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Manque de doses et problème d'accès à Doctolib, la vaccination patine en Seine-Saint-Denis

Alors qu'une polémique a éclaté en Seine-Saint-Denis (93) face aux inégalités d'accès à la vaccination, l'Agence régionale de santé Ile-de-France a annoncé débloquer 12.000 doses de vaccin pour les publics les plus isolés du département. Le but ? Vacciner plus vite et en plus grand nombre sur ce territoire durement touché par le virus.

Département jugé prioritaire parce que durement touché par le coronavirus depuis le début de l'épidémie, la Seine-Saint-Denis (93) est pourtant loin derrière les autres en terme de nombre de personnes vaccinées. Invité de la matinale de France Info, le député LFI Alexis Corbière, député du 93, a critiqué le taux de vaccination dans le département.

Et pour cause, 1,9 % des habitants a bénéficié d'au moins une dose, contre 3,4 % en moyenne dans le pays, selon les derniers chiffres de Santé Publique France, au 14 février. Soit la plus mauvaise couverture vaccinale à date en France métropolitaine.

A tel point que le préfet de Seine-Saint-Denis, Georges-François Leclerc, inquiet de ces mauvais chiffres, a sommé ce week-end les communes du 93 d'augmenter la cadence de la vaccination, ou tout du moins, du nombre de prises de rendez-vous pour les prochains mois. Dans un courrier adressé aux maires du département, il juge même «tout simplement inconcevable que ce département n'ouvre pas de rendez-vous sur Doctolib en février et en mars».

Le manque de vaccins en cause

La faute à qui ? Alexis Corbière pointe du doigt le manque de vaccins disponibles par rapport à ce qui avait été annoncé par... le préfet lui-même. Dans sa circonscription par exemple, l'élu parle de «200 vaccins disponibles chaque semaine pour une population de 180.000 habitants». A ce rythme, l'ensemble de la population pourrait être vacciné dans 17 ans. Une pénurie à l'origine d'ailleurs, selon lui, de la fermeture de nombreux centres de vaccination, qui étaient pourtant prêts à accueillir les publics concernés.

Pire encore selon le député insoumis : «le préfet veut que tous les rendez-vous soient pris sur Doctolib». Sauf que la fracture sociale est telle en Seine-Saint-Denis que la population a «plus de difficultés à avoir accès à Doctolib», parce que plus âgée ou trop éloignée des outils numériques, estime Alexis Corbière, évoquant ici un «sentiment partagé par les élus locaux». Résultat : «on constate qu'environ 30 % de nos doses de vaccins ont servi à des habitants d'autres départements», regrette-t-il.

«Jusqu'à deux tiers des vaccinés» venus d'ailleurs

Un pourcentage confirmé par plusieurs professionnels de santé interrogés par Libération, qui relatent cette réalité de terrain commune à de nombreux centres de vaccinations du département. Ainsi, à Pantin (93), près de la moitié (46 %) des vaccinés jusqu'à présent n'habiteraient pas le département ou encore à Aubervilliers (93), 25 % des vaccinés viendraient de la capitale voisine.

Même discours chez le vice-président de la Seine-Saint-Denis délégué à la santé, Pierre Laporte, qui rapporte que les personnes vaccinées résidant dans d'autres départements ont pu «représenter jusqu'à deux tiers des vaccinés» sur son département. «La proportion est plus réduite aujourd'hui» selon lui, mais est le parfait exemple qu'«il faut sortir de l'exclusivité de Doctolib». «On ne peut pas se contenter de Doctolib car on exclut de fait la population la plus précarisée», rajoute-t-il, annonçant qu'un bus mobile circule désormais dans tout le département pour informer et prendre les rendez-vous pour les personnes prioritaires à la vaccination qui n'auraient pas pu le faire seules.

12.000 doses réservées jusqu'à fin mars

Une problématique face à laquelle l'Agence régionale de santé (ARS) Ile-de-France a décidé d'agir vite. Dès lundi, elle a donc annoncé que «50.000 doses de vaccins» seraient désormais réservés «de fin février jusqu'à fin mars» aux publics «les plus éloignés de la vaccination», dont près de 12.000 rien que pour la Seine-Saint-Denis. Dans ce cadre, un premier centre – à destination de cette population moins connectée – a ouvert à Drancy-Bobigny et sera inauguré ce mercredi 17 février dans les locaux de l'Assurance maladie. C'est cette dernière qui sera chargée d'identifier et de contacter ces personnes, afin de leur proposer un rendez-vous rapide.

Ce mardi, «plus de 500 rendez-vous» avaient déjà été fixés par l’Assurance-maladie pour ce nouveau centre, s'est réjoui l'ARS Ile-de-France, ajoutant qu’une opération de prise de contact directe avait été mise en place dès la fin de semaine dernière auprès de personnes âgées en difficulté de Seine-Saint-Denis. «Un premier pas» salué par le président de la Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel qui témoigne à son tour des difficultés qu'ont certains habitants du 93 à accéder à la vaccination «par manque d'information parce qu'elles sont isolées, n'ont pas accès à internet, ou sont éloignés des messages institutionnels».

En outre, les maires du 93 se sont montrés pleinement mobilisés pour vacciner un maximum de leurs administrés. Gilles Poux, le maire communiste de La Courneuve, a assuré par exemple que sa commune était «engagée [...] afin de sortir de cette crise par la meilleure manière et de respecter le principe [...] de garantir l'accès au système de santé».

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