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10 points communs entre Valéry Giscard d'Estaing et Emmanuel Macron

Les deux dirigeants ont de nombreux points communs. Mais ces parallèles ne signifient pas pour autant filiation. [THOMAS SAMSON / POOL / AFP].

Ardent défenseur de l'Europe, moderne, centriste... Après la disparition de Valéry Giscard d'Estaing, mort il y a un an le 2 décembre 2020, les qualificatifs avaient aussitôt afflué pour caractériser l'action et le caractère de l'ancien président de la République décédé à l'âge de 94 ans. Autant d'épithètes que l'on a prêté aussi à Emmanuel Macron.

Mais s'il est vrai que les points communs entre les deux chefs de l'Etat semblent évidents en surface, sur le fond cela peut s'avérer être moins évident. 

Les deux plus jeunes présidents de la Ve République

Lorsque Valéry Giscard d'Estaing se lance dans la course à l'élection présidentielle de 1974, précipitée par la mort de Georges Pompidou, il était alors âgé de seulement 48 ans.

Après une campagne express, il était ensuite devenu, toujours à 48 ans, le plus jeune président de la Ve République.

Il aura fallu attendre 2017 pour que ce record soit battu par Emmanuel Macron. L'actuel chef de l'Etat était alors âgé de 39 ans.

Avant eux, il faut remonter à la deuxième République pour trouver trace d'un président tout aussi jeune. 

Il s'agissait, en l'occurence de Louis-Napoléon Bonaparte, le neveu de Napoléon 1er, élu en 1848 au suffrage masculin direct à seulement 40 ans.

Deux anciens inspecteurs des finances

Le défunt président de la République et son successeur ont un autre point commun, celui d'avoir été tous deux inspecteurs des finances, puis ministre de l'Economie.

Avant de remporter l'élection présidentielle, Valéry Giscard d'Estaing avait en effet exercé ce métier et cette fonction.

Même chose pour Emmanuel Macron qui a été inspecteur des finances en 2004 après ses études à l'ENA, avant d'être nommé, sept ans plus tard, ministre de l'Economie dans le gouvernement de Manuel Valls lorsque François Hollande était président.

UNE ARRIVÉE AU POUVOIR DANS UN CONTEXTE PARTICULIER

Autre similitude, les deux dirigeants sont arrivés au pouvoir dans des contextes plutôt perturbés.

Concernant Giscard, l’élection de 1974 n’a été rendue possible cette année-là qu'en raison de la mort subite de Georges Pompidou en cours de mandat. Résultat : la campagne est précipitée, la droite part divisée entre Jacques Chaban-Delmas, qui fait figure de favori, et Valéry Giscard d’Estaing qui finira par l'emporter.

En 2017, Emmanuel Macron débarque lui aussi dans un paysage politique mouvementé. François Hollande ne se représente pas et François Fillon est empêtré dans les affaires. Des événements imprévisibles qui lui permettront, là aussi, d’accéder au pouvoir.

Deux Européens, mais deux visions de l'Europe

Au chapitre européen, le tropisme réformateur de Valéry Giscard d'Estaing a été à l'origine de trois changements majeurs dans l'organisation de l'Union européenne.

Avec le président allemand de l'époque, Helmut Schmidt, il participe ainsi à la création en décembre 1974 du Conseil européen, réunion régulière des chefs d'Etat ou de gouvernement européens.

En 1978, les deux dirigeants proposent la création du Système monétaire européen (SME), préfiguration de l'Union monétaire et de l'euro. La même année, le Parlement européen est élu pour la première fois au suffrage universel direct. 

Pour autant, VGE s'est toujours montré attaché au projet européen des origines avec cette idée «d'Etats Unis d'Europe» à consolider.

Avec Emmanuel Macron au pouvoir, le défunt président s'est donc toujours montré très perplexe vis-à-vis du fondateur d'En Marche ! à vouloir refonder l'Europe.

Valéry Giscard d'Estaing ne trouvait pas non plus très bonne l'idée d'un budget européen défendue par l'actuel chef de l'Etat inapte, selon lui, à s'intégrer parfaitement dans une confédération.

Une volonté de modernité

Dépénalisation de l'avortement, âge de la majorité abaissé à 18 ans, télévisions émancipées de la coupe de l'Etat, Valéry Giscard d'Estaing a souvent été considéré comme le premier président «moderne» de la Ve République.

Là ou le général de Gaulle ne semblait pas avoir perçu les attentes de la jeunesse, se laissant déborder la révolte étudiante de mai 1968, la présidence giscardienne et les réformes qu'elle entraîne paraissent répondre, sept ans plus tard, aux attentes d'une France moderne.

Avec Emmanuel Macron, cette volonté de modernité va très vite se résumer à la promesse d'un «nouveau monde». Derrière ce nom qui historiquement désigne l'Amérique, un concept où l'innovation prend tout son sens.

Au niveau politique avec un mouvement fondé en quelques mois qui parvient aux plus hautes sphères du pouvoir et au niveau du travail, la «start up Nation», qui, par l'entrepreneuriat, doit définitivement ancrer la France dans le village digital global. 

Deux ambitieux

C'est un trait de caractère que l'on retrouve chez les deux hommes, et d'une façon générale une marque de fabrique chez les hommes politiques. Valéry Giscard d'Estaing et Emmanuel Macron sont deux authentiques ambitieux.

En 1962, Valéry Giscard d'Estaing n’a par exemple que 36 ans lorsque De Gaulle le nomme ministre des finances. C'est lui d’ailleurs qui chargera le jeune VGE d'aller annoncer le remboursement de la dette de la guerre aux États-Unis. Charmé par Kennedy, il en fera l'un de ses modèles et se détache de la figure titulaire du Général, observant le pays qui change.

