors de la présidentielle 2022.

Et, dans l’intervalle, l’opposition, qui, d’une certaine façon, a elle-même poussé le gouvernement à utiliser le 49.3, ne devrait pas se priver de le lui rappeler. 

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