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Covid-19 : Bientôt une vaccination sans aiguille ?

Des technologies existent pour administrer les vaccins sans utiliser de seringue. Des technologies existent pour administrer les vaccins sans utiliser de seringue. [BEHROUZ MEHRI / POOL / AFP]

Alors que la vaccination prend de l’ampleur à travers le monde, se pose la question des stocks de seringues. Les États semblent pour le moment optimistes, assurant que des millions de seringues et aiguilles sont toujours disponibles, et continuant à passer commande auprès des fournisseurs. Cependant, d’autres méthodes d’administration de vaccin existent, et ne nécessitent pas ce matériel.

Une start-up canadienne a notamment mis au point un pistolet sans injection, le Med-Jet H4. Une cartouche contenant le vaccin est placée à l’intérieur de l’appareil. Au lieu de percer la peau avec une aiguille, ce pistolet produit des micro-jets de vaccin qui vont s’infiltrer dans les pores de la peau, et se diffuser dans l’organisme, explique le Journal de Montréal. Cette technologie a été homologuée au Canada, et ses inventeurs sont en train de faire les démarches nécessaires auprès du ministère de la Santé pour que leur appareil soit utilisé dans le cadre de la campagne de vaccination contre le Covid-19.

L’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS) a procédé à des examens de cette technologie et d’autres modèles d’injecteur sans aiguille pour tester leur efficacité. Ils se sont notamment penchés sur le vaccin antigrippal, le vaccin antipoliomyélitique, le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole, et le vaccin contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et l’hépatite B. Dans tous les cas, l’agence a constaté une réponse immunitaire semblable lors que le vaccin est administré grâce à un injecteur sans aiguille, qu’avec une seringue classique. Les scientifiques notent cependant «un plus grand nombre d’effets indésirables locaux», type rougeurs ou enflures, avec ce type de pistolet, mais moins d’effets indésirables «systémiques», à savoir de la fièvre, des douleurs musculaires, ou de la fatigue, qu’avec une seringue et une aiguille. L’Agence souhaite toute de même que de plus amples études se penchent sur cette question.

Des vaccins en «patch»

Plusieurs méthodes existent pour administrer un vaccin par voie intradermique (par la peau). Outre les injecteurs sans aiguille, un système composé d’un tapis de «micro aiguilles», autrement connu sous le nom de «patch» vaccinal a été mis au point il y a plusieurs années. Des chercheurs américains de l’Université de Pittsburg sont notamment en train de concevoir un vaccin de ce type contre le coronavirus.

Les premiers tests de ce vaccin sur les souris ont été plutôt concluants, puisque le PittCoVacc (pour Pittsburg Coronavirus Vaccine) a permis de produire une poussée d’anticorps contre le SAR-Cov-2 les deux semaines suivant l’application du patch sur la peau. Les tests sont cependant toujours en cours pour une généralisation sur les humains.

Des doses plus faibles de vaccin

Administrer un vaccin sans aiguille est un processus sur lequel les scientifiques travaillent depuis de nombreuses années.  Or il ne suffit pas de prendre un vaccin déjà développé et de l’injecter en intradermique, comme explique à CNEWS Béhazine Combadière, directrice de recherche à l’Inserm et membre du Centre d'Immunologie et des Maladies infectieuses de Sorbonne Université : «Quand on veut vacciner par la peau il faut tenir compte de plusieurs paramètres. Tout d'abord, le vaccin lui-même. Les doses que l’on injecte en vaccination par la peau ne sont pas les mêmes que celles qu'on injecte en intramusculaire, on utilise des doses beaucoup plus faibles.» Dans le cadre de la pandémie de Covid-19, les scientifiques devront donc mettre au point une formule spéciale pour la vaccination intradermique, ou devront réaliser des tests avec des doses très faibles de vaccins déjà existent, et tester leur efficacité. Si les essais sont concluants, cela voudrait dire qu’une dose de vaccin actuelle pourrait servir à vacciner plus de personnes.

Si de nombreuses études ont déjà été menées sur le sujet, l’utilisation de cette méthode reste encore au stade expérimental. Les scientifiques doivent encore prouver que les doses injectées par la peau pénètrent bien dans l’organisme, et de «ressortent» pas. «Il faut imaginer que la peau est une barrière qu’il faut traverser. Si on réalise une injection dans le derme que tout le produit ne pénètre pas, les patients n'auront pas la même dose de vaccin. Il faut donc observer une certaine régularité dans les essais cliniques», explique la chercheuse.

Une méthode efficace contre les cellules infectées

Il existe deux «bras», dans le système immunitaire : la réponse humorale, qui correspond à la production d’anticorps, qui empêchent le virus d’entrer dans les cellules, et la réponse cellulaire, ou cytotoxique, qui permet de détruire les cellules déjà infectées par le virus. Du point de vue de l'immunologie, la méthode de vaccination intradermique a déjà fait ses preuves. Les recherches réalisées par l’Inserm et Mme Combadière ont démontré que la vaccination intradermique stimule la réponse immunitaire cellulaire, tout en ayant la même efficacité que les vaccins classiques sur la réponse humorale.

«Les vaccinologues en général visent la réponse anticorps, car c'est ce qui empêche au virus d'entrer. Mais il faut aussi penser à la réponse cytotoxique, car elle reconnait les parties non-variables du virus, détaille l’experte. Si on a affaire à un variant, induire des réponses cytotoxiques permettrait quand même participer au contrôle de l'infection.» Une méthode qui pourrait donc être utile dans le cadre de la lutte contre le coronavirus, dont plusieurs variants plus contagieux se propagent.

Cependant, la généralisation des patchs ou des injecteurs sans aiguille pour la vaccination de masse sera évidemment dépendante de leur coût, et ne pourra avoir lieu que si ces vaccins et outils reviennent au même prix que la traditionnelle seringue.

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