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Attaque de l'Iran contre Israël : armée, missiles, nucléaire... Ce que l'on sait de l'arsenal iranien

Les forces armées de la république islamique d'Iran se composent de deux groupes distincts : l’Artesh, armée régulière de l'État et les Gardiens de la Révolution, ou «Pasdarans», une armée parallèle et idéologique du régime. [@AFP]

Quelques heures après l’attaque lancée par l’Iran sur Israël, le président iranien Ebrahim Raïssi a prévenu que la réaction de son pays serait «plus forte» en cas de «comportement imprudent» de l'État hébreu. Mais le pays est-il en capacité de mettre à exécution ses menaces et que représente la puissance de son arsenal militaire ? État des lieux.

185 drones, 36 missiles de croisière et 110 missiles balistiques. Un déluge de feu en provenance de l’Iran s’est abattu, dans la nuit de samedi à dimanche, sur Israël, en réponse à l’attaque de l’État hébreu sur le consulat iranien de Damas. Anticipée et quasiment totalement défaite par les systèmes de défense israéliens, bien secondés par des moyens américains, britanniques et français, cette attaque iranienne met toutefois en lumière la puissance militaire du pays, qui s’est renforcée ces dernières années, avec en point d’orgue une potentielle force de dissuasion nucléaire dont l’avancement reste flou. 

Armée régulière et Gardiens de la révolution 

Les forces armées de la république islamique d'Iran se composent de deux groupes distincts : l’Artesh, armée régulière de l'État, principalement chargée de la défense des frontières, de la défense anti-aérienne et de la protection maritime ; et les Gardiens de la Révolution, ou «Pasdarans», une armée parallèle et idéologique du régime, qui fait partie intégrante non seulement de l'appareil de défense du pays, mais, au-delà, du système de gouvernement instauré par les mollahs. 

Dans le détail, l'armée iranienne est composée de quatre branches : l'armée de terre, les forces aériennes, la marine et les forces spéciales, pour un effectif d’environ 415.000 militaires et 350.000 réservistes. L’armée régulière est doublée par la force des Pasdarans, qui dispose de 300.000 hommes répartis dans une vingtaine de grandes formations, dont des unités terrestres, aériennes (notamment parachutistes) et navales, ainsi que dans les forces al-Qods (Forces spéciales), bras armé des interventions non conventionnelles de l'Iran en dehors de son territoire.  

Au total, l'Iran dispose donc d'environ 715.000 soldats, dont une partie reste toutefois cantonnée à des fonctions plus politiques que militaires, ce qui fait de l'armée iranienne la septième plus importante au monde. En 2016, le budget militaire de l'Iran s'élevait ainsi à 15,9 milliards de dollars, soit entre 2,5 et 3% de son PIB. Un montant proche de celui de certains de ses voisins, comme la Turquie ou le Pakistan, mais très éloigné de l'Arabie saoudite (plus de 60 milliards de dollars, soit environ 8% de son PIB), et inférieur à Israël (environ 20 milliards de dollars), qui demeure un plus petit pays, loin des 89 millions d'habitants de l'Iran. 

Un arsenal militaire vieillissant  

Fort des transferts de technologie dont il a bénéficié auprès de ses partenaires, comme la Russie, la Chine ou la Corée du nord, le régime actuel a mis en place une industrie d'armement nationale, et s'avère en mesure de produire en quantité des équipements simples - munitions, armes légères comme des fusils d'assaut et des mortiers, ou encore des véhicules non blindés. Des équipements réputés produits par l'Iran lui-même sont ainsi exportés vers ses alliés, le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien. Toutefois, selon les spécialistes, il s'agit le plus souvent d’armes qui peuvent paraître obsolètes au regard des équipements qui arment les plus puissantes armées au monde. 

Selon des données de 2016, l’armée iranienne dispose de plus de 330 avions de combats, dont certains datent de l’époque du Shah, mais aussi de trois sous-marins, ainsi que plusieurs frégates et une cinquantaine de patrouilleurs et vedettes qui sont destinés à des opérations de sécurité côtières. Plusieurs des experts auditionnés par le Sénat en 2015 ont toutefois souscrit à l'estimation d'une capacité de résistance de cette flotte limitée à quelques jours, voire quelques heures, en cas d'attaque, notamment, par la flotte américaine basée à Bahreïn

Drones et missiles 

Si l’arsenal militaire iranien ne semble pas au niveau des plus grandes armées, l’Iran possède en revanche l’un des meilleurs systèmes du monde en matière de défense aérienne du territoire, avec notamment le radar russe «Rezonans» et les systèmes de défense «Avtobaza», ainsi qu'un très grand nombre de radars classiques russes et chinois. Après la guerre avec l'Irak dans les années 1980, l'armée iranienne a bénéficié dans les deux décennies suivantes d'un effort d'investissement important en faveur de sa modernisation, notamment financé par la rente pétrolière du pays. L'Iran détient en effet 10% des réserves pétrolières de la planète et 18% des réserves de gaz naturel. 