Lorsque le vieux président annonce en 1969 un référendum sur la régionalisation et la suppression du Sénat, son ancien ministre, devenu député du Puy-de-Dôme, «ne peut s’y associer», ce que les Gaullistes ne lui pardonneront jamais. C'est pourtant bien Giscard qui succèdera après Pompidou au général.

De son côté, installé des années plus tard au gouvernement par François Hollande, Emmanuel Macron n'hésitera pourtant pas lui non plus à s'émanciper et créer En Marche ! son propre mouvement, avec le succès que l'on sait.

François Hollande en a gardé une rancoeur tenace, lançant souvent des piques à l'attention de son successeur.

Dernier épisode en date, le mois dernier à Paris lors des cérémonies du 11-Novembre. «Ça va, c’est pas trop dur en ce moment ?» a laché François Hollande à Emmanuel Macron en faisant référence à la pandémie de coronavirus. «C’est rien de le dire. Merci d’être là, il faudrait qu’on en parle», a répondu ce dernier. L'occasion, peut-être aussi de crever l'abcès.

Deux hommes attirés par le centre

Que ce soit Valéry Giscard d'Estaing ou Emmanuel Macron, les deux hommes sont également proches dans leur volonté d'en appeler à un électorat centriste.

Mais là ou Giscard est davantage considéré comme un authentique centriste, «la famille centriste est veuve ce soir», a par exemple regretté dès mercredi soir Philippe Vigier, député dans l'Indre et membre du MoDem, héritier de l'UDF giscardien, Emmanuel Macron tend plutôt à le transcender dans le macronisme, soit une volonté de dépasser le clivage gauche-droite.

Deux présidents sensibles à la cause des femmes

En voulant faire voter la loi instaurant la dépénalisation de l'avortement, Valéry Giscard d'Estaing confie ce dossier à Simone Veil et la nomme ministre de la Santé. C'est la première fois, sous la Ve République, qu'une femme devient ministre de plein exercice.

C'est également Valéry Giscard d'Estaing qui crée le premier secrétariat d'État à la Condition féminine, en confiant la direction à la journaliste Françoise Giroud.

Concernant les droits des femmes, VGE fait instaurer le divorce par consentement mutuel et adopter des mesures d'égalité professionnelle.

L'Egalité Femmes-Hommes est précisément la grande cause du quinquennat définie par Emmanuel Macron.

L'actuel chef de l'Etat a d'ailleurs décidé de se saisir du sensible dossier des violences conjugales en mettant en place un Grenelle dédié. 

Deux incompris

Là où Emmanuel Macron et Valéry Giscard d'Estaing se ressemblent encore, c'est par leur volonté de casser les codes.

Mais leur image de grand bourgeois s'est aussi heurtée à un rejet d'une partie de l'opinion publique.

Valéry Giscard d'Estaing qui voulait «regarder la France au fond des yeux», selon l'une de ses formules, s'invitait ainsi régulièrement à la table du peuple, pour connaitre leurs préoccupations.

Une démarche faite avec souvent beaucoup de raideur couplée à un phrasé un peu précieux et un nom à particule, d'où une proximité apparaissant souvent comme artificielle.

L'inclinaison pour la tech d'Emmanuel Macron a aussi été parfois mal perçue, dans la mesure où elle mettrait en lumière le fossé entre la France des métropoles et la France périphérique.

Son langage très particulier, rempli à foison de termes surannés, et son passé de banquier d'affaires l'ont aussi parfois aussi coupé d'une partie des Français. Des griefs qui répété à l'envi notamment lors des manifestations de gilets jaunes.

Par ailleurs, là où le septennat de VGE s’est fracassé sur la crise économique, ce que l'on craint par-dessus tout dans les rangs macronistes, c'est que l'histoire ne vienne à se répéter avec la crise du Covid.

Deux écrivains contrariés

Dernier point commun, ces deux hommes de pouvoir se sont toujours rêvés en bonne place dans la République des Lettres.

Quelques semaines avant son élection, Valéry Giscard d’Estaing n'en faisait d'ailleurs aucunement mystère lors d’un dé­ jeuner organisé par La Revue des deux mondes cité dans Le Monde : « Ma véritable ambi­tion serait une ambition littéraire».

Une aspiration qui, durant son septennat, se concrétisera avec un succès de librairie avec son essai «Démo­cratie française (Fayard, 1976)».

En 1994, VGE publie «Le Passage», un roman paru en 1994 où il raconte l'aventure entre un notaire et une jeune auto-stoppeuse. Dans la même veine paraîtra en 2009 «La Princesse et le Président», qui imagine une relation sentimentale entre deux personnages rappelant Lady Diana et lui-même.

De quoi provoquer quelques railleries pour cet ancien président de la République, pourtant élu à l'Académie française en 2003.

Plus jeune, Emmanuel Macron caressait lui aussi le rêve de devenir écrivain. Il en avait d'ailleurs parlé en 2018 à des étudiants, à l'occasion d'un déplacement en Inde avait rapporté Le Figaro.

«Initialement, je voulais être écrivain», avait confirmé alors le chef de l'Etat. Emmanuel Macron avait d'ailleurs écrit un roman que seuls quelques proches ont pu lire.

Un roman d'aventures en Amérique du Sud explique le journal qui ajoute même que l'ouvrage serait «un livre 'un petit peu cochon', à en croire une biographie consacrée à l'épouse du chef de l'État», Brigitte Macron l'affranchie (L'Archipel).

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