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Election présidentielle en Russie : tout savoir sur le scrutin qui a commencé ce vendredi

Si aucun candidat ne recueille plus de la moitié des voix, un second tour est prévu exactement trois semaines plus tard, soit le 7 avril 2024. Le vainqueur de l'élection doit être investi le 7 mai 2024. [Sputnik/Sergei Savostyanov/Pool via REUTERS]

La Russie organise dès ce vendredi 15 et jusqu'au dimanche 17 mars une élection présidentielle qui devrait voir Vladimir Poutine conserver son pouvoir. Un scrutin qui doit asseoir sa légitimité, faute de véritable opposants, pour un nouveau mandat de six ans, en dépit du trouble suscité par la guerre en Ukraine.

En vertu d’une modification constitutionnelle signée en avril 2021, lui permettant de se présenter pour deux nouveaux mandats présidentiels et ouvrant la voie à son maintien au Kremlin jusqu’en 2036, Vladimir Poutine devrait conserver son pouvoir, ce dimanche, à l’issue d’une élection présidentielle sans véritable opposition.

Mode de scrutin

Le président de la fédération de Russie est élu au scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour un mandat de six ans, normalement renouvelable une seule fois. Conformément à l'article 81 de la Constitution, un candidat à la présidence doit être âgé d'au moins 35 ans, avoir résidé en permanence en Russie pendant les 25 dernières années, et ne jamais avoir eu de citoyenneté étrangère ou de permis de séjour dans un pays étranger.

Pour pouvoir soumettre leurs candidatures, les candidats doivent obtenir le soutien officiel d'un parti politique représenté à la Douma et/ou dans les organes législatifs, ou bien se présenter de manière indépendante. Ils doivent également recueillir un minimum de 100.000 signatures de citoyens russes (300.000 pour les candidats indépendants), et fournir des «documents d'enregistrement de candidature» à la Commission électorale centrale de la fédération de Russie (CEC) au plus tôt 80 jours et au plus tard 45 jours avant la date du scrutin.

Conformément à la loi électorale, le premier tour a lieu du 15 au 17 mars 2024. Si aucun candidat ne recueille plus de la moitié des voix, un second tour est prévu exactement trois semaines plus tard, soit le 7 avril 2024. Le vainqueur de l'élection doit être investi le 7 mai 2024.

Pas d'opposition

Candidat à sa propre succession, Vladimir Poutine aura pour seuls adversaires trois candidats «autorisés» : le nationaliste Léonid Sloutski, le communiste Nikolaï Kharitonov et l'homme d'affaires Vladislav Davankov. Tous ont soutenu la campagne militaire en Ukraine. À l’inverse, les seuls candidats déclarés s'opposant au conflit en Ukraine, dont les libéraux Boris Nadejdine et Ekaterina Dountsova, soutenus par les signatures de dizaines de milliers de Russes, ont été interdits de participation, officiellement pour des erreurs dans leur dossier.

Selon les détracteurs du pouvoir, la participation de ces trois «faux adversaires» sert à canaliser le mécontentement de diverses strates de la société russe et donner un semblant de pluralisme au vote, alors que l'opposition réelle a été muselée par des années de répression. Par ailleurs, toujours selon les opposants au régime, les candidats n’auront aucune chance de l’emporter, même en cas d’élan populaire contre Vladimir Poutine. Et pour cause, les autorités ont plusieurs outils pour contrôler les résultats : trucage de votes effectués en ligne et à distance, bourrage d'urnes, falsification des procès verbaux après le dépouillement, pressions sur les millions de fonctionnaires à travers le pays pour aller voter pour le pouvoir.

Ioulia Navalnaïa, la veuve de l'opposant Alexeï Navalny, a appelé ses soutiens à se réunir dans les bureaux au même moment et à voter pour «n’importe quel candidat sauf Poutine» ou à invalider leur bulletin en y écrivant «Navalny» en grosses lettres.

Des promesses pour l’avenir

Malgré un résultat qui ne fait guère de doutes, le pouvoir s'investit activement dans la campagne. Objectif : renforcer la légitimité en interne et à l'international de Vladimir Poutine en montrant qu'il jouit d'un soutien massif dans les urnes et dans la société. Le président russe, en meilleure posture après des succès relatifs sur le front en Ukraine dans un contexte d'effritement du soutien occidental à Kiev, a multiplié les apparitions médiatiques ces dernières semaines, s'affichant avec des étudiants, dans des usines, ou à bord d'un bombardier des forces de dissuasion nucléaire.

Le président russe ne participera à aucun débat électoral, ce qu'il n'a jamais fait depuis son arrivée au pouvoir il y a un quart de siècle. Fin février, dans son discours annuel à la nation, Vladimir Poutine a dévoilé le détail de son programme jusqu’en 2030, faisant notamment une longue série d'annonces chiffrées, et promettant des milliards de roubles pour moderniser les infrastructures, pour lutter contre la pauvreté et un déclin démographique prononcé, ou encore pour numériser le pays. 

Inquiétudes socio-économiques

Même si l'économie russe s'est montrée plus résistante que prévu aux multiples sanctions occidentales, nombre de Russes s'inquiètent de la hausse des prix et, de manière générale, de la déstabilisation suscitée par la campagne militaire en Ukraine. Des problèmes de ressources humaines s'accumulent avec la mort ou le départ au front de milliers de jeunes hommes, et la fuite à l'étranger de centaines de milliers de personnes opposées au conflit ou craignant d'être mobilisées dans l'armée.  

Les autorités se sont aussi montrées fébriles, ces derniers mois, face aux manifestations de femmes de soldats qui demandent leur retour du front, malgré les fortes sommes d'argent et les avantages sociaux promis aux familles de militaires. Autant de facteurs de mécontentement que le régime cherche à canaliser.

incitations pour aller voter

Dans l'espace public, des affiches font appel au patriotisme des Russes pour les inciter à voter. Elles portent un V, l'un des symboles des troupes russes en Ukraine, et le slogan : «Ensemble, nous sommes forts, votons pour la Russie !». Comme à leur habitude, les autorités organiseront des tombolas avec cadeaux à la clé et des animations pour pousser les électeurs à se déplacer, dans un pays où la défiance à l'égard de la politique, en particulier chez les jeunes, est très forte.

Parallèlement, l'Ukraine et ses alliés occidentaux sont présentés comme de potentiels fauteurs de troubles. En décembre, Vladimir Poutine avait ainsi mis en garde contre des «interférences étrangères» lors du vote, et promis une «réponse sévère».  

Vote en territoires occupés

Illustration du paradoxe des autorités russes qui veulent donner une image de normalité tout en menant un conflit de haute intensité, l'élection se tiendra aussi dans les territoires ukrainiens occupées depuis 2022 par Moscou. Kiev affirme que les habitants y sont soumis à des menaces et violences pour aller voter, ce que Moscou dément.

Des soldats russes déployés sur place ont déjà pu glisser leur bulletin dans l'urne, comme si de rien n'était, lors de scrutins anticipés.

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