Par ailleurs, l’Iran a développé une gamme de missiles balistiques et de drones dans le cadre d’un programme national. Si leur nombre exact est inconnu, l’agence de presse officielle ISNA, en Iran, a publié un graphique montrant plusieurs missiles iraniens susceptibles, selon elle, d’arriver jusqu’en Israël. Parmi eux, le «Sejil» qui serait capable de voler à plus de 17.000 km/h, avec une portée de 2.500 kilomètres ; le «Kheibar», avec une portée de 2.000 kilomètres et le «Haj Qassem», avec une portée de 1.400 kilomètres, baptisé ainsi en hommage au commandant des Forces spéciales, Qassem Soleimani, tué par une frappe aérienne américaine en 2020 à Bagdad.

Au total, l’Iran disposerait donc d’une variété de missiles balistiques qui ont une portée de 300 à 3.000 kilomètres. Des missiles balistiques tirés depuis l'Iran mettraient ainsi, selon les spécialistes, douze minutes pour atteindre Israël. Il faudrait en revanche deux heures pour les missiles de croisière et neuf heures pour les drones pour atteindre l'État hébreu. Côté drones, justement, l’Iran, qui s’est spécialisé dans leur fabrication, a fait savoir au mois d’août dernier, que des drones avancés (le Mohajer-10) d’une portée opérationnelle de 200 kilomètres, capables de voler avec une charge allant jusqu’à 300 kilogrammes, ont été produits par le pays.

Enfin, au mois de juin dernier, le pays a présenté ce qui serait le tout premier missile hypersonique fabriqué au sein de la république islamique, selon l’IRNA. Les missiles hypersoniques peuvent voler cinq fois plus rapidement que la vitesse du son, sur une trajectoire complexe, ce qui les rend difficiles à intercepter. La république islamique dispose aussi de missiles de croisière comme le «Kh-55», une arme à capacité nucléaire qui aurait une portée de 3.000 kilomètres et le missile anti-navire «Khalid Farzh», qui serait susceptible de transporter des ogives allant jusqu’à une tonne.

Programme nucléaire 

En plus de son arsenal militaire, c’est surtout le potentiel arsenal nucléaire iranien qui inquiète les Occidentaux. Selon les spécialistes auditionnés par le Sénat, il est très difficile d'apprécier jusqu'à quel degré d'approche de l'arme atomique le pays a pu parvenir. Si Téhéran a toujours affirmé que ses activités sont pacifiques et nié vouloir fabriquer une bombe atomique, l’Agence internationale de l’Énergie atomique (AIEA) a rapporté en 2019 que l’Iran a successivement dépassé la limite autorisée pour son stock d’uranium faiblement enrichi, et le taux d’enrichissement autorisé par l’accord sur le nucléaire iranien.

Selon l’AIEA, l’Iran accumule désormais de l’uranium enrichi jusqu’à 60% et a démarré la production d’uranium métal, deux activités qui constituent des étapes clé du développement d’une arme nucléaire et ne sont justifiées par aucun besoin civil crédible. En parallèle, l’Iran a substantiellement réduit les accès de l’Agence internationale de l’énergie atomique à partir du 23 février 2021, en cessant d’appliquer les mesures de vérification et de suivi prévues par l'accord. 

«Aujourd’hui il semble que l’Iran a choisi de devenir ce que l’on appelle un pays du seuil, c’est-à-dire un pays qui maîtrise la technologie, et qui est capable, si nécéssaire, de construire très rapidement une bombe atomique», précise Thierry Coville, chercheur à l’IRIS, et spécialiste de l’Iran, pour CNEWS. «Il y avait des négociations informelles entre l’Iran et les États-Unis, notamment au sujet du nucléaire. Il est probable qu’elles se soient complètement arrêtées à cause de la guerre à Gaza. Mais ce qu’on entend dire, c’est que Joe Biden reprendra sans doute les négociations avec l’Iran s’il est réélu», affirme Thierry Coville.

«Par contre, si Donald Trump est réélu, il veut revenir à ce qu’il appelle une politique de pression maximale. C'est-à-dire mettre une pression économique totale contre l’Iran, pour les forcer à négocier sur quasiment tous les sujets, allant des conflits régionaux jusqu’au nucléaire. On rentrerait alors dans un niveau d’incertitude extrême. C’est très clair», conclut le chercheur. 

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