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En Inde, opération "Il faut sauver le turban sikh"

Le cours du soir sur la façon d'enrouler son turban à Amritsar, la ville sainte du sikhisme, affiche complet: des dizaines de pré-adolescents sont venus renouer avec une tradition de plusieurs siècles que les chefs religieux craignent de voir s'évanouir.[AFP] Le cours du soir sur la façon d'enrouler son turban à Amritsar, la ville sainte du sikhisme, affiche complet: des dizaines de pré-adolescents sont venus renouer avec une tradition de plusieurs siècles que les chefs religieux craignent de voir s'évanouir.[AFP]

Le cours du soir sur la façon d'enrouler son turban à Amritsar, la ville sainte du sikhisme, affiche complet: des dizaines de pré-adolescents sont venus renouer avec une tradition de plusieurs siècles que les chefs religieux craignent de voir s'évanouir.

Pendant le cours d'une heure trente, les professeurs enseignent aux jeunes garçons la technique permettant de transformer des bandes de tissus de huit mètres aux couleurs chatoyantes en un turban savamment noué, plissé et accroché.

Le turban est le signe le plus visible de la fierté et de l'identité des sikhs, dont la religion, qui combine des aspects de l'islam et de l'hindouisme, leur interdit de se couper les cheveux. A l'armée, les sikhs le préfèrent au port du casque, même lorsqu'ils sont au front.

Mais en Inde, les jeunes sikhs privilégient de plus en plus la mode à la tradition en allant chez le coiffeur, rendant inutile le port du turban.

La tradition a aussi été abandonnée par de nombreux membres de l'importante diaspora dans des pays comme les Etats-Unis, où les sikhs ont été la cible d'attaques en étant confondus avec des musulmans radicaux à la seule vue de leur barbe et de leur couvre-chef.

Selon certains responsables politiques sikhs en Inde, cette confusion pourrait expliquer la récente fusillade dans un temple sikh du Wisconsin, aux Etats-Unis, perpétrée par un ancien soldat proche des milieux néonazis et qui a tué six fidèles avant de se tirer une balle dans la tête.

Selon la tradition, les jeunes sikhs doivent savoir comment enrouler le turban lorsqu'ils arrivent à l'adolescence.

Upneet Singh, 12 ans, a commencé les "cours de turban" voici deux semaines.

"Je vais à l'école religieuse où le turban est obligatoire à mon âge, alors je viens ici pour apprendre comment l'enrouler", confie-t-il.

Pour des chefs religieux tels qu'Avtar Singh, président de l'organisation qui gère le Temple d'Or à Amritsar, l'édifice religieux le plus sacré situé au Pendjab (nord), renoncer au turban revient à vivre hors de la communauté.

"Le turban est un signe de l'estime de soi, un signe de notre fierté", juge ce dignitaire barbu de 71 ans. "Aucun sikh n'est complet sans turban", insiste-t-il en dénonçant l'influence croissante de l'occident sur les traditions religieuses de plus de 20 millions de personnes dans le pays.

"Nous vivons dans un environnement très occidentalisé et de nos jours, les parents sikhs n'expliquent pas suffisamment notre histoire à leurs enfants", regrette M. Singh.

Manjinder Singh, un commerçant, a pour la première fois coupé ses cheveux voici sept ans, lorsqu'il avait 15 ans: "C'était plus moderne d'avoir les cheveux courts", argumente-t-il.

Si certains ont délaissé le turban pour des questions de style, d'autres l'ont fait pour se protéger.

L'assassinat du Premier ministre Indira Gandhi en 1984 par ses gardes du corps sikhs avait déclenché de sanglants massacres antisikhs et de nombreux membres de cette communauté ont ensuite décidé de se couper barbe et cheveux pour échapper à la violence.

Pour Jaswinder Singh, qui avait 15 ans à l'époque, cet épisode a au contraire renforcé sa foi et lorsqu'en 1997, il commença à noter que de jeunes gens fréquentaient les salons de coiffure, cet avocat sut qu'il avait trouvé un moyen d'exprimer ses convictions.

Il fonda en 2003 un mouvement "de fierté du turban" et créa des cours pour réapprendre les gestes. Selon lui, moins de la moitié des jeunes sikhs au Pendjab porte le turban aujourd'hui mais ses cours sont un succès total, assure-t-il.

Outre les cours du soir, Singh organise des concours de pose du turban, des lectures de poésie sur le thème du couvre-chef, et même... un concours de beauté baptisé "Mr Singh International".

Il remet aussi au goût du jour de grandes cérémonies appelées "dastar bandi" au cours desquelles l'applique du turban sur la tête de jeunes garçons symbolise le passage à l'âge adulte, une tradition qui s'était peu à peu perdue.

Et pour s'assurer que les adolescents ne changeront pas d'avis plus tard, il a mis au point un CD-Rom ludique, "Smart Turban 1.0", qui montre les 60 différentes façons de nouer son turban.

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